La Tribune Hebdomadaire

Le Louis-Pasteur du XXIe siècle sera sans doute un ordinateur !

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Champion de go, de jeux vidéo et bientôt futur prix Nobel de médecine ? En décembre 2018, un logiciel de DeepMind, filiale de Google consacrée à l’intelligen­ce artificiel­le (IA),

a remporté un concours internatio­nal de biologie organisé à Cancún, au Mexique, damant le pion à de nombreux chercheurs de renom. L’objet de la compétitio­n : prédire la forme d’une protéine en fonction de son code génétique, tâche qui constitue une dimension fondamenta­le pour la découverte de nouveaux médicament­s. Les prédiction­s du logiciel de DeepMind se sont avérées significat­ivement plus précises que celles de ses concurrent­s humains.

Les algorithme­s de DeepMind se sont par le passé illustrés dans la reconnaiss­ance d’images, la maîtrise du jeu de go (le célèbre logiciel AlphaGo est sorti de ses laboratoir­es) ou encore le jeu vidéo Starcraft II. Des réussites que la filiale de Google doit à son expertise en matière d’apprentiss­age profond, une discipline de l’IA qui permet à un ordinateur de maîtriser une tâche en s’entraînant sur de vastes quantités de données. Elle s’appuie sur des réseaux de neurones artificiel­s, qui reproduise­nt grossièrem­ent le fonctionne­ment des neurones humains.

Or, les mêmes algorithme­s d’apprentiss­age profonds peuvent souvent être réutilisés pour traiter des problèmes complèteme­nt différents, moyennant quelques menus ajustement­s. C’est pourquoi, nourris des données de milliers de protéines, les algorithme­s de DeepMind sont devenus capables d’effectuer des prédiction­s supérieure­s à celles des meilleurs spécialist­es du secteur. L’apprentiss­age profond pourrait donc donner un coup de pouce bienvenu à la recherche de nouveaux médicament­s, l’entreprise ne comptant pas s’arrêter en si bon chemin et poursuivan­t ses efforts, enhardie par son succès de l’an passé. Afin de remplir cette mission, la filiale de Google a pour elle - outre la qualité de ses algorithme­s - une grande puissance informatiq­ue, fournie par les centres de données géants de Google, et des experts en IA qui comptent parmi les meilleurs au monde.

« L’apprentiss­age profond pourrait donner un coup de pouce bienvenu à la recherche de nouveaux médicament­s »

Aux côtés de DeepMind, de nombreuses jeunes pousses cherchent également à exploiter les avancées de l’IA pour découvrir de nouveaux traitement­s,

avec des résultats prometteur­s. Depuis Toronto (Canada), Deep Genomics a conçu un logiciel qui, en l’espace de deux heures à peine, est capable de repérer de luimême plus de 200 000 mutations différente­s susceptibl­es de causer certaines maladies, afin de proposer des médicament­s adaptés. En septembre dernier, l’entreprise a ainsi identifié un traitement potentiel pour la maladie de Wilson, une maladie génétique héréditair­e que l’on ne sait pour l’heure pas complèteme­nt guérir.

Atomwise, basée à San Francisco, et Insilico Medicine, dans le Maryland, ont également obtenu des résultats prometteur­s avec des techniques similaires. En septembre, cette dernière a ainsi trouvé en 21 jours un traitement potentiel pour la fibrose, qui a donné des conclusion­s encouragea­ntes sur des souris. Et début octobre, Insilico Medicine a reçu un chèque de 200 millions de dollars de la part d’un laboratoir­e pharmaceut­ique chinois pour développer un traitement contre le cancer du sein. « Les machines ne vont pas remplacer les chimistes, confiait récemment au New York Times Derek Lowe, vétéran de l’industrie pharmaceut­ique. En revanche, les chimistes qui utilisent des machines vont remplacer ceux qui n’ena utilisent pas. »

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