La Tribune Hebdomadaire

Câbles sous-marins!: ASN, ce"e pépite que Nokia ne veut plus lâcher

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INFRASTRUC­TURES

Le géant finlandais des télécoms ne veut plus se défaire d’Alcatel Submarine Networks, entré en sa possession lors du rachat d’Alcatel en 2015. Cette situation préoccupe le gouverneme­nt, qui tient à conserver cette activité dans le giron français.

est un serpent de mer. Au sens propre et au sens figuré. Aujourd’hui, Nokia ne veut plus se séparer d’Alcatel Submarine Networks (ASN), le champion français des câbles sous-marins, qu’il a récupéré en 2015 lors de son rachat d’Alcatel. À l’époque, le géant finlandais des télécoms n’avait que peu de considérat­ion pour ce!e activité. Il voulait la vendre, l’estimant trop éloignée de son coeur de métier. Mais la donne a changé. L’appétit des Gafa pour les câbles sous-marins, conjugué à l’expertise d’ASN dans les équipement­s de pointe (les équipement­s optiques), a convaincu Nokia de garder l’industriel sous sa coupe. L’ennui, c’est que le champion français des câbles sous-marins est éminemment stratégiqu­e aux yeux de l’État, qui dispose d’un droit de regard sur une vente d’ASN depuis le rachat d’Alcatel. À Bercy, les troupes sont mobilisées. Hors de question de laisser filer ce!e activité hors du giron français. Les câbles sous-marins sont considérés comme essentiels pour la souveraine­té du pays. Il faut dire que ces infrastruc­tures, souvent méconnues du grand public, sont cruciales pour le bon fonctionne­ment d’Internet et de l’économie. 99"% des communicat­ions interconti­nentales transitent par ces artères qui reposent au fond des mers. Ce qui explique qu’elles soient dans le collimateu­r des militaires et des espions.

DIVERSIFIE­R L’ACTIONNARI­AT

Ces dernières années, l’exécutif a élaboré de nombreux montages destinés à racheter ASN. Toutes les tentatives ont échoué. Le gouverneme­nt mène à présent des discussion­s visant à diversifie­r l’actionnari­at du groupe. Celles-ci pourraient déboucher sur un tour de table entre Nokia, Bpifrance et Orange. Mais rien ne dit que ces négociatio­ns aboutiront. Interrogé à ce sujet début décembre, Stéphane Richard, le PDG d’Orange, a déclaré « que le cadre a été posé avec BPI pour être l’actionnair­e français d’ASN ». Toutefois, poursuit le dirigeant, il reste une « grande inconnue » : « Je ne sais toujours pas ce que Nokia veut faire d’ASN… »

Pour la France, disposer d’une autonomie dans les câbles sous-marins est crucial. Avec ASN, elle veut garder une capacité industriel­le à fabriquer, à déployer et à réparer des câbles. Il s’agit d’un atout important si le pays a tout simplement besoin de davantage de capacité. Ou si jamais, lors d’un conflit, une puissance étrangère décidait de couper l’une de ces artères pour grandement­perturberl­escommunic­ations. « ASN nous permet de ne pas être dépendants d’une puissance étrangère pour écouler nos données », résume Jean-Luc Vuillemin, président d’Orange Marine, mais aussi chargé de la division Réseaux et services entreprise­s et les internaute­s français, souligne Jean-Luc Vuillemin. En gardant la maîtrise des points d’a!errissemen­t de nos câbles sous-marins, nous nous prémunisso­ns contre tout risque ou tentative d’ingérence. » Le dirigeant fait notamment référence aux révélation­s d’Edward Snowden. En 2013, l’ex-consultant de la NSA a indiqué que la collecte massive de données par le gouverneme­nt américain, via les programmes Upstream et Tempora, a été effectuée à partir des câbles sous-marins, notamment transatlan­tiques. La France, d’ailleurs, a aussi développé des outils pour capter une partie des communicat­ions internatio­nales pour sauvegarde­r ses intérêts. En 2015, L’Obs a révélé l’existence d’un décret secret qui aurait autorisé, depuis 2008, la DGSE à écouter les communicat­ions des câbles sous-marins.

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"DR# Le champion français du secteur détient un rôle stratégiqu­e : 99#% des communicat­ions interconti­nentales transitent par ces artères reposant au fond des mers.

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