La Tribune Hebdomadaire

Le mantra de Christian Estrosi : démolir pour verdir la ville… et rester compétitif

- LAURENCE BOTTERO

«!Le PEX n’est pas un projet, c’est un aboutissem­ent!»

L’annonce de la démolition du palais des congrès Acropolis et du déplacemen­t du Théâtre national de Nice place, de fait, la campagne du maire sortant sur le sujet de l’urbanisme et de l’environnem­ent. Mais c’est surtout une question sous-jacente de maintien de l’attractivi­té de la cinquième ville de France.

C’est ce qui s’appelle créer la surprise. Du genre à réveiller une campagne municipale qui s’annonçait assez calme, le retrait d’Éric Ciotti, le frère ennemi, ayant annulé le potentiel duel fratricide. En faisant état de sa volonté –#s’il est réélu#– de prolonger la Coulée verte, un parc de 12#hectares posé en plein centrevill­e, Christian Estrosi entend continuer sur sa lancée, entamée il y a presque dix ans, lorsqu’il annonçait la démolition de la gare routière et du parking a!enant, verrues urbaines qui coupaient la ville en deux, pour y planter gazon, arbres et fleurs. L’annonce – on est en 2011 – produit son effet de surprise. Et d’incrédulit­é. Près d’une décennie plus tard, le résultat et cette coulée de verdure ont, semble-t-il convaincu, même les plus récalcitra­nts. Démolir Acropolis et, dans le même mouvement, déplacer le Théâtre national de Nice, au coeur même de la Vieille Ville répond donc à ce!e même logique de verdisseme­nt. Sauf que la raison principale est ailleurs. Acropolis, construit au début des années 1980, en a la silhouette typique, faite de verrières et de grandes salles, mais plus vraiment au goût du jour. Et c’est là le noeud du problème. Car Acropolis ne répond plus aux besoins de la cinquième ville de France en termes de tourisme d’affaires. Quand Cannes et Monaco disposent de palais des congrès taillés pour la compétitio­n européenne, Nice ronge son frein.

ATTIRER LES GRANDS SALONS

En 2017, la reprise en régie municipale, après son passage dans le giron de GL Events, permet à la ville de reprendre la main. Mais les opportunit­és de salons d’envergure s’échappent ailleurs. Entre-temps, il y a le projet d’un palais des congrès et parc des exposition­s unis dans une seule structure – répondant au nom de PEX – prévu pour s’installer à l’ouest de la ville, dans le périmètre de l’Éco-Vallée, en lieu et place du Marché d’intérêt national, parti ailleurs. Un PEX pensé pour justement rendre à Nice sa capacité à a!irer les manifestat­ions de grande taille. « Un projet qui date de 2008 », tient à rappeler Christian Estrosi, histoire de montrer que cela fait partie d’une stratégie cohérente d’autant qu’il est l’une des quatre opérations déclarées prioritair­es de l’Établissem­ent public d’aménagemen­t Nice Éco-Vallée, ratifiées dans les protocoles d’accord financiers en 2012 et 2019. Une suite logique et pas une lubie soudaine. Avec ses 70"000 mètres carrés incluant 4"000 places d’auditorium sur 25"000 mètres carrés côté congrès – soit autant que chez les concurrent­s que sont Vienne et Madrid – et

60 "000 mètres carrés de surface d’exposition dont 15"000 mètres carrés mutualisés avec les congrès, le futur équipement est d’ores et déjà investi d’une mission : redonner du tonus au tourisme d’affaires. En comparaiso­n, avec ses 13"000 mètres carrés et ses 2"500 places, Acropolis semble tout petit… « Le PEX n’est pas un projet, c’est un aboutissem­ent », insiste Christian Estrosi pour dire que, démolition d’Acropolis ou pas, Nice aura bien un nouvel outil pour se positionne­r face à Barcelone, Londres, Milan ou Francfort.

RECONFIGUR­ER LE PALAIS DES EXPOSITION­S

Le PEX, qui devrait être géré par une société d’économie mixte, a déjà un premier investisse­ur, la CDC, qui a apporté notamment sa contributi­on au financemen­t du tramway. Les organisate­urs de congrès ont manifesté leur intérêt pour des événements consacrés à la santé, la mobilité, le design, le numérique ou l’aérospatia­l, assure le maire. Le coût"? 250 millions d’euros. Les retombées économique­s estimées"? 800 millions d’euros par an. Mais le PEX a une autre incidence. Le Palais des exposition­s, situé dans le prolongeme­nt d’Acropolis, va lui aussi être revu, repensé en équipement culturel et sportif avec salle modulable de 2"000 places et nouvel écrin pour les ateliers du Carnaval de Nice. Son esplanade va devenir… un espace vert paysager. Tout cela est prévu pour une livraison en 2024. Autant dire demain. Si Christian Estrosi est élu, il ne lui restera plus alors qu’à appuyer sur le bouton, comme il dit. Ce nouveau projet d’aménagemen­t est-il un projet de maire ou de candidat"? Le risque de l’annoncer avant le scrutin, était de créer une sorte de rejet face à la perspectiv­e de nouveaux travaux dans la ville. C’est d’ailleurs ce que lui reprochent ses adversaire­s, Patrick Allemand et Philippe Vardon en tête, insistant sur des coûts supplément­aires, contribuan­t à creuser la de!e. À la Coulée verte, la liste Nice Écologique de Jean-Marc Governator­i oppose l’aménagemen­t d’une «#Coulée bleue#». Mais pour Christian Estrosi, annoncer la démolition d’Acropolis, même si cela irrite ou déplaît, c’est aussi une façon d’imprimer sa marque et de rendre tout autre programme moins impactant. Et donc de couper l’herbe – verte – sous le pied de ses opposants.#

CHRISTIAN ESTROSI, MAIRE DE NICE

 ?? "SIPA# ?? Christian Estrosi, maire sortant et candidat à sa propre succession, lors de son premier meeting de campagne à Nice, le 19 janvier.
"SIPA# Christian Estrosi, maire sortant et candidat à sa propre succession, lors de son premier meeting de campagne à Nice, le 19 janvier.

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