La Tribune Hebdomadaire

L’autre urgence, aider l’économie à surmonter le choc

Pour atténuer l’impact de la crise du coronaviru­s, États et banques centrales se mettent au chevet des entreprise­s à coups de milliards, mais la planète peine à se coordonner face au danger.

- PHILIPPE MABILLE DIRECTEUR DE LA RÉDACTION

Sanitaire, économique et social, le choc du coronaviru­s est encore devant nous

et va imposer pour une période de temps impossible à prédire des mesures inédites à l’échelle du monde, qui ne sont pas sans rappeler celles prises lors de la chute de Lehman Brothers en 2008. À ce!e différence près que l’origine de ce!e crise n’est pas, ce!e fois, la finance sans visage, mais un virus inconnu qui asphyxie directemen­t l’économie réelle. Du coup, le remède et la posologie des réponses publiques ne sont évidemment pas les mêmes.

Face à la crise financière, les États et les banques centrales ont inondé les établissem­ents bancaires de liquidités pour éviter un effondreme­nt par effet domino qui se serait transmis ensuite à la sphère réelle. Et globalemen­t, cela a marché, au prix de la création de nouvelles bulles financière­s. Dans le cas actuel,mêmesil’expérience­nousmanque­poursavoir où et comment agir, c’est l’activité et le chiffre d’affaires de milliers d’entreprise­s de toutes tailles qui se sont brutalemen­t évaporés. Et nul ne sait si et quand ils reviendron­t. Prenons le cas du tourisme : même si la situation se rétablit rapidement, les gens ne vont pas voyager deux fois plus pour compenser. Il faut donc un plan massif pour aider les entreprise­s les plus touchées à résister au choc et à tenir le plus longtemps possible, tout en agissant fortement pour freiner puis inverser la courbe de l’épidémie afin que les capacités hospitaliè­res ne soient pas submergées, comme on le voit en Italie où l’on choisit quels malades sauver. L’enjeu, dans ce!e guerre sanitaire, c’est de gagner du temps. Chacun est et doit se sentir responsabl­e de soi-même bien sûr, mais aussi des autres en appliquant les consignes : se laver les mains plusieurs fois par jour et éviter les contacts sociaux notamment pour protéger les population­s les plus exposées.

Si les banques centrales ont eu raison d’agir vite et fort pour baisser les taux d’intérêt

et perme!re aux banques de tenir la digue des besoins de trésorerie de leurs clients, ce ne sera qu’un cautère sur une jambe de bois si la crise dure longtemps. Christine Lagarde, très énervée par le manque de coordinati­on des États européens qui pratiquent le chacun pour soi, a été « cristal clear » dans ses propos : « L’Europe pourrait connaître un scénario qui rappellera­it celui de la grande crise de 2008 » si elle n’agit pas#; « certaines parties de vos économies pourraient s’effondrer », prévient-elle. Transport aérien, tourisme, hôtellerie, restaurati­on, événementi­el, luxe, la contaminat­ion économique a déjà commencé et pourrait menacer plus de 10#% du PIB européen, sans même tenir compte de la désorganis­ation des chaînes de production dans l’industrie et l’énergie. De même que ce sera aux systèmes hospitalie­rs de tenir le choc pour freiner la contagion épidémique, c’est donc aux budgets des États de venir en force de rappel pour limiter l’impact économique et social. Et ce quel qu’en soit le prix pour empêcher la panne économique. Bruno Le Maire à Bercy a commencé à agir sur les reports de paiements de charges fiscales et sociales. Mais c’est aussi l’Europe qui devra apporter bien plus que les 25 milliards d’euros mis sur la table mardi. Aux États-Unis, Trump, qui sent sa réélection menacée faute d’avoir pris la mesure du choc à temps, a mis 700 milliards de dollars… Une chose est sûre, mieux vaut en faire trop en espérant que la crise soit temporaire que pas assez et que l’effondreme­nt du système économique ne devienne irréparabl­e. La barre des 3#% du PIB de déficit risque bien d’être le dernier de nos soucis dans les semaines et peut être les mois à venir. La seule bonne nouvelle dans ce sombre tableau, c’est que la victoire est possible : la Chine semble en passe d’enrayer l’épidémie, au prix de mesures difficiles à imaginer dans nos démocratie­s et que pourtant, l’Italie expériment­e.$

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