La Voix du Cantal

Le Cantal en manque de médecins

- P. Delobelle

Le rendez-vous est ixé à 13 heures pour suivre Chritian Charles, médecin à Lafeuillad­e-en-Vézie. « Désolée, il est parti sur une urgence, mais il va revenir... C’est un médecin de campagne », sourit sa femme, également médecin, qui se prépare pour se rendre au Conseil départemen­tal participer à la présentati­on de la plaquette qui a vocation à attirer des jeunes médecins dans le Cantal (lire cidessous). Le temps de boire un café, le médecin réapparaît. En consultati­on dans son cabinet installé dans la maison familiale depuis 7 h 45, et après cette urgence à l’extérieur, il se prépare pour partir en tournée et prend quelques minutes pour évoquer son quotidien. « Nous sommes 6 médecins sur le canton (2 à Montsalvy, 2 à Calvinet, 1 à Lacapelle-del-Fraysse, et lui-même, NDLR), ce qui est plutôt bien. Ici, je consulte le matin sans rendez-vous du lundi au samedi. Ensuite, je pars en visite et consulte sur rendez-vous en fin d’aprèsmidi. Puis, de 19 heures à minuit, il y a un système d’astreintes entre les médecins du canton. En dehors de ces horaires, les appels sont réceptionn­és par un médecin régulateur (installé dans les locaux du Samu à Aurillac) qui donne un diagnostic. Ces évolutions nous permettent d’avoir une charge de travail plus confortabl­e », précise le médecin avant de soulever la problémati­que du remplaceme­nt des congés. « C’est quasi impossible de trouver un remplaçant. Cette année, j’ai pris 10 jours de congé en août et j’ai dû fermer le cabinet. Pourquoi ne trouvonsno­us pas de remplaçant­s, et à terme, des successeur­s ? C’est une grande question », poursuit celui qui accueille régulièrem­ent des stagiaires au sein de son cabinet : « Je ne sais pas ce qui effraie les jeunes médecins, les gardes ? Le fait d’exercer seul ? De ne pas être en ville ? Il y a certaineme­nt plusieurs éléments, certains ont envie de se spécialise­r, d’autres souhaitent partir à l’étranger, ou de faire de l’humanitair­e.»

« Il est possible pour un jeune médecin de s’épanouir dans le Cantal »

À la question : « Pourquoi avezvous choisi d’être médecin de campagne ? », il sourit : « C’est une très bonne question !», avant de descendre au garage pour partir en tournée. « Suivez-moi. » Au volant de sa voiture, direction un village avoisinant pour sa première visite. Christian Charles concède : « Je terminais mon service militaire à Auch. Nous envisagion­s, avec ma femme et notre enfant qui était en route, de nous installer. Un jour, je suis rentré dans les locaux d’un journal médical à Toulouse d’où je suis originaire, et j’ai vu une étiquette d’un médecin qui cherchait à céder sa patientèle. Nous sommes arrivés en mars 1985 et suis deve- nu médecin de campagne. » Sillonnant les routes qu’il connaît parfaiteme­nt, Christian Charles analyse le rôle du médecin de campagne : « Historique­ment, il y avait les médecins qui se sont installés après 1939-45, il fallait se retrousser les manches et réparer beaucoup de choses, ils étaient attachés corps et âmes à leurs patients. Ensuite, il y a notre génération qui est solidaire et très attachée aux relations avec les patients. J’ai l’impression que les jeunes sont attirés par une médecine fonctionna­risée, et il n’y a pas que les médecins, c’est un problème sociétal. On a l’impression que les choses s’aggravent et l’on ne peut rien faire. » À son sens, la plaquette présentée en début de semaine au Conseil départemen­tal peutêtre utile, mais il n’attend pas de miracle : « Je trouve que c’est bien de faire une plaquette avec les atouts du Cantal pour attirer les jeunes médecins, mais il faut surtout travailler (rires). Les jeunes que j’ai formés ici et que j’accueille encore m’apprennent énormément. Ils sortent d’école et sont très bien formés. Je regrette simplement qu’il n’y ait pas plus de solidarité entre les anciens médecins qui ont fait beaucoup d’efforts pour former et à qui on laisse notre patientèle, et les jeunes médecins qui n’ont pas beaucoup de répondant. Le Cantal est intéressan­t et il est possible pour un jeune médecin de s’épanouir sur le plan biomédical. C’est une très bonne école. » La dernière visite de ce début d’après-midi se déroule à Aurillac : « J’ai quelques patients d’ici qui sont à Aurillac maintenant, je continue d’aller en consultati­on sur place. Chez eux, il y a des choses que l’on ne peut pas voir au cabinet comme leur environnem­ent, et ça a son importance. J’aime beaucoup ces moments, ils sont indispensa­bles », conclut-il avant de reprendre le chemin de son cabinet pour les consultati­ons, toujours avec un large sourire .

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 ??  ?? Le docteur Christian Charles aime échanger avec ses patients lors des visites. © P. Delobelle.
Le docteur Christian Charles aime échanger avec ses patients lors des visites. © P. Delobelle.

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