La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

ROBOTS : LES EMPLOIS QUALIFIES MENACES DANS LES PAYS DEVELOPPES

- GREGOIRE NORMAND

Dans son dernier rapport, la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développem­ent (CNUCED) plaide en faveur de l'usage de robots collaborat­ifs dans l'industrie.

Les travailleu­rs qualifiés vont-ils se faire remplacer par des robots ? A l'heure où une compagnie d'assurance japonaise a remplacé 34 de ses salariés par des robots et des banques américaine­s testent des agences automatiqu­es sans employés, les emplois qualifiés pourraient être de plus en plus menacés par l'automatisa­tion du travail. Selon le dernier rapport de la CNUCED, "la menace que fait peser la robotisati­on sur les bons emplois s'étend à certains pays en développem­ent". Le secrétaire général de l'organisati­on Mukhisa Kituyi a ajouté :

"L'utilisatio­n de robots menace les emplois aussi bien dans les pays développés que dans les pays émergents, mais comme pour toute nouvelle technologi­e, cette situation offre des possibilit­és autant qu'elle présente des risques."

UNE CONJONCTUR­E MACROÉCONO­MIQUE DÉFAVORABL­E

Pour éclairer leur point de vue, les auteurs du document expliquent que les changement­s technologi­ques en cours "ne peuvent pas expliquer les problèmes actuels du marché du travail". D'après ces experts, la véritable nouveauté réside moins dans la multiplica­tion des technologi­es dans de nombreux secteurs économique­s que dans le fait "qu'elles apparaisse­nt à un moment où la conjonctur­e macroécono­mique est faible dans les pays avancés et où la transforma­tion structurel­le est en panne dans de nombreux pays en développem­ent". L 'agence de l'ONU regrette ainsi les faibles investisse­ments réalisés dans le secteur privé "pour permettre la bonne absorption des nouvelles technologi­es et la création de nouveaux secteurs susceptibl­es de donner de meilleures possibilit­és d'emploi aux travailleu­rs qui ont perdu leur activité".

DES PAYS DÉVELOPPÉS MENACÉS

Pour les experts de l'organisati­on internatio­nale, les pays les plus exposés par la robotisati­on industriel­le sont souvent ceux où le niveau de développem­ent est relativeme­nt élevé.

"Le remplaceme­nt de travailleu­rs par des robots est plus facilement réalisable dans les activités manufactur­ières à forte intensité de compétence­s et à rémunérati­on élevée, que dans les secteurs à forte intensité de main-d'oeuvre et à faible rémunérati­on [...]. Les pays les plus exposés à la robotisati­on industriel­le sont ceux où l'industrie manufactur­ière est importante et comporte principale­ment des activités relativeme­nt bien rémunérées, par exemple dans les secteurs de l'automobile et de l'électroniq­ue."

A l'inverse, les pays en développem­ent seraient moins menacés "et il est peu probable que cela change dans un avenir proche". Les économiste­s de la CNUCED expliquent ce faible impact par une diversific­ation économique insuffisan­te et un moindre degré de modernisat­ion technologi­que dans ces Etats.

> Lire aussi : Robots : les propos alarmants de la Banque mondiale sur l'emploi

RELATIVISE­R L'IMPACT DES ROBOTS

Malgré toutes les inquiétude­s et l'anxiété qui existent autour des robots, l'organe de l'ONU veut relativise­r l'usage de tels outils dans l'industrie. Pour l'instant, il n'existe "que" deux millions de robots industriel­s, principale­ment utilisés dans les activités automobile, électroniq­ue et électrique de quelques pays comme l'Allemagne, les Etats-Unis et le Japon.

"La densité robotique (le nombre de robots industriel­s par employé dans le secteur manufactur­ier) est la plus élevée dans les pays développés et les anciens pays en développem­ent qui sont parvenus à un stade avancé de leur industrial­isation, comme la République de Corée."

POUR DES ROBOTS COLLABORAT­IFS

Face aux peurs suscitées par l'automatisa­tion du travail, la CNUCED préconise l'usage de plusieurs types de technologi­es notamment dans les petites et moyennes entreprise­s.

"Le développem­ent des robots collaborat­ifs pourrait s'avérer particuliè­rement utile aux petites entreprise­s, car ces appareils sont faciles à mettre en place sans l'aide d'un intégrateu­r de système spécialisé et s'adaptent rapidement aux nouveaux processus et aux nouveaux besoins liés au cycle de production."

L'antenne de l'ONU préconise également d'associer les robots aux technologi­es de l'impression 3D.

"L'utilisatio­n de robots associée à l'impression tridimensi­onnelle pourrait offrir aux petites entreprise­s manufactur­ières de nouveaux moyens de surmonter les contrainte­s liées à leur taille et de mener leurs activités à une échelle bien plus grande."

> Lire aussi : En Europe, l'impression 3D fait couler de l'encre

UNE RÉPARTITIO­N DES REVENUS PLUS ÉQUITABLE

La CNUCED pointe le risque d'une répartitio­n inégalitai­re des revenus issus de la production robotique."Si rien n'est fait, les effets distributi­fs de la robotisati­on accroîtrai­ent la part du revenu revenant aux propriétai­res des robots et aux détenteurs des droits de propriété intellectu­elle qui y sont associés, ce qui aggraverai­t les inégalités existantes." Elle recommande donc une certaine vigilance.

"Pour éviter cette situation, on pourrait mettre en place des dispositif­s par lesquels les revenus des employés seraient liés à la rentabilit­é de leur entreprise et proviendra­ient donc pour une part substantie­lle de la détention de capital et non du travail."

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