Les Bleus : un destin à accomplir, des doutes à lever
Le jour de voir est enfin arrivé. Accompagnée d’une attente gigantesque, l’équipe de France va lancer le 10 juin, au Stade de France, « son » Euro face à la Roumanie… Pour une équipe de France encore jeune et plutôt inexpérimentée, le poids d’un rendez-vous à la maison n’a rien d’un détail… D’autant que la sélection des Carpates est une vieille connaissance en phase finale. Par le passé, elle a souvent causé des migraines aux joueurs tricolores. Une victoire d’entrée acquise devant la meilleure défense de toutes les équipes européennes qualifiées aurait l’avantage de dégager considérablement l’horizon des Bleus dans un groupe A où l’attendent l’Albanie puis la Suisse, en même temps qu’elle les délesterait d’une partie de la pression qui étouffe, à chaque début de tournoi, le pays organisateur.
Didier Deschamps mise sur la continuité
Fidèle à sa logique, celle de la dynamique de groupe, mais aussi de la vie en collectivité, Didier Deschamps a construit sa liste des 23 sur l’idée d’une continuité sous le maillot bleu. Tout était écrit, enfin presque, car s’il a retenu 14 des mondialistes brésiliens, le sélectionneur a dû composer depuis le coup d’envoi de la saison internationale avec une cascade d’imprévus, entre coups durs (la blessure de Nabil Fekir tenu éloigné des terrains 8 mois) et affaires extra-sportives qui ont poussé trois joueurs- cadres sur la touche : Mathieu Valbuena victime du scandale de la sextape dans laquelle Karim Benzema aurait joué un rôle d’intermédiaire, et Mamadou Sakho dont l’absence a été dictée par son contrôle antidopage positif. Des déboires qui, autant que l’émergence de nouveaux talents (Kanté, Martial, Coman), ont fini par contraindre le technicien Deschamps à revoir ses plans, à redistribuer les cartes et rebâtir son équipe devant.
Garder les pieds sur terre
En chantier depuis des mois, le secteur offensif a étalé une force de frappe inédite contre les Pays-Bas (3-2) et la Russie (4-2). Les intégrations réussies de Payet, Coman et Martial, associées au retour gagnant de Gignac et la nouvelle dimension prise par Griezmann qui s’est imposé comme le leader de l’attaque autorisent les Bleus à croire en leur étoile. Les désigner grand favori serait exagéré car les faiblesses récurrentes entrevues en défense, en particulier sur les coups de pied arrêtés, les invitent à garder les pieds sur terre. Les contre- performances et l’état de forme inquiétant de certains joueurs continuent à poser question. Mathieu est à court de compétition, Sagna et Mangala sortent d’une saison médiocre alors que les doublures Digne et Jallet n’offrent pas toutes les garanties sportives nécessaires. Enfin, le forfait inattendu de Raphaël Va- rane, blessé à la cuisse gauche en toute fin de saison, n’est pas pour rassurer. Pour le remplacer, Didier Deschamps a fait appel à Adil Rami, le défenseur de Séville. Réussiront- ils à élever leur niveau ou à faire mentir la logique sportive qui veut que toutes les grandes compétitions soient remportées par l’équipe la plus hermétique ? Les 23 sauront- ils gérer l’enjeu et la pression d’une compétition à domicile sur la durée ? La réponse à ces questions conditionnera dans les grandes largeurs le rêve de gloire des coéquipiers d’Hugo Lloris, prêts à marcher sur les traces des Bleus de Platini (Euro 84) et de Zidane (Mondial 98), prophètes avant eux dans leur pays.