Ma rencontre avec France Gall
Marie-Lize Gall, a eu le privilège grâce à son papa François Gall, peintre de renom de rencontrer France Gall, décédée le 7 janvier dernier. MarieLize, résidente à Martel, mais aussi à Paris, nous parle de sa rencontre avec France Gall. Vous avez eu le privilège de rencontrer France Gall ?
Oui, c’était au 8 Villa Brune, une impasse parisienne bruissante d’artistes plasticiens et de musiciens. Mon père, François Gall issu de la 2e École de Paris, préparait le nouveau Salon des Peintres Témoins de leur Temps au Musée Galliera. Le thème de 1967 était « la Chanson ». Célèbre pour la précision de ses portraits, il reprend l’un des croquis de Maurice Chevalier lors de la Semaine Française en Suède, de Brassens son voisin du 14e arrondissement, Ferrat, Ferré… mais se décide pour France Gall applaudie en famille en 1965, pour son prix de l’eurovision de la Chanson. La 2e oeuvre, serait un fusain de son égérie, Edith Piaf.
Comment s’est passée cette première rencontre ?
Très naturelle, à l’aise, comme chez elle. Conduite par ma jeune soeur Elizabeth-Anne, elle s’extasie sur la petite cour verdoyante et le jardinet de fleurs et légumes dans cette maison-atelier achetée à la veuve du peintre Jules- Emile Zingg. Présentations d’usage autour de notre homonymie Gall, une très ancienne parenté ; pour mon père, quelques émigrés en Hongrie lors des guerres de religions, et de son prénom Isabelle, modifié dès 1963 en « France » pour ne pas rivaliser avec celui d’Isabelle Aubret gérée par la même Maison de disques Philips. « France » est alors née un soir où son père soutenait avec une bande de copains l’équipe de rugby française contre celle du pays de Galles.
Comment se déroulaient les séances de pose ?
Amicales, joyeuses. L’artiste n’osait réprimander la jeune fille, comme il le faisait pour nous, elle bougeait, « gazouillait » disait-il aux journalistes et au photographe Keystone qui immortalisa ces moments. Un jour, elle l’appela « Charlemagne », imaginant la barbe de cet homme à l’accent magyar, constellée de fleurettes, aussitôt apportées lors du rendez- vous suivant. Découvrant dans sa Monographie les poèmes de notre mère Eugénie, originaire de Martel dont elle fut longtemps maire adjoint chargée de la Culture, France s’est amusée à fredonner, tout en posant, ceux de Montmartre et Saint-Germain-desPrés. Mais, petit litige quant au choix du vêtement finalement accepté, l’artiste l’ayant préférée en robe mi-longue, car plus « romantique » plutôt qu’en minijupe. Elle n’en parut que plus pétillante, mais tout aussi romantique
Souvenez-vous de vos conversations ?
Sa satisfaction de sécher parfois les cours, pour accompagner son père Robert, lui-même chanteur et parolier, aux lendemains des « premières » de ses camarades… un rêve pour mon frère et moi abordant notre année universitaire. Alors une grande discussion s’ensuivit avec François (comme elle l’avait aussitôt appelé) sur les textes écrits par Robert pour Piaf et Aznavour. Mon père fredonnait souvent « la Mamma » et nous l’appelions « le chant de l’atelier ». France qui avait qui avait suivi des cours de guitare et piano, avait monté un orchestre avec ses deux jeunes frères, et ma soeur et moi, des saynètes de théâtre, nous parlions musique. Elle s’est essayée sur la guitare électrique construite par mon frère Jean- François. Conversations avec Georges Cziffra venu de Senlis, nous conseillant avant nos Concours de piano à la Schola Cantorum.
Elle s’amusait de la similitude de nos vies jusqu’à l’adolescence, marquées par les métiers artistiques de nos parents. Elle fut encouragée dans la voie de la chanson par son père, fin parolier, et sa mère Cécile, fille de Berthier, le cofondateur des Petits Chanteurs à La Croix de Bois. Nous aussi, nous accompagnions nos parents en quelques lieux-dits de travail, parisiens, normands ou quercynois, surtout Martel, pour poser sur le motif.
Qu’est devenu ce portrait ?
Mon père le lui offrit, refusant de le céder à un collectionneur américain. Cette huile sur toile qui avait suscité un vif intérêt, fut représentée en diverses Revues françaises et étrangères, dans les pages de journaux lotois et de « Salut les Copains », tous sensibles au port de tête bien reconnaissable de la chanteuse, et au ton rouge de la robe. Cette fameuse couleur de Gall y éclate sur fond bleu, comme une chanson bien Française.