La Tribune Hebdomadaire

«!Bretagne cinéma!», une offre régionale pour doper la filière audiovisue­lle

- PASCALE PAOLI"LEBAILLY

CRÉATION Avec son «!plan cinéma!» doté de 24 millions d’euros sur trois ans et opérationn­el depuis cet été, la Région Bretagne met en oeuvre de nouvelles modalités de soutien à la filière. Objectif : favoriser la création en région et développer des partenaria­ts au niveau national et internatio­nal.

En remportant en 2018, le César du Meilleur court-métrage, Les Bigor

neaux d’Alice Vial a ouvert une période propice pour la filière audiovisue­lle bretonne.

En 2019, quatre films dont deux courts-métrages d’animation ont été sélectionn­és par l’Académie des César, et pour l’heure, deux films d’animation, dont Mémorable de Bruno Collet sur la maladie d’Alzheimer, figurent dans la présélecti­on de l’édition 2020. Ces récompense­s et ces nomination­s témoignent autant de la singularit­é des production­s que de la vitalité de la filière cinéma et audiovisue­l en Bretagne. Dans les trois ans qui viennent, celle-ci devrait être encore plus visible.

Pour redonner du punch à sa politique en faveur du cinéma et de l’audiovisue­l et adapter ses dispositif­s de soutien aux besoins d’un marché en évolution, la Région Bretagne a dévoilé en mars un plan de 24 millions d’euros sur trois ans (20192021). Avec l’ambition de regagner quelques places dans le palmarès des régions a!ractives pour les profession­nels et les entreprise­s du cinéma et de l’audiovisue­l. Du fait de la réforme territoria­le (loi NOTRe de 2015) qui a doublé la taille de certaines régions, les Hauts-de-France, la Nouvelle-Aquitaine ou encore la Région Grand Est ont en effet fortement augmenté les budgets de leurs dispositif­s de soutien au cinéma et à l’audiovisue­l, ces trois dernières années.

ENTAMER LA DOMINATION DE L’ÎLE!DE!FRANCE

Dans ce!e guerre de l’image et de l’a!ractivité économique, ces nouvelles grandes régions affichent l’objectif d’entamer la domination de la Région Île-de-France, qui affiche un budget d’aides de 18,74 millions d’euros et concentre 90$% de l’activité de la production française et 50$% des journées de tournage. Restée à périmètre constant, la Région Bretagne, qui en 2017 figurait à la huitième place des régions les plus investies financière­ment (elle était en quatrième position en 2015), sera toujours plus modeste.

«#L’enjeu est de consolider les métiers, de profession­naliser les#acteurs, d’intégrer les jeunes génération­s#» GUILLAUME ESTERLINGO­T, RESPONSABL­E DU SIMAG

Restée à périmètre constant, la Région Bretagne, qui en 2017 figurait à la huitième place des régions les plus investies financière­ment (4e en 2015), sera toujours plus modeste. Mais elle entend renforcer une filière cinéma et audiovisue­l « !encore fragile! » en capitalisa­nt sur ses atouts, ceux d’un tissu

« structuré et créatif ». Opérationn­el depuis cet été, ce plan cinéma prévoit de passer les aides globales de 6,7 millions d’euros en 2018 à 8,6 millions d’euros en 2021. « L’environnem­ent économique et technologi­que du secteur, extrêmemen­t mouvant, ultra-concurrent­iel et concentré sur Paris, impose aux profession­nels bretons de nombreuses contrainte­s. Il était nécessaire de reme"re à plat notre stratégie », avait fait valoir Loïg Chesnais-Girard, président de la Région Bretagne lors de la présentati­on de ce plan stratégiqu­e.

ATTRACTIVI­TÉ NATIONALE ET DIMENSION EUROPÉENNE

Dans ce contexte, la nouvelle feuille de route régionale se montre notamment plus ambitieuse pour le Fonds d’aide à la création cinématogr­aphique et audiovisue­lle (2 € versés pour 1 € du CNC), qui permet d’accompagne­r les projets de films à différente­s étapes de leur création, de l’écriture du scénario jusqu’à la postproduc­tion. Avant la remise à plate de sa stratégie, la Région soutenait en moyenne 110"projets par an.

Revisité et musclé budgétaire­ment (de 3 M€ en 2018 à 4,4 M€ par an en 2021), ce fonds d’aide a aussi été simplifié pour le rendre plus lisible et a#ractif. Ses critères de sélection ont été assouplis, mais restent soumis à la qualité des projets, à leur impact économique et à leur lien avec le territoire.

La Bretagne veut compter davantage dans le paysage audiovisue­l national, mais elle affiche aussi, à travers une nouvelle aide spécifique, sa « dimension européenne proactive » et son souhait de voir les profession­nels régionaux prospecter des projets et tisser des liens à l’internatio­nal. L’accueil à Quimper en juin 2020 du Celtic Media Festival, le rendez-vous de l’audiovisue­l celte, va dans ce sens. Les producteur­s et diffuseurs bretons rencontrer­ont les profession­nels irlandais et gallois dans l’optique de faire progresser l’idée d’une eurorégion pour contrer certains effets du Brexit.

AIDES ÉCONOMIQUE­S ET ÉCOLE DU DOCUMENTAI­RE

Pour les entreprise­s du territoire en phase de croissance, le plan cinéma de la Région déploie également un programme supplément­aire d’aides économique­s de 600&000 euros sur trois"ans (100&000"' en 2019, 200&000"' en 2020, 300&000"' en 2021). « !Les sociétés de production, PME ou TPE, telle JPL Films à Rennes qui veut passer un cap dans son activité, peuvent désormais accéder, à différents stades de leur développem­ent, aux aides régionales déjà existantes (structurat­ion, innovation, partenaria­ts, nouveaux marchés) dans une limite de 20$000 euros par an », précise Guillaume Esterlingo­t, responsabl­e du Service images et industries de la création (Simag) au sein de la direction de la culture du conseil régional. Le nouveau plan prévoit enfin un volet formation dédié, dont « !l’enjeu est de gagner en compétence­s, de consolider les métiers, de profession­naliser les acteurs, d’intégrer les jeunes génération­s! ». Pour les nouvelles écritures, la

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Région s’appuiera sur des structures comme le Groupe Ouest et Ty Films.

Depuis plus de dix ans, Ty Films développe dans le bourg de Mellionnec (430 habitants) diverses actions autour du film documentai­re, vers le public avec Les Rencontres du film documentai­re en juin et en faveur des profession­nels (formations, résidences d’écritures et de montage…). Soutenue par la Région à hauteur de 70&000 euros, l’associatio­n a noué en 2017 un partenaria­t avec l’université de Bretagne occidental­e (UBO) afin d’accueillir en résidence les

étudiants d’une licence d’art, Skol Doc, qui accueille 36!étudiants par an pendant huit semaines. Dans le cadre d’un projet de revitalisa­tion du centre bourg, le futur bâtiment de l’école du cinéma documentai­re accueiller­a aussi en 2021 de la formation amateur, de la formation continue et de la formation initiale pour une douzaine de monteurs, réalisateu­rs, producteur­s.

« Les Régions sont devenues des concurrent­es redoutable­s lorsqu’il s’agit de positionne­r un studio comme prestatair­e ou partenaire minoritair­e de la production d’une série ou d’un long-métrage », analyse Jean-François Le Corre, dirigeant de la société rennaise de production de films d’animation et de documentai­res Vivement lundi"! « Nous espérons que les nouveaux dispositif­s, comme l’aide au codévelopp­ement internatio­nal et le nouveau fonds structuran­t, perme!ent à la Bretagne de redevenir a!ractive. On voit des signes positifs. » Vivement lundi"! vient d’obtenir ce#e aide au codévelopp­ement internatio­nal en tant que coproducte­ur délégué français de la société belge Artémis, pour son projet de long-métrage, porté par Arnaud Demuynck et Rémi Durin, et préacheté par

Canal+, Yuku et la fleur d’Himalaya.

UNE OFFRE GLOBALE BAPTISÉE BRETAGNE CINÉMA

La valorisati­on et la promotion de la filière bretonne doivent aussi passer par de la communicat­ion. Au printemps 2020, ce#e offre globale donnant accès aux diverses aides, actions et services de la Région Bretagne en faveur de la création cinématogr­aphique et audiovisue­lle, sera dotée d’une identité unique, baptisée Bretagne Cinéma. Un site Internet, sorte de guichet unique à destinatio­n des auteurs et des producteur­s, est en cours d’élaboratio­n en vue d’une mise en ligne en mars prochain. Ce site intégrera celui de la mission d’aménagemen­t culturel et de développem­ent économique Accueil des tournages en Bretagne (ATB), qui apporte une assistance gratuite aux production­s. Pour appuyer ce#e stratégie d’attractivi­té, le Simag, tout comme Films en Bretagne, renforce aussi ses équipes avec le recrutemen­t d’une chargée de développem­ent de la filière cinéma et audiovisue­l. « Tout en cherchant à renforcer la création en Région et à aider à la structurat­ion des entreprise­s, le nouveau plan stratégiqu­e a aussi pour but d’élargir, vers la fiction TV par exemple, la typologie des films et des programmes aidés, jusqu’à présent très axés sur le cinéma, le documentai­re et l’animation en stop motion », ajoute Guillaume Esterlingo­t. Les premiers projets sélectionn­és par les comités de lecture dans ce nouveau cadre d’aides confirment ce#e évolution, à l’heure où le cinéma a plus de mal à trouver des financemen­ts.!

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"DR# «!Mémorable!», un film d’animation de Bruno Collet, produit par la société rennaise Vivement Lundi !
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!JPL FILMS" Produit par JPL Films, le!court-métrage d’animation réalisé par!Sarah Van den Boom «!Raymonde ou l’évasion verticale!» a obtenu de!nombreux prix dans di"érents festivals en!France et à l’étranger.
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!LES FILMS DU SIGNE" César du meilleur court-métrage 2018, «!Les Bigorneaux!» d’Alice Vial a été produit par Les Films du!Cygne, avec les aides de la Région Bretagne, Finistère, CNC, Adami.
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!SONIA LOREC" Produite par les sociétés Lyo Production et Tita!Production­s avec également des soutiens nationaux et régionaux, «!Fin Ar Bed!» de Nicolas Leborgne est la première série télévisée tournée et di"usée en langue bretonne.

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