Nouveau rebondissement dans l’affaire Grégory
Plus de 32 ans après la mort du petit Grégory, dont le corps fut retrouvé pieds et poings liés dans la Vologne, l’enquête criminelle connaît un nouveau rebondissement. Le grand-oncle et la grande-tante de l’enfant sont mis en examen.
Ses yeux vifs, son sourire timide, ses joues rondelettes et ses cheveux légèrement bouclés sont à jamais ancrés dans les mémoires. A la une de tous les journaux à l’automne 1984, le portrait de ce petit garçon ressurgit régulièrement dans les médias. Car plus de 32 ans après, son assassinat n’est toujours pas élucidé. Rappel des faits : Le 16 octobre 1984, le corps ligoté de Grégory Villemin, âgé de 4 ans, est retrouvé dans les eaux de la Vologne, à 6 kilomètres du domicile familial situé à Lépanges-sur-Vologne (photo). L’autopsie révèlera qu’il a été jeté vivant dans la rivière vosgienne. « C’est le début d’une affaire hors-norme. Un juge débutant et buté, une guérilla des képis, une enquête menée en dépit du bon sens, des dérapages médiatiques quasi-quotidiens » , écrit L’Est Républicain. En effet, dès le lendemain du crime, les parents du petit Grégory, Christine et Jean-Marie, reçoivent une lettre anonyme : « J’espère que tu mourras de chagrin, le chef. Ce n’est pas ton argent qui pourra te redonner ton fils. Voilà ma ven
geance, pauvre con ! » Le couple révèle alors qu’il est harcelé par un « corbeau » depuis trois ans par courrier et téléphone. Suite aux premières analyses graphologiques, l’enquête s’oriente vers Bernard Laroche, cousin de Jean-Marie Villemin. Sa belle-soeur, Murielle Bolle, lui fournit un alibi, puis déclare avoir menti. Laroche est inculpé pour assassinat et écroué mais libéré en février 1985, après une nouvelle déclaration de la jeune Murielle qui l’innocente. Peu après, Jean-Marie Villemin tue d’un coup de fusil son cousin dont il est convaincu de la culpabilité. En parallèle, Christine Villemin est soupçonnée d’être le corbeau. Bien qu’enceinte, elle est incarcérée puis libérée au bout de 11 jours. Elle bénéficiera d’un non-lieu en 1993. Quelques mois plus tard, son mari sera condamné à 5 ans de prison. L’enquête est ensuite rouverte en 2000 puis 2008 pour des recherches de Courriers et enlèvement indissociables L’enquête rebondit une nouvelle fois aujourd’hui. 32 ans après, comment estce possible ? D’abord parce que le délai de prescription n’est pas atteint. Plus long lorsque le crime est commis sur un mineur, il a été repoussé à plusieurs reprises par la réouverture du dossier en 2000 et 2008. Ensuite, en raison de l’évolution des méthodes d’enquête et des techniques de la police scientifique, à l’aide d’un nouveau logiciel surpuissant et en matière d’études graphologiques. De nouvelles découvertes sont désormais possibles et la mise en perspective des pièces figurant dans les dossiers complexes est plus facile à réaliser qu’auparavant. Les investigations peuvent ainsi se poursuivre. Dans l’affaire Villemin, elles se concentrent encore sur le cercle familial miné par les jalousies. Le procureur général de Dijon, Jean-Jacques Bosc, fait état de nouvelles expertises en écriture
« confondantes » à l’égard de Jacqueline Jacob, épouse de Marcel Jacob, le grandoncle de Grégory (frère de Monique Villemin, sa grand-mère). Le couple était
proche de Bernard Laroche. Au moins une des trois lettres anonymes de menaces datant de 1983 aurait été rédigée par
la grande-tante de l’enfant. « Les liens sont indissociables entre les trois lettres anonymes, le courrier posté la veille de l’assassinat et l’enlèvement de Grégory. Nous savons qu’il y a un double corbeau, un homme et une femme. Il existe des similitudes dans les termes du courrier et des appels téléphoniques » , affirme le procureur en faisant notamment référence au mot « chef » qui aurait été utilisé par Marcel Jacob, lors d’une dispute avec Jean-Marie Villemin en 1982. « Grégory a été enlevé du domicile de ses parents, il a été séquestré et retenu pendant un certain temps jusqu’à sa mort. Les auteurs qui ont participé à cet enlèvement sont les auteurs du crime, sans qu’on sache qui a tué l’enfant » , poursuit Jean-Jacques Bosc. Jacqueline et Marcel Jacob sont mis en examen pour « enlèvement suivi de la mort du mineur Grégory Villemin » . Niant toute participation aux faits reprochés , le couple est placé en détention provisoire afin « d’empêcher une concertation frauduleuse et toute forme de pression entre les protagonistes de nature à nuire à l’efficacité des investigations à venir. »