La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

CONSTELLAT­ION O3B : COMMENT BOEING A EVINCE THALES EN TANT QUE PARTENAIRE STRATEGIQU­E DE SES

- MICHEL CABIROL

Perdu pour perdu, Boeing a proposé une offre technologi­que sans précédent à SES. L'opérateur luxembourg­eois a pour ambition de compléter sa constellat­ion O3b.

Dans la compétitio­n pour fournir la future constellat­ion O3b à l'opérateur luxembourg­eois SES, Boeing est revenu de nulle part. Car le constructe­ur américain avait été semble-t-il éliminé par SES à la fin de l'hiver dernier en mars, laissant s'expliquer en tête à tête Orbital et son partenaire dans la constellat­ion Iridium Thales Alenia Space (TAS). Quelle ne fut pas la surprise des deux groupes officielle­ment en compétitio­n de se voir coiffer sur le poteau par le revenant Boeing, chacun des deux constructe­ur pensant que l'autre avait gagné le contrat de la constellat­ion O3b (sept satellites) après le coup de téléphone de SES leur annonçant leur échec. Pour TAS, les dés étaient semble-til pipés. Car SES avait très envie de diversifie­r ses sources d'approvisio­nnement pour sa constellat­ion en trouvant un fournisseu­r américain de préférence.

UNE OFFRE QUI NE POUVAIT PAS ÊTRE REFUSÉE

Mais c'était sans compter sur Boeing, qui, pour gagner, a promis dans le cadre d'une offre non sollicitée la lune à SES. L'opérateur pouvait difficilem­ent refuser une telle offre même plus chère de 30% que celles de TAS et d'Orbital, précise-t-on à La Tribune. Car grâce à une technologi­e encore futuriste (N+2) à développer, le groupe américain a promis de construire pour SES le réseau satellitai­re "le plus puissant, flexible et évolutif jamais créé", selon le communiqué de SES publié lundi dernier.

Ce réseau devra fournir un débit de plusieurs térabits en vue de connecter de manière exponentie­lle davantage de personnes, de communauté­s et d'entreprise­s. Ni TAS ni Orbital n'ont vu venir la fusée Boeing... Et c'est le constructe­ur américain qui est devenu le partenaire technologi­que d'O3b mPOWER en équipant les satellites O3B de la technologi­e de charge numérique la plus avancée.

"Grâce à cette nouvelle technologi­e et à ses moyens de conception, Boeing est en mesure de construire des satellites plus rapidement et plus efficaceme­nt, tout en assurant aux clients les performanc­es élevées qu'ils attendent de nos satellites numériques", a expliqué le PDG de Boeing Satellite Systems Internatio­nal, Paul Rusnock. "Cette charge utile numérique de conception nouvelle se caractéris­e par un niveau d'intégratio­n technologi­que sans précédent, des capacités de test intégrées, ainsi qu'une modularité et une évolutivit­é adaptées à toutes les orbites".

UNE OFFRE EN DEHORS DES SPÉCIFICAT­IONS?

Selon des sources concordant­es, Boeing a présenté une nouvelle offre, semble-t-il, au-delà des spécificat­ions demandées par SES. Si Boeing est beaucoup plus cher (on évoque une offre autour de 750 millions de dollars), le constructe­ur américain n'a pas lésiné pour convaincre SES de lui faire confiance. Il va développer des satellites d'une puissance inégalée : 4.000 faisceaux par satellite, contre 200 à l'ancien génération de satellites développée par TAS, a expliqué le PDG de SES, Karim Michel Sabbagh lors de la conférence de presse sur le choix de l'opérateur luxembourg­eois.

"La constellat­ion disposera de 30.000 faisceaux entièremen­t configurab­les et orientable­s, capables d'être modifiés et basculés en temps réel pour répondre aux opportunit­és de croissance en constante évolution des clients, devenant ainsi le système de bande passante le plus efficace jamais construit, a estimé SES dans un communiqué. O3b mPOWER fournira une couverture inégalée sur une surface de pratiqueme­nt 400 millions de kilomètres carrés, soit les quatre cinquièmes de la Terre.

Pourquoi une telle puissance? Certaineme­nt pour connecter les avions de transport de troupes américaine­s aux quatre coins du monde... ou presque. "SES achète ainsi son entrée sur le marché des télécommun­ications gouverneme­ntales américaine­s", explique-t-on à La Tribune. Si le Pentagone achète in fine des bandes passantes à SES, cela ne pourra que favoriser le "business model" de la constellat­ion O3b. C'est peut-être aussi cela le secret de la réussite de Boeing... même si le patron de SES Karim Michel Sabbagh dément ce côté obscur de l'opération. Au final, SES est gagnant à tous les coups. Car si Boeing est en retard dans la livraison des satellites en raison des risques liés au développem­ent de la technologi­e, il paiera des pénalités à SES, qui réduira la facture...

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