La Voix du Cantal

Incendie volontaire ou accidentel ?

- *Les prénoms ont volontaire­ment été modifiés. N.G

C’est la question à laquelle devait répondre le tribunal jeudi dernier. En effet, à la barre, Rose* était accusée d’avoir détruit le bien d’autrui par un moyen dangereux. L’histoire se déroule dans la nuit du 3 au 4 janvier 2011 à Saint-Bonnet-de-Condat. Vers 6 heures du matin, les gendarmes de Riom-ès-Montagnes sont prévenus d’un incendie qui s’est déclaré dans une habitation de la commune. Cette maison est en indivision et se compose d’un rez- dechaussée où vit Richard*, un locataire. Le 1er étage appartient à une famille. À la suite de cet incendie, la maison est entièremen­t détruite. Dès lors, un expert intervient pour essayer de déterminer les causes de l’incendie. Dans un premier temps, il est conclu que l’origine serait « accidentel­le » : « le système électrique est vétuste » selon les termes du président du tribunal. Le montant total estimé des dommages s’élève à 350 000 euros et il est proposé au remboursem­ent la somme de 277 000 euros à titre conservato­ire. Dans un second temps, un autre expert mandaté par les propriétai­res intervient sur place. Et là, les conclusion­s divergent. Pour ce dernier, il y a deux foyers de combustion : « la thèse de l’accident est alors écartée. » On retrouve une bonbonne de gaz, qui n’est pas déformée. Lors de l’enquête, aucun des protagonis­tes (propriétai­re ou locataire) ne l’identifie. L’expert conclut alors au caractère volontaire de l’incendie.

Une discussion houleuse sur fond de jalousie ?

Plusieurs mois après l’incendie, l’enquête rebondit dans la mesure où le propriétai­re émet des doutes sur son excompagne, Rose. En effet, la veille de l’incendie, il prétend qu’elle serait venue le voir et que les choses auraient dérapé, il y aurait eu une discussion houleuse sur fond de jalousie. Devant le tribunal, cette dernière nie en bloc ces accusa- tions et donne sa version : « J’ai eu un accident de voiture en 2009. Depuis ce jour-là, je ne conduis plus. À l’époque, je devais faire des travaux dans ma salle de bains, toilettes, au vu de mon nouveau handicap. C’est là que je rencontrai­s Richard qui était plombier. » Ils commencent alors à se fréquenter. « Il voulait que je vienne habiter avec lui, mais je ne voulais pas. Je suis parti m’installer à Mauriac » indique Rose. Puis, elle conteste aussi le fait de l’avoir vue la veille : « c’est faux, je n’y suis pas allé. Et comme j’ai déjà dit, je ne conduis plus, donc je n’ai pu m’y rendre. » Un état de fait contesté par divers témoignage­s qui indiquent avoir vu à plusieurs reprises Rose conduire depuis cet accident. Autre élément qui sème le doute : le soir de cette prétendue altercatio­n, Richard se trouve en compagnie d’une amie à lui dans la maison. Au moment des faits, elle prétend être au téléphone et n’avoir rien vu de cette supposée altercatio­n. Mais elle indique aux gendarmes qu’à son retour, Richard lui explique ce qu’il s’est passé et qu’il se trouve dans un état bizarre, un peu secoué. Incendie volontaire ou accidentel, une énigme bien difficile à trancher. Dans son réquisitoi­re, le procureur de la République le constate : « Comme toujours, je pèse le pour et le contre. Je regarde les éléments à charge et à décharge. Tout d’abord, le système électrique n’était pas que vétuste, il n’était pas aux normes. Et puis, il y a la personnali­té du locataire de cette maison qui a déjà eu affaire à la justice pour une affaire d’incendie d’origine électrique… Cela interroge. Pourquoi, 18 mois après les faits, il dit soupçonner son ex-compagne. » Puis en regardant l’accusée, il rajoute : « Mais il y a aussi des éléments à charge. Des témoins affirment que vous conduisez et vous dites le contraire. Je vous ai observé à l’audience et votre bras est mobile… Il y a aussi cet appel passé sur le portable de Richard à 1 heure du matin, et qui vient de votre téléphone où vous laissez un message. L’incendie a commencé aux alentours de 3 heures du matin, cela peut très bien coïncider avec le temps de route qu’il faut pour aller de votre domicile au sien. » Pour l’avocat de l’accusée, la relaxe est inévitable : « Elle affirme qu’elle lui a prêté sa voiture et lui, Richard, indique le fait qu’il a pris une voiture de location. Mais il n’y a aucune preuve : pas de facture de prêt. Aucun témoin ne peut affirmer qu’il a vu ma cliente le soir des faits. Il n’y a pas de preuve. » Les propriétai­res se sont portées parties civiles dans cette affaire. Pour leur avocat : « les propriétai­res et le locataire n’avaient aucun intérêt à ce que la maison brûle. Aujourd’hui, à l’audience, j’ai constaté de nouvelles échappatoi­res de la part de Rose. » L’affaire a été mise en délibéré pour le 23 juin.

Un coup de fil passé deux heures avant l’incendie…

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L’ affaire a eu lieu en 2011 à Saint-Bonnet-de-Condat.

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