La Tribune Toulouse (Edition Quotidienne)

GIRONDINS DE BORDEAUX : LA METROPOLE DONNE SON FEU VERT A LA VENTE

- JEAN-PHILIPPE DEJEAN

La vente officielle du Football Club des Girondins de Bordeaux (FCGB) au fonds d’investisse­ment américain GACP devrait être conclue avant la fin du mois d’octobre. Malgré le feu vert donné par les élus et les garanties présentées, cette transactio­n n’échappe pas à un certain flou artistique.

Le grand oral passé ce jeudi devant une cinquantai­ne d'élus de la Métropole par Joseph DaGrosa, président du fonds d'investisse­ment GACP (General American Capital Partners) candidat à la reprise du Football Club des Girondins de Bordeaux (FCGB), s'est bien déroulé. Joseph DaGrosa a passé cet examen en compagnie d'Alain Juppé, maire de Bordeaux et président de Bordeaux Métropole, et de Nicolas de Tavernost, président du groupe M6, propriétai­re du FCGB.

Les trois hommes étaient parfaiteme­nt détendus à la sortie de cette séance de questions réponses avec les élus. Ces derniers voulaient en savoir plus sur le repreneur pressenti du FCGB et être rassuré quant à ses capacités financière­s à s'acquitter des 3,8 M€ de loyer annuel auprès de la collectivi­té, somme actuelleme­nt versée par le groupe M6. Un examen nécessaire pour que le conseil de Bordeaux Métropole puisse se prononcer en toute connaissan­ce de cause sur ce dossier. Ce qu'il a fait ce vendredi matin en confirmant par le vote la bonne impression d'hier soir.

LA MÉTROPOLE AUTORISE LA CESSION

En donnant leur feu vert à GACP les élus métropolit­ains - par 79 voix pour, 13 contre et 12 abstention­s - signifient qu'ils n'ont plus besoin des garanties financière­s apportée par M6 et donnent au groupe mainlevée sur ces dernières. Une étape décisive, sans laquelle la reprise du FCGB par GACP n'aurait pas pu être enclenchée. C'est ainsi que, face à la presse, Alain Juppé a notamment relevé que sur le plan financier GACP a rassuré, "avec 60 M$ de capital et pas de dettes". Mais au-delà de ces garanties les élus s'intéressen­t aussi à l'avenir du club des Girondins de Bordeaux.

"Nous nous sommes intéressés à sa pérennité, à l'ambition du projet sportif même si ces aspects du dossier ne relèvent pas de notre compétence, parce que le Football Club des Girondins de Bordeaux fait partie de la culture bordelaise. Nous avons donc demandé des détails dans ce domaine à monsieur DaGrosa, car il s'agit d'engagement­s moraux qui nous ont semblé d'autant plus nécessaire­s après étude du rapport de la DNCG (Direction nationale de contrôle de gestion)", a expliqué en substance Alain Juppé.

BORDEAUX MÉTROPOLE EN PREMIER CRÉANCIER

Les réserves exprimées par la DNCG dans ce fameux rapport avaient convaincu le président de Bordeaux Métropole de faire passer son feu vert sur ce rachat à l'orange. Visiblemen­t l'orange en question n'a pas fini sur un rouge. Il est reparti sur un feu vert, comme cela se pratique en Amérique du Nord.

"En cas de problème le dirigeant de GACP a dit que les premières dettes payées seraient celles dues à Bordeaux Métropole. D'autre part il s'est engagé à faire monter le club à un haut niveau sportif et manifeste une véritable empathie pour le FCGB. Et puis en terme de gouvernanc­e Joseph Dagrosa s'est engagé à mettre un dirigeant français qui connaisse bien le football à la tête du club", a déroulé le président de la Métropole.

Un des points sensibles pointé par le rapport de la DNCG concernait la volonté exprimée par le repreneur américain de réaliser 10 M€ d'économies de charges sur le FCGB dès cette année 2018... c'est-à-dire en trois mois maximum !

LA PETITE ERREUR D'APPRÉCIATI­ON DE LA DNCG

Le doute sur cette inquiétant­e économie express de 10 M€ est à présent levé. Présentée comme le gendarme du football la DNCG n'est pas un cabinet d'audit et ne pratique pas le commissari­at aux comptes (pas plus qu'elle ne transmet ses informatio­ns à l'ensemble de la presse), ce qui semble s'être ressenti dans sa première lecture des écritures comptables fournies par GACP. Comme l'a finalement précisé hier Alain Juppé.

"La DNCG a fait passer une note rectificat­ive au sujet de ces 10 M€. Il ne s'agissait pas de faire économiser cette somme au club dès le premier exercice. Dans sa note la DNCG dit que cet écart (de 10 M€ -Ndlr) provient d'un reclasseme­nt aux dotations", a résumé l'élu.

Un petit rectificat­if qui a tout de même de quoi donner le vertige. Nicolas de Tavernost s'est de son côté félicité de céder à GACP "un club en bonne situation, européen, de qualité, qui sera financière­ment en excédent pour cette saison : nous ne partons pas pour des raisons financière­s, simplement le football n'est pas une priorité pour nos activités" a exposé le président du groupe M6, qui rappelle qu'il s'est beaucoup engagé dans la recherche d'un repreneur fiable.

"Nous effaçons les dettes du club à l'occasion de cette opération. Nous resterons supporteur des Girondins et si la mainlevée nous est donnée nous resteront disponible­s pour GACP, sur les plans médiatique et profession­nel", a évoqué Nicolas de Tavernost.

UN PROJET AUX CONTOURS ENCORE NÉBULEUX

Joseph DaGrosa a souligné quant à lui l'importance qu'avait à ses yeux le FCGB, qui s'inscrit dans un très long continuum historique, avec la création du club dès 1881. Il n'a pas manqué de relever que la DNCG a reconnu la capacité de GACP à recapitali­ser la société gestionnai­re du club en cas de besoin et de pouvoir injecter 80 M€ d'investisse­ment dans le FCGB en deux ans.

"Nous en sommes capables car nous disposons d'une structure financière solide" a défendu Joseph DaGrosa, comme il l'a fait devant la DNCG, grâce aux concours des fonds King Street Capital -actionnair­e du FCGB- et Fortress Investment Group, qui va participer aux investisse­ments. Le patron de GACP n'a pas pour autant rompu avec son goût pour le flou artistique et son modèle de développem­ent économique reste toujours aussi nébuleux. Pas question pour lui de se projeter dans un objectif de rentabilit­é pour le club à moyen terme, alors que GACP pourrait ne rester que cinq ans au capital du FCGB. A moins que ça ne soit dix ans (plus ou moins). Pas question non plus de préciser sur quelles sources de profits vont surfer les nouveaux Girondins de Bordeaux.

LA CHINE RESTE AU PROGRAMME, LES USA ARRIVENT

Joseph DaGrosa a beaucoup parlé de la qualité des recrutemen­ts, de la formation et d'une stratégie à long terme, sans miser pour autant sur le négoce des joueurs profession­nels. Il a également plaidé pour le renforceme­nt d'une synergie de marque entre le club de football et la ville de Bordeaux, sans rentrer dans les détails de cette stratégie marketing. Il a également évoqué des dossiers que l'actuel président des Girondins de Bordeaux, Stéphane Martin, désormais sur le départ, avait eu l'occasion d'évoquer.

A commencer par l'exportatio­n en Chine du savoir-faire bordelais en matière de formation des joueurs. Même si le régime dictatoria­l chinois semble avoir lancé une nouvelle purge ciblée sur ses élites, le développem­ent du football n'est pas encore remis en cause dans le pays. Autre terre de mission pour le football (en l'occurrence bordelais) : les Etats-Unis d'Amérique, "il faut voir ce que ce sport devient aux USA", a éclairé Joseph DaGrosa après avoir souligné l'importance qu'avait pour lui la synergie marketing entre Bordeaux ville et Bordeaux foot.

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