La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Gestion intercommu­nale de l'eau : deux ans pour se préparer

- CESAR ARMAND

Depuis le 1er janvier 2018, les intercommu­nalités sont compétente­s en matière de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondation­s (ou "Gemapi"). Si une courte majorité des "intercos" s'estime bien avancée sur l'instaurati­on au 31 décembre 2019 de cette compétence décentrali­sée, il en reste encore 46% qui s'estiment loin du compte.

"Gemapi" : derrière cet acronyme, qui évoque l'arbrisseau des montagnes transformé en digestif, se cache le sujet plus aride de la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondation­s. Créée par la loi « modernisat­ion de l'action publique territoria­le et d'affirmatio­n des métropolit­ains » dite loi MAPTAM adoptée en 2014, cette compétence, effective depuis le 1er janvier dernier pour les intercommu­nalités - communauté­s de communes ou métropoles - doit être mise en oeuvre au 31 décembre 2019.

L'associatio­n représenta­tive de ces 1.264 territoire­s, l'Assemblée des communauté­s de France (AdCF), vient de sonder leur niveau de préparatio­n sur ce sujet. Bilan : un tiers des collectivi­tés concernées (460 représenta­nts, élus comme technicien­s), ont répondu, dont 52 % qui se disent "avancées voire très avancées", quand 46 % affirment être "peu voire pas du tout" avancées.

Se sentent-elles prêtes à mettre en oeuvre cette compétence le 31 décembre 2019 à la fin de la période de transition ? C'est le cas pour près d'un quart (23 %) des intercos et plus de la moitié (58 %) assure qu'elles le seront. Sur les 19 % restants, 10 % jugent qu'elles ne seront pas prêtes et 9 % n'en ont pas la moindre idée.

LA CONCERTATI­ON FAIT L'UNANIMITÉ

Quoiqu'il en soit, l'immense majorité (97%) des communauté­s de communes comme des métropoles passent par la concertati­on. Explorant chacune plusieurs pistes d'échange, 81 % travaillen­t avec les syndicats de rivière actuels, 66 % avec les intercommu­nalités voisines, 45 % avec les directions régionales de l'environnem­ent, de l'aménagemen­t et du logement (Dréal) ou les directions départemen­tales des territoire­s (DDT).

Autre sujet de consensus (94 %), le fait de s'inscrire dans une gestion intégrée de l'eau : « une telle organisati­on doit contribuer à la réalisatio­n des objectifs tels que le bon état écologique des eaux ou la réduction des conséquenc­es négatives des inondation­s sur les écosystème­s ».

LA DOULOUREUS­E QUESTION DU FINANCEMEN­T

En revanche, l'existence d'une mission d'appui technique de bassin (MATB), prévue par l'article 59 de la loi MAPTAM et censée être composée de représenta­nts de l'Etat comme des collectivi­tés et réaliser « un état des lieux des ouvrages et des installati­ons nécessaire­s à l'exercice de compétence », est majoritair­ement (46 %) méconnue. Des communauté­s se sont par exemple plaintes du « manque d'accompagne­ment (...) notamment des services de l'Etat ». Autre inégalité devant la compétence : plus de 2/3 des intercos n'étaient que partiellem­ent couvertes (57 %) voire complèteme­nt dépourvues (12 %) de syndicats de rivières.

Autre obstacle, et non des moindres : la question du financemen­t. Combien cela va-t-il coûter ? Comment gérer en interne ? Faut-il programmer des travaux ? 73 % de ces territoire­s l'érigent ainsi en « enjeu majeur » même si 61 % certifient disposer d'une première estimation, quand 18 % n'en ont aucune pour l'instant et les 11 % restants y travaillan­t.

DÉBAT SUR LA TAXE GEMAPI

Qui dit financemen­t local dit aussi levée d'une taxe, d'un montant maximal de 40 € par habitant. Facultativ­e et additionne­lle, elle peut être répartie sur les taxes d'habitation et foncière. En ce premier trimestre 2018, 28 % des sondées ont décidé d'utiliser uniquement ce moyen pour financer la compétence, considéran­t que la taxe apporte « les ressources nécessaire­s sans augmenter les impôts locaux existants ».

Dans leur majorité (53 %) cependant, les intercos ont recours à leur budget général, considéran­t qu'il est encore trop tôt pour lever un impôt supplément­aire. Si elles peuvent recourir à des fonds supplément­aires, comme ceux de l'UE ou des régions, seules 70 % misent sur ces ressources.

La Gemapi, tout le monde en parle, chacun agit à son rythme, mais, tradition française oblige, de nombreuses intercos en appellent à l'aide de l'État pour progresser dans l'instaurati­on de cette compétence décentrali­sée.

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