Max Gallo, laïque républicain converti à 69 ans
Écrivain, homme politique, il s’est éteint le 19 juillet 2017 à 85 ans. Ce catholique convaincu est revenu à la foi en 2001. « Le message du Christ est tout à la fois un message d’amour et de fraternité et un appel à la responsabilité individuelle. Il invite chacun de nous à choisir d’être Judas ou Pierre » écrivait le 16 décembre 2010, l’académicien dans le journal catholique Prier. On pourrait s’étonner : comment le laïque républicain que nous connaissions, a-t-il porté intérêt à la question religieuse et à Dieu lui-même ?
Un historien qui aimait la France
Max Gallo, fils d’immigrés italiens, né à Nice en 1932, vit son enfance à travers la seconde guerre mondiale. Son père, Résistant, n’avait pas mis son entourage dans la confidence. Le fils assiste donc, en spectateur à l’Occupation des Allemands et à la Libération de Nice. Pareils témoignages de vie lui donneront très tôt la fibre patriotique et la passion de la République.
Il prépare un CAP de mécanicien ajusteur, mais c’est l’histoire qui le captive. Il reprend les études : Baccalauréat, Agrégation d’Histoire et devient professeur au lycée Massena, puis jusqu’en 1970 à Sciences Po Paris. Pour lui, se détacher de ses racines a été la chose la plus difficile, comme il le confiera au Point : « Quels prix faut-il payer pour s’arracher aux déterminismes sociaux et culturels ? »
Loin de la Côte d’Azur, il travaille avec des ressources historiques, en complétant son écriture de façon romanesque, en y ajoutant son expérience personnelle et ses sentiments. Rapidement ses « romans histoire » feront son succès (»La Baie des Anges »), des biographies (Robespierre, Jaurès, Victor Hugo, Napoléon, le général de Gaulle) dans lesquelles il manifeste son intention de faire aimer la France à la jeunesse.
Homme politique engagé
Fervent militant communiste dans sa jeunesse, il s’éloignera du parti à la mort de Staline, puis adhère en 1981, au Parti Socialiste. L’écrivain ne fait pas que disserter, il s’investit : Il est candidat aux élections municipales de Nice mais échoue. Il devient quelques mois plus tard, député des Alpes Maritimes. Puis secrétaire d’État de François Mitterrand en 1983 et porte-parole du gouvernement.
En 1984, il est élu député européen et le restera pendant dix ans.
Prenant ensuite ses distances avec la gauche, il sera le grand pourfendeur de « la repentance » et soutiendra le candidat Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle 2007.
En mai 2008, il est élu au fau- teuil de son ami, Jean-François Revel, à l’Académie Française. Il annonce lui-même en mai 2015, au moment de la parution de son dernier roman « Dieu le veut » qu’il souffre de la maladie de Parkinson, manifestant doutes et interrogations : « Nous avons toujours la liberté d’en finir avec nous-mêmes » déclare-il alors.
Culpabilisé par le décès de sa fille à 16 ans
Son retour vers Dieu se fait en deux étapes séparées de prés de trente ans. La première tragique, remonte en 1972, au suicide de sa fille, âgée de 16 ans. « Rempli de culpabilité et dévasté », il racontera plus tard s’être alors rué dans la première église rencontrée en l’occurrence Saint Sulpice. Tombant à genoux, les prières qu’ils avaient apprises dans son enfance sortent presque spontanément de sa bouche. La conviction de l’existence de Dieu s’empare de lui. C’est une certitude : « Il y a du divin dans chaque homme ». Pourtant peu après cette révélation, l’auteur se sent à jamais blessé par ce deuil dont toujours il se sent responsable et veut faire sortir Dieu de son esprit.
La conversion : « quelque chose bougeait en moi »
En publiant en 2002, « Les Chrétiens », le républicain Max Gallo souhaite participer à la refondation de « la nation française dans tous ses aspects ». Depuis longtemps, il sait que « la naissance de la chrétienté en France fut une période décisive pour la construction de la communauté nationale. Et mon souci de citoyen, c’est de recoudre cette réalité-là. » En somme de réconcilier la République laïque et la communauté des chrétiens de France en racontant les vies de Clovis, saint Martin ou saint Bernard. « Je crois que le catholicisme a joué un rôle décisif dans la genèse de l’histoire de France. Pour moi, le baptême de Clovis représente en même temps l’ori- gine de la laïcité, avec la séparation entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique ».
Pourquoi en 2002 ? « Parce que quelque chose bougeait en moi » confie l’écrivain.
On ne saurait parler de brutale conversion comme celle de Paul Claudel, près du pilier de la cathédrale Notre Dame de Paris, mais Max Gallo a toujours été habité par l’idée de Dieu.
La seconde étape de sa conversion aura lieu à l’occasion du baptême du fils d’un couple ami, le 22 octobre 2001, à l’église Saint-Sulpice à Paris. Il voit le temps « venu de renouer les fils à l’intérieur de soi ». Pour lui et « pour les autres ». Les paroles du dominicain qui officie lors du sacrement de l’enfant, lui vont droit au coeur. Bouleversé, les yeux remplis de larmes, il s’éloigne de l’assistance pour faire face à ce choc spirituel. Le prêtre, à la fin de la cérémonie vient le rejoindre. Les deux hommes conversent jusqu’à la tombée de la nuit. Puis tous les deux tombent à genoux et Max Gallo se met à prier pour la première fois depuis la mort de Mathilde. La foi ne le quittera plus.
« Il y a du divin dans chaque Homme »
De Max Gallo, que retiendrat-on ? L’historien, le journaliste, le romancier, l’homme politique, l’académicien, le catholique ? Catholique de formation, élevé dans une famille non- pratiquante, (seule sa grand-mère italienne allait régulièrement à la messe), sa vie fut longtemps éloignée de Dieu.
C’est après 2001 qu’il reconnaît que « Si la mort clôt le chapitre de la vie, elle ne peut pas tout clore ». Ajoutant qu’il se dit lui-même « croyant convaincu, refusant à admettre que la vie, avec toute charge d’affectivité que l’on donne et que l’on reçoit, puisse être brusquement annihilée par la mort ». (25 octobre 2002 à France Catholique).