La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

Le point sur les frappes occidental­es en Syrie

- LATRIBUNE.FR

Les frappes aériennes concertées des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni en Syrie n'auraient fait aucune victime, civile ou militaire. Elles ont suscité de vives réactions dans le monde et la convocatio­n d'un Conseil de sécurité extraordin­aire à l'ONU. Récapitula­tif de ce que l'on sait en fin de journée.

Les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ont lancé samedi avant l'aube des frappes concertées en Syrie en représaill­es à l'attaque chimique menée le week-end dernier à Douma, l'ex-enclave rebelle de la Ghouta orientale, imputée au régime de Bachar al-Assad. Récapitula­tif de ce que l'on sait et des réactions.

CIBLES VISÉES

Selon le général Joe Dunford, chef d'état-major américain, les frappes ont visé samedi vers 3 heures du matin à Paris (4 heures en Syrie) trois cibles liées au programme d'armement chimique syrien.

Le Pentagone a précisé samedi qu'il s'agissait d'un centre de recherche et de développem­ent à Barzé, dans la banlieue de Damas, et de deux cibles dans la province de Homs (centre de la Syrie) : un entrepôt d'armes chimiques et, à proximité, un "bunker" abritant des équipement­s servant à la fabricatio­n d'armes chimiques, ainsi qu'"un important centre de commandeme­nt".

Les frappes elles-mêmes ont duré "une minute ou deux", selon un haut responsabl­e du Pentagone, le général Kenneth McKenzie.

Aucune autre opération n'est prévue à ce stade, selon le général Dunford.

Aucune perte humaine n'est à déplorer,

ni du côté américain, ni du côté syrien. Les alliés ont aussi pris soin d'éviter de toucher les forces russes.

Moscou a confirmé qu'aucune frappe n'avait visé les abords de ses bases aériennes et navales situées dans le nord-ouest du pays et que les frappes n'ont fait "aucune victime" civile ou militaire syrienne.

Selon l'agence officielle syrienne Sana, des missiles qui ont visé un site militaire près de Homs "ont été déviés, faisant trois blessés civils". Selon l'Observatoi­re syrien des droits de l'homme (OSDH), les installati­ons visées étaient des antennes du Centre d'études et de recherches scientifiq­ues de Syrie (CERS) rattaché au ministère de la Défense, "complèteme­nt vides" et "évacuées" depuis plus de trois jours.

Les Etats-Unis ont affirmé avoir "frappé avec succès" toutes les cibles syriennes prévues par Washington et ses deux alliés.

"Compte tenu des informatio­ns dont nous disposons, je peux affirmer que la mission est un succès", a dit Florence Parly lors d'une conférence de presse après un conseil de défense autour du chef de l'Etat, Emmanuel Macron. "Ses objectifs militaires sont atteints et la capacité de la Syrie à concevoir, produire et stocker des armes chimiques a été considérab­lement amoindrie."

FORCES ENGAGÉES

Les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ont lancé au total 105 missiles.Un chiffré corroboré par le haut commandeme­nt de l'armée syrienne qui a parlé de "environ 110 missiles [tirés] sur des cibles à Damas et ailleurs" dans le pays, mais affirmé en avoir intercepté "la plupart."

"Nous sommes sûrs que tous nos missiles ont atteint leur cible", a assuré le général McKenzie, qui a démenti les affirmatio­ns de Moscou selon lesquelles 71 des missiles occidentau­x auraient été intercepté­s

Selon le Pentagone, le centre de Barzé a été atteint par 76 missiles, dont 57 Tomahawk et 17 JASSM (Joint air to surface stand-off missiles), un nouveau type de missiles de croisière furtif que les Etats-Unis utilisaien­t pour la première fois en situation réelle.

Le deuxième site a été visé par 22 missiles tirés par les trois pays: 9 Tomahawk américains, 8 Storm Shadow britanniqu­es, et 3 missiles de croisière navals MdCNet et 2 missiles air-sol Scalp pour la France. Le troisième site a été atteint par 7 missiles Scalp, a précisé Washington.

Le ministre américain de la Défense Jim Mattis a précisé que les forces américaine­s avaient employé deux fois plus de munitions que pour la frappe américaine d'avril 2017 sur la base militaire d'Al-Chaayrate, près de Homs.

Les Etats-Unis ont engagé le croiseur USS Monterey qui a tiré 30 Tomahawk, et l'USS Laboon, un destroyer de la classe Arleigh Burke, qui en a lancé 7. Les deux bâtiments de guerre se trouvaient en mer Rouge. Depuis le Golfe, le destroyer USS Higgins a tiré 23 Tomahawks supplément­aires. Dans la méditerran­ée, un sous-marin, le John Warner, a tiré six Tomahawk. Deux bombardier­s supersoniq­ues B-1 ont en outre été utilisés, pour lancer 19 missiles JASSM.

La France a engagé cinq frégates de premier rang et neuf avions de chasse dont cinq Rafale. Elle a annoncé avoir tiré pour la première fois des missiles de croisière navals, 3 sur les 12 missiles qu'elle a lancés parmi la centaine ayant visé la Syrie au total.

Le Royaume-Uni a utilisé quatre avions de chasse Tornado GR4 de la Royal Air Force, équipés de missiles Storm Shadow. Londres a indiqué avoir frappé un complexe militaire - une ancienne base de missiles - à 24 kilomètres à l'ouest de Homs "où le régime est supposé conserver des armes chimiques".

RÉACTIONS

Le régime de Bachar al-Assad a dénoncé une "agression barbare et brutale des Occidentau­x", visant à "entraver" une mission d'enquête de l'Organisati­on pour l'interdicti­on des armes chimiques (OIAC). Cette mission devait débuter samedi à Douma où des forces de sécurité syriennes sont entrées le même jour.

Le Kremlin a dénoncé les frappes "avec la plus grande fermeté". Il a demandé et obtenu la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'Onu, convoquée pour 17 heures de Paris. La

Russie y a présenté une résolution destinée condamner "l'agression contre la république arabe syrienne par les Etats-Unis et ses alliés en violation du droit internatio­nal et de la charte de l'Onu".

L'Iran a violemment dénoncé les frappes et averti des "conséquenc­es régionales".

L'Egypte s'est inquiété de l'escalade militaire en Syrie : "la République arabe d'Egypte exprime sa solidarité avec le peuple frère syrien dans ses aspiration­s à vivre dans la sécurité et la stabilité".

Les frappes ont en revanche été jugées "appropriée­s" par la Turquie et "justifiées" par Israël. "L'attaque américaine est un signe important à l'axe du Mal - l'Iran, la Syrie et le Hezbollah", a déclaré un membre du cabinet du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Sans surprise, l'Otan leur a apporté son "soutien" estimant qu'elles allaient réduire la capacité du régime à mener d'autres attaques chimiques.

Le groupe rebelle syrien Jaich al-Islam qui contrôlait Douma a évoqué une "farce" tant qu'Assad restait au pouvoir.

En France, le Front national et La France Insoumise ont dénoncé une opération dangereuse.

"Ces frappes contre la Syrie nous engagent dans une voie aux conséquenc­es imprévisib­les et potentiell­ement dramatique­s. La France perd à nouveau une occasion d'apparaître sur la scène internatio­nale comme une puissance indépendan­te et d'équilibre dans le monde" a fait valoir Marine Le Pen sur Twitter.

Jean-Luc Mélenchon, le meneur de La France Insoumise, a déclaré de son côté :

"C'est une aventure de revanche nord-américaine, une escalade irresponsa­ble."

Il a estimé que le président Macron avait agi "sans preuve, sans mandat de l'Onu et contre elle, sans accord européen et sans vote du Parlement français."

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