Une 30ème bis aux anges
Théâtre de rue : retour en images sur quatre jours de fête
Élus, partenaires et association organisatrice ont fait un premier bilan à chaud de la 30e édition bis du Festival international de théâtre de rue d’Aurillac, qui s’est déroulé du 17 au 20 août. Parmi les éléments qui ressortent, une fréquentation normale et une programmation de qualité dans une édition marquée par des violences urbaines, une sombre parenthèse qui laisse un goût amer.
1969 artistes, 386 techniciens, 392 administratifs, 446 professionnels dont 57 étrangers, 345 structures, 115 accréditations presse… La 30e édition bis du Festival international de théâtre de rue d’Aurillac a eu lieu la semaine dernière, sous haute surveillance.
« Combattre la peur va être un chantier d’avenir »
« On avait annoncé qu’on allait y laisser des plumes, on en a laissé, au figuré comme dans la réalité, affirme Jean-Marie Songy, directeur artistique du Festival, faisant allusion aux performances de la compagnie Gratte Ciel qui a conclu cette édition avec poé
sie. Nous n’avons pas perdu de vitesse par rapport à l’an dernier, qui était une édition symbolique et forte. Cette édition a bien résisté à notre état d’esprit de liberté d’expression, d’accessibilité à l’art pour tous. Combattre la peur va être un chantier d’avenir pour la 666e édition qui aura lieu l’année prochaine », conclut-il.
« Je vais porter plainte au nom de la ville d’Aurillac »
Le maire d’Aurillac, qui a salué le contenu de la programmation, est revenu sur la mise en place du dispositif de sécurité
de l’édition 2016 : « Nous avons tous ensemble pris le risque de maintenir le festival. Les attentats de Nice ont bouleversé la donne, il a fallu se poser d’autres questions, alourdir un dispositif en l’espace de trois
semaines avec des dispositions particulières, jamais mises en oeuvre au niveau de la ville. La dernière fois qu’Aurillac avait été barriérée, c’était au Moyen- Âge » , affirme Pierre Mathonnier avant de revenir sur les violences urbaines du
vendredi : « Ces 30 casseurs qui ont jeté un voile noir sur cette édition ne sont pas des festivaliers. Ils ont un objectif : la destruction de notre festival, de ce à quoi l’on croit, la création artistique. Et je regrette aussi qu’une compagnie qui ne fait pas partie du Festival s’associe aussi fortement à ça, c’est une compagnie qui pose problème depuis de nombreuses années. Je vais porter plainte au nom de la ville contre ces casseurs. Il y a eu des dégradations matérielles, mais il y a aussi eu la volonté de faire du mal. Quand on jette des pavés de 3 kg sans se préoccuper de savoir sur qui ça va tomber, ce ne sont pas des intentions acceptables. Ces agissements nous posent question sur la façon dont l’événement doit se poursuivre. Nous défendrons le festival quoiqu’il arrive », affirme le maire. Parmi les autres axes de réflexion envisagés, le maire d’Aurillac souhaiterait canaliser l’arrivée des véhicules lourds durant le Festival : « Nous avons vu arriver beaucoup de véhicules de plus de 3,5 tonnes - plus de 150 sur l’avenue Georges- Pompidou à titre d’exemple - qui interpellent sur la capacité de la ville à accueillir la libre installation. Il faudra trouver une solution. L’année prochaine, nous impo- serons une aire pour que ces véhicules de plus de 3,5 tonnes puissent être garés. Ce n’est pas lié à l’état d’urgence, mais au vivre ensemble. L’idée n’est pas de contraindre, mais de trouver des limites » , conclut Pierre Mathonier.
« C’est un espace de liberté, et il l’est resté »
Le président de la Caba, Jacques Mézard a salué les efforts de tous pour le maintien
de l’événement : « Je crois que le côté positif, c’est que le festival a eu lieu. Il a fallu beaucoup d’efforts pour la réalisation de cette manifestation qui est toujours un exercice d’équilibre. Réaliser ce type de festival sous le régime de l’état d’urgence, ce n’est pas une sinécure. L’état d’urgence est fait pour protéger les citoyens et les artistes. Il y a eu des choses regrettables, mais pas que ça. Les troupes ont pu apporter de la joie, de la distraction aux citoyens et c’est aussi important. Aurillac est un espace de liberté, et il l’est resté. Je tiens à rendre hommage aux forces de sécurité qui doivent être respectées autant que le citoyen. Quand des casques sont fêlés par des pavés, on peut se poser des questions. »
Construire ensemble une réponse pour demain
Enfin, le représentant de l’État a conclu ce premier bilan, en condamnant fermement les faits survenus le troisième jour de cette édition : « Il s’agissait d’un attroupement illégal de personnes qui ont préparé cela. Trente casseurs, c’est ce que l’on
considère être le noyau dur des plus violents, mais malheureusement, ils étaient beaucoup plus nombreux, renforcés par de très nombreux voyous qui se sont livrés à des actes
d’une violence inouïe », insiste Richard Vignon qui déplore
deux choses : « la première, ils se sont attaqués et ont détruit un dispositif de protection Vigipirate alors que l’état d’urgence est décrété dans notre pays, là on touche à quelque chose d’extrêmement grave. Il ne peut pas y avoir un meilleur allié de Daesh. Deuxièmement, des individus se sont livrés à des actes de violence à l’encontre des forces de l’ordre ont subi un déchaînement de haine et de violence alors qu’ils sont là pour protéger les citoyens. Ces actes auraient pu provoquer des blessés graves et je suis aujourd’hui soulagé qu’il n’y ait pas eu de mort. Je salue le professionnalisme et le sang froid des forces de l’ordre qui ont cristallisé en un point fixe les violences, en les attirant sur eux pour éviter que cela ne se déferle ailleurs ». Le préfet déplore néanmoins des blessés dans les rangs des forces
de l’ordre : « Il y a eu 10 blessés chez les gendarmes, 2 chez les policiers et durant le festival, nous avons interpellé 28 personnes, dont 6 au titre des violences urbaines du vendredi qui sont aux mains de la justice. Les enquêtes se poursuivent et j’espère que les images que nous avons à disposition nous permettront de procéder à d’autres interpellations. Si l’on se projette vers l’avenir, nous resterons dans cette logique de tout faire pour que l’expression se poursuive à Aurillac. Je n’ai pour l’heure pas de réponse à donner, nous partageons le bilan et construirons ensemble la réponse à ces difficultés. »