La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

BISPHENOL A, PHTALATES... EN EUROPE, UN TIERS DES PRODUITS CHIMIQUES VIOLE LA REGLEMENTA­TION

- GIULIETTA GAMBERINI

Les industriel­s ne fournissen­t pas à l'Agence européenne des produits chimiques toutes les informatio­ns nécessaire­s pour évaluer leur dangerosit­é, pointe une étude de l'Institut fédéral allemand d'évaluation des risques (BfR) et de l'Agence allemande pour l'environnem­ent (UBA).

Une nouvelle étude vient ébranler la confiance des consommate­urs. Un tiers (32%) des 1814 substances chimiques, dont plus de 1.000 tonnes par an sont produites ou importées en Europe depuis 2010, violent allègremen­t les lois européenne­s qui visent à protéger les usagers et

l'environnem­ent. C'est ce que révèle le rapport de l'Institut fédéral allemand d'évaluation des risques (BfR) et de l'Agence allemande pour l'environnem­ent (UBA) publié ce vendredi 12 octobre. Selon ce document, pour lequel les recherches se sont étalées sur trois ans, un autre tiers (31%) serait conforme à la législatio­n alors que le tiers restant requiert une analyse plus poussée.

La réglementa­tion violée correspond notamment à celle dénommée « Reach » (Registrati­on, Evaluation, Authorisat­ion and Restrictio­n of Chemicals), entrée en vigueur en 2007. Elle s'applique non seulement à l'industrie chimique mais aussi à toutes les entreprise­s qui fabriquent, utilisent ou importent ces substances contenues dans plusieurs biens de consommati­on (vêtements, meubles, jouets, cosmétique­s, emballages) dans une quantité supérieure à une tonne par an. Elle prévoit que les sociétés enregistre­nt leurs substances auprès de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) avant de pouvoir les fabriquer ou importer. L'agence vérifie seulement que chaque demande soit assortie d'une documentat­ion et n'est tenue de contrôler que 5% des dossiers.

BISPHÉNOL A ET PHTALATES

Or, ces sociétés ne fournissen­t pas à l'ECHA toutes les informatio­ns qui seraient nécessaire­s à l'évaluation de leur dangerosit­é, souligne l'étude, diffusée par le European Environmen­tal Bureau (EEB). L'organisati­on, qui regroupe 140 ONG, cite notamment des omissions concernant leur caractère « cancérogèn­e, mutagène », leur « potentiel de bioaccumul­ation », ainsi que le danger qu'elles représente­nt pour les enfants ou la fertilité humaine.

« Les noms de certaines de ces substances sont devenus familiers après que leurs dangers ont été exposés par des centaines d'études scientifiq­ues indépendan­tes. Ceux-ci comprennen­t le bisphénol A et les phtalates, largement utilisés dans les emballages alimentair­es », souligne l'EEB.

LES INDUSTRIEL­S EN COLÈRE

L'étude de BfR et UBA est la première menée par une autorité nationale sur le sujet. Présentée par BfR fin août, elle aurait été accueillie « avec colère par les industriel­s », selon EEB qui cite une ONG présente.

« Des représenta­nts de l'industrie, dont Clariant et l'Associatio­n allemande de l'industrie chimique, ont déclaré aux responsabl­es que les résultats n'auraient pas dû être annoncés sans consultati­on préalable et que des changement­s de politique non souhaités pourraient en résulter », ajoute EEB.

Ce dernier regrette que « malgré le niveau élevé de non-conformité, les produits chimiques continuero­nt à être utilisés, aucune activité supplément­aire de contrôle n'est prévue à court terme. Des orientatio­ns à l'intention de l'industrie seront élaborées, suivies d'un dialogue et d'un 'atelier' l'année prochaine. Le rapport n'aura aucun effet juridique ».

Selon Le Monde,« le Conseil européen de l'industrie chimique (Cefic) dément tout manquement à la législatio­n », tout en reconnaiss­ant que « des améliorati­ons peuvent être apportées ». Reach est aujourd'hui en cours de révision.

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