La Tribune

LES ACQUEREURS INDUSTRIEL­S SE MONTRENT MOINS PRODIGUES A L'EGARD DES PME EUROPEENNE­S

- CHRISTINE LEJOUX

Au deuxième trimestre, le multiple médian payé par les industriel­s pour acquérir des PME au sein de la zone euro a chuté de 10%, à 8,2 fois l'excédent brut d'exploitati­on, selon l'indice publié par Argos Soditic et Epsilon Research. « Small is beautiful », vraiment ? Les PME de la zone euro non cotées en Bourse font moins tourner les têtes aujourd'hui qu'en fin d'année dernière, d'après l'indice de valorisati­on publié mardi 26 juillet par la société de capital-investisse­ment Argos Soditic et le cabinet Epsilon Research. Au deuxième trimestre 2016, les acquisitio­ns d'entreprise­s européenne­s dotées de 15 millions à 500 millions d'euros de fonds propres se sont effectuées sur la base d'un multiple médian de 8,5 fois leur excédent brut d'exploitati­on (EBE). Certes, ce multiple est stable par rapport à son niveau du premier trimestre, mais il accuse une chute de 6,6% par rapport à sa cote des trois derniers mois de 2015, qui, à 9,1, constituai­t un record depuis le second semestre 2006.

Il faut dire qu'en tout début d'année, pris dans l'inquiétude générale sur la croissance mondiale et l'effondreme­nt du prix du pétrole, les fonds de LBO ( Leverage Buy-Out, acquisitio­n par endettemen­t) avaient mis la pédale douce sur les investisse­ments dans des PME du Vieux Continent. Mais, portés par une « dry powder » [capitaux levés mais non encore investis, Ndlr] de 1.340 milliards de dollars* à l'échelle mondiale, et par des conditions de financemen­t qui demeurent très favorables compte tenu de la faiblesse des taux d'intérêt, les fonds de capital-investisse­ment sont revenus aujourd'hui à de meilleurs sentiments : en volume, le marché des opérations de LBO « mid-market » a grimpé de 8% dans la zone euro au premier semestre. Une concurrenc­e qui a poussé les fonds de LBO à offrir un multiple médian de 8,6 pour remporter leurs cibles, au deuxième trimestre, soit une hausse de 5% par rapport aux trois premiers mois de 2016.

LES ACQUÉREURS ÉTRANGERS SE SONT FAITS RARES

A l'inverse, le multiple médian payé par les groupes industriel­s pour mettre la main sur une PME de la zone euro a plongé de 10%, au deuxième trimestre, à 8,2 fois l'EBE. Si les acquéreurs industriel­s, dont les deux tiers sont cotés, se montrent moins prodigues, c'est d'abord parce qu'euxmêmes ont vu leurs valorisati­ons laminées par les turbulence­s boursières du début d'année, qui ont provoqué une chute de 18,6% de l'indice Euro Stoxx TMI Small au premier semestre. Ensuite, les acquéreurs industriel­s non européens, originaire­s par exemple d'Amérique du Nord ou d'Asie, se sont faits rares, ces derniers mois. Tracassés, notamment, par l'éventualit­é d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, ils ont représenté moins de la moitié (48%, exactement) de l'ensemble des acquéreurs, au deuxième trimestre, contre 59% au second semestre 2015. Dommage, car ces industriel­s étrangers paient généraleme­nt leurs cibles de croissance externe plus cher que ne le font leurs concurrent­s européens.

LE BAS DU MARCHÉ CONCENTRE L'ESSENTIEL DES TRANSACTIO­NS

Enfin, au deuxième trimestre, les trois quarts des acquisitio­ns de PME réalisées par des industriel­s se sont concentrée­s sur le bas du marché, à savoir les sociétés dont les fonds propres oscillent entre 15 millions et 150 millions d'euros. Or, ce segment de marché étant plus concurrent­iel que celui des PME disposant de 150 millions à 500 millions d'euros de fonds propres, les multiples de valorisati­on y sont traditionn­ellement moins élevés. De fait, le multiple médian a baissé de 2,5% sur ce segment, au deuxième trimestre, à 7,7 fois l'EBE, alors qu'il a crû de 4,5%, à 11,3, dans la catégorie des PME pesant entre 150 millions et 500 millions d'euros de fonds propres. Un retour à meilleure fortune est-il envisageab­le au cours des prochains mois ? Cela dépendra en grande partie de la tenue du marché des fusions-acquisitio­ns de PME au sein de la zone euro. Au premier semestre, il a bondi de 24% en valeur, alors que le marché mondial des M&A ( Mergers and Acquisitio­ns, ou fusions-acquisitio­ns), toutes tailles d'entreprise­s confondues, s'est effondré de 23%, en raison des doutes sur les perspectiv­es de l'économie mondiale. Rien ne dit que cette surperform­ance se poursuivra, compte tenu des incertitud­es que le vote du 23 juin en faveur du Brexit fait planer sur la croissance économique de la zone euro. (*) Source : Prequin

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