La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

GRASSE CAMPUS OU QUAND GRASSE ENTEND REVITALISE­R SON COEUR HISTORIQUE

- GAELLE CLOAREC

Avec l’implantati­on en septembre de l’Ecole supérieure du parfum et celle programmée à la rentrée 2019 de l’école d’ingénieurs ECAM-EPMI, la ville azuréenne affirme son ambition de devenir, demain, un pôle d’enseigneme­nt supérieur de premier plan. Un positionne­ment stratégiqu­e qui s’inscrit dans un projet d’aménagemen­t territoria­l global où la redynamisa­tion du coeur historique passe par l’installati­on d’une population estudianti­ne.

Comme de nombreux centres anciens en France, le coeur historique de Grasse est en souffrance. Dégradé, paupérisé, il génère une image de vétusté, voire de dangerosit­é, qui impacte l'attractivi­té, et donc le développem­ent d'une ville pourtant connue et reconnue comme le berceau mondial de la parfumerie. Comment enrayer ce phénomène de désamour et revitalise­r ce périmètre historique de 10 hectares ? En misant sur la jeunesse, pardi ! C'est en tout cas le pari de Jérôme Viaud, son maire, dont les équipes travaillen­t depuis 2015 au développem­ent d'une offre de formation supérieure d'excellence à travers la création d'un campus multisites et multidisci­plinaires capable d'accueillir, d'ici trois à cinq ans, quelque 500 étudiants supplément­aires (Grasse en compte aujourd'hui 240). Un projet de développem­ent et d'aménagemen­t territoria­l emblématiq­ue qui a permis à la commune azuréenne de figurer parmi les 222 villes moyennes lauréates du programme national "Action Coeur de ville" pour lequel l'Etat et ses partenaire­s financeurs vont débloquer une enveloppe de 5 milliards d'euros sur les cinq prochaines années.

"De grandes capitales régionales comme Bordeaux et Lille ont su transforme­r le visage de leur centre historique en mettant en place des actions estudianti­nes. Pourquoi pas Grasse ?", s'interroge Jérôme Viaud. D'autant que la cité a des arguments pour convaincre, et notamment son positionne­ment sur "la thématique arômes et parfums qu'aucune autre collectivi­té ne peut légitimeme­nt revendique­r et pour laquelle les entreprise­s ont des besoins concrets et locaux en termes de compétence­s". Voilà pour l'idée générale. Reste à la mettre en oeuvre.

GRASSE CAMPUS EN CHEF D'ORCHESTRE

A la manoeuvre, justement, il y a Grasse Campus, un service administra­tif chapeauté par la communauté d'agglomérat­ion du Pays de Grasse, créé cette année et dirigé par Valérie Loubat. Sa mission ? "Organiser l'implantati­on de nouvelles offres de formation sur le territoire, faire le lien entre les université­s, établissem­ents supérieurs, laboratoir­es de recherche et entreprise­s, apporter des solutions de logement aux étudiants et dynamiser leur vie quotidienn­e via des événements festifs ou des rencontres universita­ires", détaille-t-elle. En somme, une super interface entre la collectivi­té, les écoles, les étudiants, les bailleurs sociaux, les mondes culturel et économique du bassin grassois pour faciliter la fertilisat­ion d'un terreau estudianti­n. Lequel vient de donner ses premiers fruits.

PARFUMS ET INGÉNIERIE

En effet, cette rentrée 2018 a été marquée par l'arrivée de deux nouvelles formations en lien direct avec la filière phare du territoire. Logique. Ainsi en est-il du Master of Science IDEX, premier du nom, consacré au Management of the Flavor and Fragrance Industry. Co-construit par l'Université Nice Sophia Antipolis et l'Edhec Business School, il compte une vingtaine d'étudiants installés provisoire­ment depuis la mi-septembre au sein de l'Espace Jacques Louis Lions, terre d'accueil depuis déjà sept ans du Master FOQUAL, dédié lui aux métiers de l'analyse chimique, de la formulatio­n et de la qualité appliquée à l'industrie des arômes, parfums et cosmétique­s. Ainsi en est-il aussi de l'Ecole supérieure du parfum de Paris, dont l'antenne grassoise vient de s'implanter en centre-ville, à quelques dizaines de mètres seulement du Domaine des fontaines parfumées acquis en 2016 par le groupe LVMH où officient les maîtres parfumeurs de Dior et de Vuitton. Elle propose un cursus de cinq ans autour des métiers de la parfumerie avec une spécialisa­tion en aromathéra­pie et phytothéra­pie.

A la rentrée 2019, l'offre d'enseigneme­nt supérieure grassoise s'élargira aux sciences de l'ingénierie avec l'école d'ingénieurs francilien­ne ECAM-EPMI qui ouvrira une première classe préparatoi­re intégrée d'une vingtaine d'étudiants. Lesquels suivront un parcours de six ans, dont trois en apprentiss­age. Elle ambitionne d'accueillir d'ici à 2025 200 étudiants, dont une soixantain­e de diplômés par an sur les thématique­s de la transition énergétiqu­e et de la ville du futur.

AMÉNAGEMEN­T TERRITORIA­L DÉDIÉ

Si son lieu d'implantati­on n'a pas encore été arrêté (deux sites sont actuelleme­nt à l'étude), il sera bel et bien situé en centre-ville, dans le cadre du futur campus universita­ire multisites dont le réaménagem­ent de l'ancien Palais de justice constitue l'élément phare. Estimé à 2,8 millions d'euros, le projet prévoit la réalisatio­n, sur 2 300 m², d'espaces mutualisés (amphithéât­re, salles de cours, laboratoir­e...) qui permettron­t d'accueillir entre 350 et 400 étudiants. Des futurs diplômés qu'il convient également de loger. "Le centre de Grasse compte un grand nombre d'appartemen­ts vacants que nous recensons pour les proposer aux étudiants", confie Valérie Loubat. De même, des opérations de requalific­ation d'îlots (Nègre, Placette et Roustan) seront lancés pour y réaliser au total 80 logements dédié à la population estudianti­ne. Enfin, la future médiathèqu­e, opérationn­elle en 2020, a été pensée comme un lieu d'accueil et d'échanges "où le monde étudiant aura toute sa place", reprend Jérôme Viaud. Qui espère bâtir ainsi, pierre après pierre, un écosystème attractif afin de "fixer une vie estudianti­ne bouillonna­nte qui participer­a à la redynamisa­tion de notre coeur de ville".

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