Comment les néobanques imposent leur modèle en France
ARGENT Les banques mobiles ne séduisent pas que les millennials, et leur succès pousse les établissements bancaires traditionnels à réagir. Leur prochain challenge : devenir des « banques principales ».
Nickel, N26, Revolut, Lydia, Max, Orange Bank, Manager.one, Xaalys, Ma French Bank, Shine, Qonto, Monese, Pixpay... Le constat est sans appel, le marché des néobanques est de plus en plus encombré. Aujourd’hui, 26!banques mobiles sont présentes dans l’Hexagone. Parmi elles, sept ont vu le jour au cours des douze derniers mois, selon la nouvelle étude du cabinet KPMG, publiée le 28 janvier. Six autres devraient se lancer dans les mois à venir, dont Prismea de Crédit du Nord, Linxo, connue pour son agrégateur de comptes, ou encore Onlyone, quiseprésentecommeunenéobanque à « impact ». Au total, le!cabinet recense 3,5 millions de comptes actifs, contre 2,6 millions en juillet dernier, soit une augmentation de près de 35"% en l’espace de six mois. En un an, cela représente une hausse de 75"%.
UNE GRANDE MAJORITÉ DE PLUS DE 30 ANS
Premier enseignement de l’étude, les millennials ne sont pas les seuls adeptes des néobanques. Selon l’enquête, menée en partenariat avec l’institut Ipsos, plus de 70"% des clients de ces nouvelles banques mobiles ont plus de 30!ans. Dans le détail, 28"% des clients des néobanques ont entre 18 et 30!ans. Mais ils sont 42"% à avoir entre 31 et 45!ans, et 31"% plus de 45!ans. « Cette différence par rapport à d’autres marchés européens s’explique par le périmètre des néobanques étudiées, qui prend en compte des acteurs s’appuyant sur des réseaux physiques, comme Orange Bank et Nickel. Ces derniers drainent une clientèle plus représentative de la population française », explique Muriel Grandidier, spécialiste banque, finance et assurance chez Ipsos France. La majorité d’entre eux sont a#irés par les prix a#ractifs sur la tenue de compte, mais aussi sur les frais d’utilisation de la carte bancaire à l’étranger. Un a#rait renforcé par des primes de bienvenue et de parrainage généreuses. « Les résultats de cette étude confirment la reconnaissance du modèle des néobanques en France. Les chiffres attestent d’abord de l’intérêt croissant du consommateur, dont le profil est étonnamment varié. Il y a également un nouvel attrait des investisseurs comme le montrent les récentes levées de fonds de Qonto [néobanque pour PME, ndlr] et de Lydia [application de paiement entre amis]. On observe aussi une reconnaissance de la part des banques, qui sont nombreuses à avoir lancé de nouvelles offres ou à avoir adapté leur offre existante en réponse aux
« Le principal enjeu des néobanques consistera à pérenniser leur modèle et à fidéliser les clients actifs » STÉPHANE DEHAIES,
ASSOCIÉ BANQUE ET FINTECH CHEZ KPMG
néobanques », analyse Stéphane Dehaies, associé banque et fintech chez KPMG France. Société Générale a ainsi donné le coup d’envoi, le 28 janvier, de Kapsul, une nouvelle formule low cost à 2!euros par mois. De son côté, Hello Bank"!, la banque mobile du groupe BNP Paribas, vient de repenser son positionnement avec une offre gratuite Hello One et une seconde Hello Prime, commercialisée 5 euros par mois. Boursorama (groupe Société Générale) a, quant à elle, renforcé son offre gratuite avec la carte Ultim pour accompagner les clients à l’étranger, un axe de différenciation sur lequel ont beaucoup joué les néobanques. Même chose du côté de Fortuneo, filiale de Crédit Mutuel Arkéa, avec sa carte Fosfo. Si les néobanques poursuivent leur expansion et poussent les acteurs traditionnels à réagir, le marché reste toutefois très concentré. « Les cinq leaders du marché français concentrent à eux seuls ce"e croissance, avec plus de 78#% des comptes ouverts et actifs à la fin de 2019 », souligne Stéphane Dehaies.
UN TRIO DE TÊTE AVEC NICKEL, N26 ET REVOLUT
Le trio de tête reste inchangé. Nickel, détenu par BNP Paribas, s’affirme comme la première néobanque en France, avec 1,5 million d’ouvertures de comptes enregistrées fin 2019. De son côté, l’allemand N26 vient de passer le cap des 5 millions d’utilisateurs dans le monde, dont plus d’un million en France. Suit le britannique Revolut, qui revendique plus de 900"000 utilisateurs dans l’Hexagone et 10 millions dans le monde. Orange Bank, qui totaliseplusde360"000 comptes courants, se place au pied du podium.
Sur le marché grand public, les autres acteurs peinent à être visibles et certains présentent de vraies difficultés. C’est le cas notamment de C-zam, le compte mobile commercialisé dans les rayons des magasins Carrefour, dont l’avenir est aujourd’hui en suspens. « Il y a un vrai sujet de fragmentation, de positionnement de ces offres innovantes avec une consolidation à terme du marché des particuliers », observe Stéphane Dehaies. L’éclairage apporté par l’institut Ipsos montre que les acteurs les plus fragiles ne bénéficient pas d’une attitude de « découverte » de la part des clients des néobanques, dont très peu « butinent » différentes offres. Ainsi la grande majorité des clients (74"%) ont ouvert un compte dans une seule néobanque. Ils ne sont que 16"% à avoir ouvert un compte dans deux néobanques et 10"% dans trois néobanques ou plus. A contrario, le marché des professionnels et des entreprises apparaît plus porteur. « Le marché des professionnels est en forte croissance, avec une augmentation de 5#% par an en moyenne du nombre d’entreprises de moins de dix salariés avec un chiffre d’affaires allant jusqu’à 2$millions d’euros. Les offres proposées par les néobanques répondent de façon plus intégrée aux besoins de ce segment, peu ou mal adressé historiquement », note Stéphane Dehaies. En outre, ces clients gèrent des flux beaucoup plus importants, sont prêts à payer pour gagner en productivité et