Les tribulations d’Orange pour choyer les gamers de La Réunion
RÉSEAUX Les fans de jeux en ligne peuvent désormais jouer quasiment sans délais d’attente : l’opérateur a relié l’île à des serveurs sud-africains au moyen de câbles sous-marins et grâce à la fibre.
Jean-Luc Vuillemin n’en revient pas. Depuis une semaine, le directeur des réseaux et des services internationaux d’Orange reçoit des salves de messages de remerciements et de félicitations de gamers de La Réunion sur Twi!er. «!Merci infiniment"!!», claironne l’un d’eux, qui juge qu’il restera «!clairement dans les livres d’histoire!»"! Pourquoi ces mots enflammés"? Parce que depuis le 3 mars, les fans de jeux vidéo de l’île sont directement connectés, grâce aux travaux d’Orange, à des serveurs situés en Afrique du Sud. Et pour ces passionnés de jeux en ligne, cela change tout. Jusqu’alors, le trafic généré par ces fans de j eux en l i g ne remontait par des câbles sous-marins jusqu’à Paris, en longeant Madagascar et toute la côte ouest de l’Afrique. Pendant longtemps, il n’existait pas de serveurs dédiés plus proches. Résultat : lorsqu’ils ferraillaient en ligne, les joueurs pâtissaient d’une latence d’un peu moins d’une demi-seconde. Autant dire une éternité, et un désavantage certain pour certaines parties où la réactivité est cruciale pour dézinguer ses adversaires.
Dans la communauté réunionnaise des gamers, le sujet est sensible. Certains s’y intéressent de près. Ils ne comprennent pas pourquoi leur trafic doit parcourir un si long chemin, alors que des serveurs de jeux vidéo sont désormais disponibles en Afrique du Sud. La destination est beaucoup plus proche, et permettrait de leur offrir une latence bien meilleure, entre 40 à 50#millisecondes. Estimant qu’il s’agit d’une bonne idée, Jean-Luc Vuillemin promet de faire son possible. «! Nous savions que des serveurs commençaient à être installés en Afrique du Sud, explique-t-il. Le pays se développe, et est devenu, grâce à l’action des Gafa, un lieu d’hébergement important.!»
UNE ENTREPRISE DÉLICATE POUR ACHEMINER LE TRAFIC
Mais l’opération, complexe, s’avère plus longue que prévu à mettre en#oeuvre. Pour se relier aux serveurs de jeux vidéo qui sont situés à Johannesburg, Orange recourt d’abord à des câbles sous-marins. Ils#lui perme!ent d’acheminer le trafic de La Réunion jusqu’à la ville de# Mtunzini, qui se trouve sur la côte#est de l’Afrique du Sud. De là, un# câble de fibre optique est tiré# jusqu’à Johannesburg, où Orange#dispose d’un point de présence. Il restait, enfin, à connecter ce#dernier aux fameux serveurs.
C’est là que les choses se sont compliquées. «!À Noël et au mois de janvier, il a fallu discuter avec les hébergeurs sud-africains de jeux vidéo pour se connecter à leurs data centers, détaille Jean-Luc Vuillemin. Le problème, c’est que cette période correspond là-bas aux grandes vacances.!» Orange peine à joindre d’emblée les bons interlocuteurs chez les hébergeurs, mais arrive tout de même à ses fins. Le 28 février, Jean-Luc Vuillemin annonce sur Twi!er, non sans fierté, que le service est disponible. «!Malheureusement, il restait une règle de routage qui bloquait le trafic, raconte le dirigeant. Il nous a fallu deux jours supplémentaires pour régler le problème.!» Dans l’intervalle, les gamers réunionnais, eux, trépignent. «!C’est vrai qu’ils sont incroyablement passionnés et actifs, constate Jean-Luc Vuillemin. Mon message indiquant que le service fonctionnait a été vu 58"000 fois"! Ils sont aussi incroyablement impatients : j’ai reçu jusqu’à 200!messages par jour me demandant où nous en étions"! Certains ne réalisent pas à quel point Internet est un monde compliqué. Nous avons interconnecté cinq réseaux différents, ce n’est quand même pas rien.!»
Aux yeux de Jean-Luc Vuillemin, l’expérience s’est avérée instructive. «!Cela montre qu’aujourd’hui, pour un opérateur télécoms, l’important est moins de créer des liens, des solutions de transit, que de permettre d’accéder de façon optimale aux contenus, dit-il. Je suis très content de ce$e opération.!» Les gamers réunionnais, eux, sont aux anges.