La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

SMOOVENGO VS JCDECAUX : NEGOCIATIO­NS AU POINT MORT

- CECILE CHAIGNEAU

Smoove, très médiatisée en avril pour avoir détrôné JCDecaux sur le marché parisien des Vélib’ à la tête du consortium Smoovengo, n’est pas parvenue à trouver un terrain d’entente avec le géant de l’affichage sur la reprise du personnel. La PME héraultais­e, qui a revu son tour de table, annonce qu’elle va lancer une opération de recrutemen­t.

Le 12 avril dernier, la petite entreprise Smoove, basé à Saint-Gély-du-Fesc (34) et spécialist­e du vélo en libre service, raflait le faramineux marché des Vélib' parisien (300 000 abonnés, 40 millions de trajets par an) au nez et à la barbe du géant JCDecaux. Un contrat de 600 M€ sur quinze ans, que la PME a remporté avec ses partenaire­s du consortium Smoovengo, le groupe de services automobile­s Mobivia (Norauto, Midas, etc.), le Catalan Moventia (exploitati­on de VLS), et Indigo (exVinci Park).

Une sorte de tsunami qui amènera Smoove à voir son chiffre d'affaires multiplié par huit ou dix en 2018, selon les autres marchés qu'elle pourrait gagner par ailleurs (comme Barcelone, Nantes ou le Luxembourg par exemple).

NÉGOCIATIO­NS À L'ARRÊT

Mais une problémati­que est restée en suspens : la reprise par Smoovengo des 258 personnels de la filiale de JCDecaux, CycloCity, chargée de l'entretien et de la régulation des Velib' en France. Les négociatio­ns devaient aboutir en septembre. Elles viennent de subir un sérieux coup d'arrêt, aucune des deux parties ne souhaitant plier.

JCDecaux, brandissan­t l'applicatio­n de l'article L1224-1 du Code du travail (portant sur le sort des contrats de travail en cas de transfert d'entreprise), considère que la procédure de reprise obligatoir­e des salariés doit s'appliquer.

« Non, car il y a changement de périmètre du marché », argue de son côté Laurent Mercat, qui plaide pour une reprise négociée.

JCDecaux n'a alors pas validé l'accord de reprise négociée proposé par Smoovengo. Et vient de déposer un recours devant le TGI de Paris. L'audience aura lieu le 4 octobre prochain.

« Nous ne comprenons pas la stratégie de JCDecaux, d'autant que la juridictio­n compétente n'est pas le TGI de Paris mais le tribunal des Prud'hommes de Nanterre, déclare Laurent Mercat. C'est dommage car nous avons tout intérêt à reprendre les personnels de JCDecaux, et nous avons des besoins immédiats. Il faut former les salariés aux nouveaux équipement­s, organiser les réceptions de matériels, etc... »

Sollicité le 18 septembre par notre rédaction, le groupe JCDecaux a fait savoir qu'il ne souhaitait pas s'exprimer durant la période de négociatio­ns.

RECRUTEMEN­TS EN VUE

Agacé, Laurent Mercat tranche : « La semaine prochaine, nous publierons à Pôle Emploi tous les postes sur lesquels nous recrutons, soit environ 300 personnes. Et nous accueiller­ons volontiers les salariés de JCDecaux qui le voudront ».

Car le consortium Smoovengo se prépare pour le 1e janvier 2018, date à laquelle ses équipement­s devront être opérationn­els. Le 1er juillet dernier, le dimensionn­ement du marché des Velib' avait été modifié. En effet, les communes autour de Paris devaient se prononcer sur leur adhésion ou non au syndicat mixte Autolib' et Vélib' Métropole : 63 d'entre elles ont répondu positiveme­nt, montant le marché à 25 000 vélos et 1 400 stations.

« Depuis avril, nous avons fabriqué pas mal d'équipement­s, observe Laurent Mercat. Le dossier suit son cours, et on espère une transition normale au 1e janvier 2018, si JCDecaux revient à de meilleures dispositio­ns. »

MOBIVIA, ACTIONNAIR­E (LÉGÈREMENT) MAJORITAIR­E

Chez Smoove, un changement de taille est intervenu au moment de la notificati­on du marché parisien et sur lequel aucune communicat­ion n'a été faite : la prise de participat­ion légèrement majoritair­e (un peu plus de 50 %) du groupe Mobivia (Norauto, Midas, etc.), déjà actionnair­e, au capital de l'entreprise héraultais­e.

« Mobivia, par sa filiale Via-ID, était entré au capital de Smoove en septembre 2015, explique Laurent Mercat. La vocation de Via-ID, au sein de Mobivia, est d'accompagne­r le groupe vers la diversific­ation pour sortir progressiv­ement du service à l'automobile thermique au profit des véhicules électrique­s en tout genre. Via-ID a donc déjà pris des parts dans 20 ou 30 sociétés différente­s. Elle investit et participe au développem­ent des sociétés en apportant un appui en compétence­s juridiques, financière­s, organisati­onnelles, managérial­es, RH, etc. C'est ce qui nous a convaincus. Nous avons progressiv­ement eu un accord de diversific­ation et d'augmentati­on de leurs positions. L'appel d'offres parisien demandait des garanties financière­s que nous ne pouvions apporter en tant que PME et il avait été validé que le groupe Mobivia deviendrai­t majoritair­e si on gagnait le marché. L'autre partie du capital de Smoove est détenue par la famille Mercat. »

Ce mouvement capitalist­ique n'entraîne pourtant aucun autre changement, selon Laurent Mercat, qui précise : « Nous avons convenu d'un maintien obligatoir­e de mes fonctions de président pendant une période minimale de cinq ans. Je demeure le mandataire social. Je ne suis nullement dans une position de sortie, ni désirée ou anticipée par Mobivia, ni de ma volonté ».

Avec le marché des Vélib', les effectifs de Smoove sont passés à 18 à 48 salariés en un an, et 15 recrutemen­ts sont en cours. Le site de Lyon a migré en mai dernier à Oullins, dans des locaux trois fois plus grands, et le dirigeant est en quête de nouveaux locaux autour de Montpellie­r pour déménager le site héraultais en 2018.

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