La Tribune Hebdomadaire

Métro, vélo, Hidalgo

Moins de voitures, davantage de pistes cyclables et de transports publics... À quelques mois des municipale­s, la maire de Paris défend son bilan en matière de mobilité.

- PROPOS RECUEILLIS PAR NABIL BOURASSI, PHILIPPE MABILLE ET JÉRÔME MARIN

LA TRIBUNE – Votre mandat a été marqué par vos décisions concernant la réduction de la place de la voiture à Paris, avec la fermeture des voies sur!berge et la création de pistes cyclables. Le point d’arrivée, à la veille des élections de 2020, correspond-il à vos plans initiaux"?

ANNE HIDALGO – Nous avons été élus sur un mandat. Lors de la campagne municipale de 2014, nous avions travaillé autour d’une vision, « Oser Paris », dont l’engagement écologique était clair et affirmé. Ce"e vision venait de loin#: dès 2001, avec Bertrand Delanoë, l’équipe municipale posait la question de l’investisse­ment dans les transports collectifs, avec le lancement du tramway, et anticipait la révolution de ce que l’on n’appelait pas encore les mobilités, avec les projets Vélib’ et Autolib’ qui ont fait de Paris une ville pionnière copiée dans le monde entier.

Ce"e stratégie de long terme, affirmée dès 2001 et amplifiée en 2014, visait de façon transparen­te à réduire la place de la voiture individuel­le en ville, pour perme"re un rééquilibr­age de l’espace public et faire baisser la pollution et les émissions de CO2. En 2014, la majorité municipale que j’anime arrive sur un programme clair#: prolongeme­nt du tramway, développem­ent des transports collectifs, fermeture des voies sur berge, plan vélo massif. Avec mon adjoint Christophe Najdovski, nous prenons pour modèle les villes qui nous paraissent les plus en pointe, Copenhague et Amsterdam, et décidons de lancer un programme d’infrastruc­tures avec des pistes cyclables plus larges, bidirectio­nnelles, protégées, pour perme"re la généralisa­tion du vélo. Nous accélérons aussi le rééquilibr­age de l’espace public pour donner plus de place aux piétons, avec l’élargissem­ent des trottoirs et la réfection complète de sept# places parisienne­s# : Nation, République, Bastille, place des Fêtes…

Tout s’accélère en 2015, lorsque Paris accueille la COP21. À ce moment-là, la prise de conscience de l’urgence climatique se fait plus forte. Présidente du C40, une organisati­on qui rassemble les plus grandes villes du monde, je reçois à Paris 1$000 maires du monde entier avec Michael Bloomberg, alors envoyé spécial de l’ONU pour les villes et le climat, ce qui nous permet de porter devant les négociateu­rs de la COP21 des propositio­ns plus radicales. Face aux résistance­s qui s’expriment fortement contre nos politiques de réduction de la place de la voiture, nous décidons de construire une alliance des villes pour le climat. Nous voyons le lobby automobile se me"re en action pour brider les villes dans la sortie du diesel ou inciter à des motorisati­ons moins polluantes. Pour vaincre ces résistance­s, nous, maires des grandes villes, devons pouvoir nous appuyer sur les citoyens et disposer de temps pour me"re en oeuvre des stratégies de long terme. Les Accords de Paris fournissen­t un cadre pour agir et l’urgence climatique et la santé publique nous commandent de poursuivre ce combat pour la qualité de l’air.

Avec la fermeture des voies sur berges et le report sur des transports en commun devenus saturés, est-ce qu’aujourd’hui vous pouvez dire que les Parisiens peuvent être satisfaits de leur mobilité"?

Si on la compare à d’autres grandes capitales, Paris a la chance d’être une ville dont le réseau de transports publics est très, très dense, avec une station de métro ou de bus à moins de 10 minutes à pied pour chaque

Parisien. Des investisse­ments massifs ont aussi été faits dans les infrastruc­tures de transport en Île-de-France. Paris est reconnu au niveau internatio­nal, notamment lorsqu’on a présenté notre candidatur­e aux Jeux olympiques, pour son réseau de transport le plus fourni au monde. C’est un véritable atout.

Le problème que nous avons, c’est le retard pris dans la constructi­on du Grand Paris Express, qui concerne le réseau de transports au-delà de Paris dans ses frontières administra­tives. C’est un sujet sur lequel on travaille depuis plus de dix ans, pour construire des prolongeme­nts aux lignes de métro et des trajets de banlieue à banlieue. Dès le lancement du Grand Paris par Nicolas Sarkozy puis du Grand Paris Express par François Hollande, la Ville de Paris a contribué, y compris financière­ment, pour apporter à ce nouveau système de transport, dont nous n’avons pourtant pas la responsabi­lité, des moyens. Mais cela ne va pas assez vite.

«!L’urgence climatique et la santé publique nous commandent de poursuivre le combat pour la qualité de l’air!»

Les transports publics en Île-de-France, c’est essentiell­ement un problème de gouvernanc­e"?

Je ne veux pas déposséder la région, je suis pour la décentrali­sation. Mais dans une région comme l’Île-deFrance, on ne peut pas faire cohabiter la Société du Grand Paris qui relève de l’État et IDF Mobilités dirigée par la région. Une fusion des deux est indispensa­ble pour maîtriser le rythme des investisse­ments. C’est quand même l’État, avec sa problémati­que propre de respect des critères de Maastricht, qui a fait dérailler le calendrier du Grand Paris Express. Le financemen­t était bouclé et patatras, après 2017, l’État demande d’intégrer le coût de la de!e de l’investisse­ment dans le coût final du projet. Il manquait seulement 70 millions d’euros. Personne ne nous demandait à Bruxelles de faire rentrer le Grand Paris Express dans le calcul de Maastricht. C’est une dépense d’investisse­ment, qui compense une de!e écologique, car tout le transport public qu’on ne fait pas, c’est de la de!e pour nos enfants. C’était une erreur totale. On a ralenti le projet, on a dû rechercher des financemen­ts, alors qu’on parle d’investisse­ments dont les amortissem­ents seront étalés sur soixantedi­x ans, avec des taux d’intérêt très bas. Ce n’était pas un sujet. Quand on veut inciter les gens à passer de la voiture individuel­le à des modes de transport collectif, il faut que les investisse­ments suivent. La Ville de Paris a apporté sa contributi­on là où j’ai une responsabi­lité, en finançant de nouveaux transports. Je pense notamment au tramway, que ce soit le T3 qui poursuit sa progressio­n vers l’ouest, mais aussi le prolongeme­nt du T2 des Hauts-deSeine jusqu’à la porte de Versailles. La ville de Paris a pris sa part": nous avons contribué à l’améliorati­on des transports de surface, mais aussi à" celle de transports souterrain­s en"finançant une grande partie de l’automatisa­tion de la ligne"1 et de la ligne"4 du métro.

Les chi#res montrent une baisse du trafic automobile depuis 2010. Mais avec un transport public saturé, est-il possible de réduire encore la place de l’automobile"?

Je pense qu’il y a encore du grain à moudre. Là aussi, on a agi là où on pouvait agir rapidement, et où c’est notre rôle. La région a un rôle sur les infrastruc­tures et je ne réclame pas ses compétence­s. Mais je réclame que Paris et la métropole aient des compétence­s sur tous les transports et la mobilité de surface, parce qu’on peut être plus réactifs que la région ou l’État pour mettre en place des tramways, des bus comme prévu sur les quais hauts. Sur l’aménagemen­t futur des grandes voies dans Paris et dans la métropole, qu’il s’agisse du périphériq­ue et de tous les accès à Paris, un travail collectif a été fait par la Ville, la Région et l’État, avec quatre scénarios d’évolution. Bonne nouvelle, tout le monde converge sur l’idée qu’il faudrait, avant les JO de 2024, dédier une voie aux transports collectifs et aux transports « propres », voitures électrique­s ou covoiturag­e.

Faire comme à Los Angeles, est-ce possible d’imposer cela à l’infrastruc­ture francilien­ne"?

L’objectif n’est évidemment pas de rajouter des infrastruc­tures routières en Île-de-France, mais de mieux les organiser pour en faire le support de mobilités partagées ou collective­s. Dans les quatre scénarios, il y a des pistes très intéressan­tes sur lesquelles on va pouvoir s’engager à partir de 2020, 2021. L’une d’entre elles –"c’est à étudier et il faut se concerter bien sûr, il n’y a pas de décision prise"– consistera­it à réserver une des voies du périphériq­ue, intérieur ou extérieur, aux mobilités partagées, y compris aux vélos, aux mobilités actives et aux taxis. Et de me!re l’autre en double sens.

Vous ne craignez pas de susciter encore de la colère, comme après la fermeture des voies sur berge"?

Qui en parle encore aujourd’hui#? Et si je ne l’avais pas fait, en sachant l’impact de la pollution automobile sur la santé des Parisiens, aurais-je été à la hauteur de mes responsabi­lités#? Il faut être sérieux#: nous avons dix ans pour réussir la transition écologique et les villes comme Paris sont en première ligne. Toutes nos mesures additionné­es font baisser de 5#% par an le trafic automobile et la pollution. Si cela n’avait pas été fait, Paris serait irrespirab­le. C’est quoi le modèle que l’on veut pour nos enfants#? C’est New"Dehli où on ne peut plus sortir de chez soi certains jours, ou à l’inverse, des villes comme Copenhague#? Moi, j ’ a i c hoisi le modèle de Copenhague. En politique, il faut avoir le courage de ses conviction­s. Il faut discuter certes, mais il faut aussi avancer. Je pense que la polémique qu’il y a eue sur les voies sur berge, c’est du passé. Certains élus de l’opposition qui se disent progressis­tes, comme Mesdames Bürkli ou Berthout, ont été jusqu’à déposer un recours devant le tribunal administra­tif. Mais aujourd’hui, aucun de ces opposants n’assume de revenir en arrière devant les Parisiens qui dans leur immense majorité soutiennen­t la piétonnisa­tion des quais bas. Le rôle des élus, dans des villes qui ont un impact important sur les émissions de gaz à effet de serre et sur la pollution, c’est d’entraîner nos concitoyen­s dans une stratégie. Celle-ci est très claire pour moi, et c’est celle que conduisent toutes les grandes villes du monde": restreindr­e l’accès des véhicules polluants dans nos grandes métropoles, voire en interdire certains. Quand on fera l’analyse des particules fines dans l’air à partir de 2024, puisque le diesel sera alors totalement interdit, on verra qu’on aura gagné en qualité de vie. C’est la santé des Parisiens qui est en jeu. Ma génération, qui est en responsabi­lité aujourd’hui, doit agir pour convaincre les habitants, face à des blocages parfois culturels et au jeu des lobbies. Parce qu’on n’a pas plus de dix ans devant nous pour engager les grandes modificati­ons qui doivent perme!re de sortir des énergies fossiles. Il faut miser sur les énergies renouvelab­les et accélérer dans les offres alternativ­es à la voiture individuel­le.

Vous l’avez rappelé, Paris a été pionnière, mais avec l’arrêt d’Autolib’, avec la transition di$cile vers le nouveau Vélib’, on a constaté la fragilité des modèles économique­s des nouvelles mobilités. Quelles leçons en tirez-vous"?

Il y a eu des incidents de gestion qui ont impacté le fonctionne­ment de la ville, mais c’est désormais derrière nous. Pour le Vélib’, on est passé à un système métropolit­ain, pas seulement parisien, avec comme condition l’accès à des vélos électrique­s. Il y a eu des difficulté­s, mais cela avait été aussi le cas avec le Vélib’"1 lancé en 2007, avec JCDecaux. On l’a oublié": on retrouvait les vélos à l’étranger.

Ce que j’ai appris, c’est qu’il faut distinguer dans les appels d’offres les infrastruc­tures –" dans le cas du Vélib’"2, la difficulté a été d’alimenter les stations en énergie électrique"– et la gestion du service. Ce ne sont pas les mêmes temporalit­és. Dans la gestion du service, on a une visibilité à trois ans, parce que le numérique fait changer les choses de plus en plus vite. C’est un élément d’apprentiss­age pour la Ville, qui nous permettra, quand il faudra renouveler, de ne pas se lancer dans un renouvelle­ment pur et simple, mais de distinguer les deux. Sur Autolib’, la décision, qui n’a pas été facile à prendre, a consisté à ne pas accepter les conditions financière­s du groupe Bolloré qui réclamait 230 millions d’euros aux communes pour équilibrer un système devenu déficitair­e, alors qu’il avait été créé pour ne pas l’être. Pour prendre ce!e décision, il fallait ne pas avoir la main qui tremble. Cela nous a permis de me!re en place un nouveau système. Certes, la difficulté, c’est qu’il n’y a plus une seule marque chapeau que tout le monde connaît, mais les voitures sont propres, de bonne qualité, quelle que soit la marque, Smart, Renault ou Peugeot. Les Parisiens ont des possibilit­és plus variées d’autopartag­e sur des temps courts, avec des tarifs à peu près similaires. Je l’utilise moi-même. Et on a aussi mis en place un système que Christophe Najdovski, notre adjoint aux Transports, défendait beaucoup": un système d’autopartag­e en boucle pour de la location de plus longue durée, qui permet d’avoir des véhicules et de les ramener là où on a les a loués.

La leçon que je tire de ces expérience­s, c’est que ces systèmes d’autopartag­e ou de Vélib’ ne peuvent pas être bénéficiai­res, à partir du moment où on met des contrainte­s de service public, en termes de tarifs ou de localisati­on des stations. Il faut donc prévoir de la subvention publique, en plus de la tarificati­on. Paris a été précurseur­e avec Autolib’, qui a lancé le mouvement de la mobilité partagée dans les grandes villes. Mais en 2008, on ne pensait pas la révolution digitale comme aujourd’hui" : c’est ce qui explique qu’on ait dû construire des bornes électrique­s. Du coup, Paris a eu un temps d’avance sur les autres, mais au final un temps de retard par rapport aux nouveaux services de mobilité partagé, qui n’ont plus besoin d’infrastruc­tures. Ce qui est resté, c’est que Paris a toujours un temps d’avance sur l’équipement de la ville en bornes électrique­s. Forts de l’expérience, nous avons lancé un appel d’offres sur la gestion des infrastruc­tures pour que Paris reste pionnière et dispose de suffisamme­nt de bornes électrique­s pour les années à venir.

Le plan vélo est une de vos grandes mesures": vous en êtes où, alors que beaucoup de gens se plaignent que cela ne va pas assez vite"?

On a travaillé avec les associatio­ns de cyclistes pour offrir des pistes sécurisées, bidirectio­nnelles qui perme!ent de traverser Paris du nord au sud et de l’est à l’ouest, sur des axes structuran­ts, symbolique­s de la place de l’automobile. Sur la rue de Rivoli, quand on voit l’explosion du nombre d’usagers à vélo et la satisfacti­on des associatio­ns de cyclistes demandant à aller plus loin, je sais qu’on a fait le bon choix. On a longtemps négocié avec la préfecture de police. Et puis un accord a été trouvé avec l’ancien préfet de police Michel Delpuech, qui a permis d’accélérer les travaux comme vous l’avez vu l’été dernier. Il faudra aller plus loin sur des grands axes qui restent aujourd’hui très utilisés par les automobili­stes, et dans le coeur des quartiers pour que vraiment la mobilité à vélo puisse se faire, y compris sur les réseaux de voirie

«!Quand on veut inciter les gens à passer de la voiture individuel­le à des modes de transport collectif, il faut que les investisse­ments suivent!»

secondaire dans des conditions de sécurité toujours renforcées pour les cyclistes.

Les villes comme Copenhague et Amsterdam sont vos modèles, mais est-ce vraiment possible de transposer cela à Paris"?

Ma vision à l’horizon 2030, c’est Copenhague, et même avant. Dans cinq!ans, on y sera. Ce qui est intéressan­t, dans l’exemple de Copenhague, c’est que dans ce"e ville moins dense et moins grande que Paris, avec une culture différente, certes, on observe que même dans ce"e ville du Nord où il fait froid, il pleut, il neige, la pratique du vélo est totalement généralisé­e et occupe une place importante dans les trajets domicile-travail. Ce que j’observe à Paris, ce qui manquait, c’est ce"e infrastruc­ture sécurisée pour les vélos, pour bien montrer que leur place est là. Nos pistes cyclables bidirectio­nnelles et l’arrivée des vélos à assistance électrique sont deux éléments qui se nourrissen­t l’un l’autre et accélèrent ce processus. C’est intéressan­t de voir que dans le public qui utilise le vélo, il y a de plus en plus de personnes qui hésitaient auparavant!: des personnes âgées, des femmes, des familles.

Pour les personnes à mobilité réduite, les familles, les transports à Paris semblent peu inclusifs. Que faire"?

Le développem­ent du vélo ne complique pas l’équation, il ajoute une solution. Le nombre de familles avec des enfants sur des vélos est désormais très impression­nant. Il y a quelque chose qui est en train de se produire à Paris, qui est souhaité par les Parisiens, ceux qui vivent à Paris#; pas ceux qui en parlent et n’y vivent pas. Après, sur le caractère peu inclusif du métro, très clairement, je souhaite que les Jeux olympiques et paralympiq­ues soient un levier pour que Paris réalise un bond significat­if sur l’accessibil­ité du métro. Évidemment un métro construit en 1900 est plus difficilem­ent accessible que les nouvelles rames que l’on ouvre ou que les tramways ou les bus, mais il faut que l’on pose la question de l’accessibil­ité des pousse"es, des personnes à mobilité réduite, des personnes âgées qui hésitent à prendre le métro car il y a beaucoup d’escaliers. L’idée que l’on porte avec Marie-Amélie Le!Fur, présidente du comité paralympiq­ue, c’est –! comme cela a été fait aux JO de

Londres!– de choisir quelques lignes pour les rendre accessible­s aux personnes à mobilité réduite et aux pousse"es.

Il y a de plus en plus de VTC dans Paris. Comment réguler cette situation"?

Pour moi, il y en a beaucoup trop. Il y a un numerus clausus pour les taxis, qui sont pour moi un prolongeme­nt des services publics des transports, qui doivent respecter des règles, suivre une formation, connaître la ville, j’ai eu l’occasion de participer à des formations de taxis parisiens. Les VTC n’ont aucune règle qui s’applique à eux. Ils s’arrêtent n’importe où, chargent ou déchargent n’importe où, sans faire attention, se garent sur les pistes cyclables… Et il y en a beaucoup trop. Ils ne peuvent pas vivre de leur métier. Il y a eu un appel d’air lors de la crise d’Autolib’ qui a provoqué un basculemen­t vers les VTC. En 2015-2016, on a observé une augmentati­on du trafic dans Paris lié à ce phénomène. Il faut aller vers un numerus clausus avec les opérateurs. J’ai mis en place un conseil parisien des mobilités avec tous les acteurs de la mobilité. En juillet, on a eu une réunion à laquelle participai­ent tous les gros opérateurs de la mobilité de surface, et on a eu ce"e discussion. Il faut de la régulation. J’ai réclamé que la nouvelle loi LOM donne aux villes et aux métropoles la compétence pour réguler ces mobilités de surface. Cela me paraît la bonne gouvernanc­e pour agir rapidement. Il n’est pas normal qu’il ait fallu a"endre plus d’un an pour avoir un texte sur les tro"ine"es. Il n’est pas normal que ce genre de sujets se règle encore dans le bureau du ministre de l’Intérieur.

Sur l’appel d’o#res en cours concernant les sociétés autorisées à louer des trottinett­es, quelle est votre position"?

Les tro"ine"es, je les ai vues arriver à San Francisco et j’ai vu ce que la maire a pu faire. Elle avait le pouvoir de les interdire dans un premier temps, pour les forcer à venir discuter les conditions de déploiemen­t. Moi, je n’avais pas ce"e possibilit­é car il y avait un vide juridique. En 2018, quand les tro"ine"es sont arrivées, j’ai écrit à la ministre des Transports devenue celle de l’Environnem­ent pour lui demander un texte disant clairement que c’est un objet intervenan­t dans la sécurité routière. Pendant un an, on m’a dit qu’il fallait une loi. On est passé d’une loi à un décret qui n’est sorti que fin octobre 2019. Ce décret me permet enfin de proposer une régulation. Sur le fond, je pense que la tro"ine"e est un moyen comme un autre de se déplacer. D’ailleurs, celles que les Parisiens ont achetées ne posent pas trop de problèmes de sécurité. Elles doivent respecter le Code de la route, ne pas circuler sur les tro"oirs, leur utilisateu­r doit être incité à porter un casque comme à vélo. Pour les tro"ine"es en

free floating, il faut contingent­er leur nombre. On a vu au début qu’il y a eu jusqu’à 12!opérateurs de tro"ine"es à Paris dont beaucoup ont déjà renoncé car le modèle économique ne tient pas. L’appel d’offres que nous lançons doit sélectionn­er 2!ou 3!opérateurs respectant les règles du jeu, c’est-à-dire bridant les véhicules, ce que certains ont déjà fait. Ils ont leur place s’ils respectent les règles, pas si c’est l’anarchie. Il faut une limitation de vitesse, y compris sur le coeur de Paris à 8 km/h, ce qu’ils ont accepté et à 20!ou 25 km/h ailleurs. Il faut aussi responsabi­liser les usagers pour qu’ils ne les laissent pas n’importe où, sinon on les me"ra en fourrière. On a créé des espaces pour qu’elles puissent se garer à proximité des vélos. À terme, on va vers moins de stationnem­ents de surface pour les voitures, et donc vers un espace public mieux organisé pour perme"re aux vélos et aux tro"ine"es de se garer en surface.

Est-ce que la LOM vous satisfait ou est-ce qu’il lui manque quelque chose pour aller au bout de vos projets en termes de mobilité à Paris"?

Nous avons pesé pour que les villes et les métropoles obtiennent ce pouvoir de régulation dans les mobilités actives et les mobilités de surface. J’ai eu des garanties de la ministre de l’Environnem­ent sur ce sujet-là. Comme je l’ai dit, il faudrait réformer la gouvernanc­e d’IDF Mobilités pour donner à la métropole du Grand Paris des compétence­s qu’elle n’a pas aujourd’hui. Il y a déjà un pas non négligeabl­e vers une plus grande décentrali­sation des pouvoirs vers les maires, pour une régulation de ces mobilités nouvelles. La bonne échelle du territoire, je pense que c’est la métropole. Mais au sein de la métropole, c’est bien que Paris, qui est aussi une plateforme d’innovation­s notamment sur les questions de mobilité, puisse agir rapidement, en lien avec la métropole.

Vous verriez-vous un jour présidente de la métropole"?

Ce n’est pas mon aspiration, mais c’est vrai que depuis 2014 la donne politique a compliqué la gestion politique, avec une ville centre qui restait à gauche et des villes autour qui ont basculé à droite. On a eu la chance de pouvoir discuter avec des gens ouverts. Le choix de Patrick Ollier, pour lequel j’ai voté, comme président de la métropole, le fait que je sois première vice-présidente, cela nous a permis de travailler intelligem­ment. La gouvernanc­e de la métropole pour moi doit être partagée#: il y aura toujours des maires de sensibilit­és différente­s, l’important est de travailler ensemble sur des enjeux métropolit­ains et d’arriver à des résultats. Tout n’est pas réussi, on aimerait aller plus vite, mais il y avait un retard de métropolis­ation de cinquante ans en région parisienne par rapport à la province. Le travail fait a démontré que la gestion partagée est possible. On a quand même réussi à faire une zone à faible émission (ZFE) à dimension métropolit­aine#; la métropole s’est engagée sur le développem­ent durable, y compris la transition énergétiqu­e, de manière volontaris­te. C’est à me"re au crédit d’une intelligen­ce collective.

N’êtes-vous pas impatiente de rentrer dans la bataille des élections municipale­s"?

Un mandat, c’est six ans, pas cinq plus un de campagne. Les Parisiens ne comprendra­ient pas cela. Il faut aller autermedec­emandat,arriverave­cson bilan, ses projets, participer au débat démocratiq­ue qui sera extrêmemen­t intéressan­t sur le plan national vu les enjeux. Paris a"ire toujours des ambitions et des projets. C’est une bonne chose. Je ne vais pas m’en plaindre, car j’ai une passion pour ce"e ville et pour ses habitants. Donc pour l’instant on est dans ce"e phase de bilan. On est aussi dans une période de grande instabilit­é. Il y a encore eu un a"entat à la préfecture de Police il y a un mois. Imaginez si les Parisiens voyaient leurs élus occupés à faire campagne.

Vos compétiteu­rs se sont lancés, eux.

C’est normal, mais moi je suis la maire de Paris. On va vivre certaineme­nt un mois de décembre compliqué avec des grèves dans les transports. Paris va être une fois de plus le théâtre d’une expression sociale qui ne concerne pas la gestion municipale, mais qui va quand même avoir un impact sur le stress des Parisiens et de celles et ceux qui viennent y travailler. Beaucoup de services publics seront en grève contre une réforme nationale des régimes de retraite. Cela ne va pas être simple à gérer, entre le ramassage des ordures ménagères, la mobilité, les personnes qui seront en galère et obligées de rester dormir à Paris. On se proje"e dans une gestion d’urgence inédite. Je dois être totalement à la tâche, dans ce contexte-là. Le temps de la campagne viendra ensuite.

Est-ce que la mobilité sera plus que les fois précédente­s une priorité dans la campagne"?

C’est un sujet majeur, parce que nous avons apporté des preuves sur ce sujet, des preuves de notre engagement à transforme­r Paris, conscients du fait qu’on a dix ans pour transforme­r nos territoire­s par rapport au risque climatique. Ce sera un sujet sur lequel on aura un bilan qu’on me"ra en avant et il s’appuie sur la vision stratégiqu­e à long terme que je porte, donc je pense que ce sera un sujet crucial. Il y en aura d’autres, comme le logement, mais le plus important sera l’urgence climatique#: on a dix ans pour transforme­r nos territoire­s, pas qu’à Paris, dans le monde entier, pour sortir des énergies fossiles, pour aller vers des énergies renouvelab­les, vers des modes de vie moins impactant pour la planète. Ce sera une campagne très axée là-dessus, en embarquant tout le monde. La question de l’inclusion sociale sera une question majeure de ce"e campagne. La vision pour l’avenir de Paris sera très intéressan­te. Il faudra demander à tous les candidats d’exprimer leur vision. Moi, j’ai la mienne et mes conviction­s sont connues.!

[ «!Dix ans pour réussir la transition écologique!» ] «!Donner aux villes et aux métropoles la compétence pour réguler les mobilités de surface me paraît la bonne gouvernanc­e pour agir rapidement!» «!Devenir présidente de la métropole n’est pas mon aspiration, mais c’est vrai que depuis 2014 la donne politique a compliqué la gestion politique!»

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#RÉA$ Pour la maire de Paris, il faudrait aller plus loin dans le plan vélo sur des axes encore très utilisés par les automobile­s.
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"BASTIEN LOUVET/SIPA# Le périphériq­ue parisien lors de la nuit blanche 2019. Parmi les scénarios envisagés, l’idée de réserver une voie aux mobilités partagées, vélos et taxis, plaît beaucoup à Anne Hidalgo.
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"AFP# On peut désormais traverser Paris à vélo du nord au sud et de l’est à l’ouest sur des pistes bi-directionn­elles sécurisées.
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