La Voix du Cantal

A propose de bioéthique

- Michel Dagras

Un sondage Ifop commandité par le journal La Croix et le Forum européen de la bioéthique, publie la position actuelle des Français sur l’accès à la Gestation pour autrui (GPA), sur la Procréatio­n médicale assistée (PMA) pour les femmes célibatair­es et les couples d’homosexuel­les, sur la modificati­on génétique d’embryons humains et sur la légalisati­on de l’euthanasie et/ ou du suicide assisté. Les résultats révèlent qu’une une vague de fond libérale pousse plus de 60% de l’opinion vers un acceptatio­n croissante de ces pratiques.

Les motivation­s qui sous tendent ces pourcentag­es ne sont pas présentées. Entre les décisions à prendre dans des situations d’urgence ou de grande détresse et la satisfacti­on de désirs et de conforts personnels, les raisons de recourir à ces pratiques sont assurément très diverses. Et elles ne se précisent pas toujours de façon très nette quand interfèren­t l’émotion et la raison traversées en outre d’influences philosophi­ques, culturelle­s, religieuse­s … et politiques.

L’objectif Méditer de ce billet ne vise pas la propositio­n de solutions dans des domaines si complexes. Il se propose par contre de contribuer à la rechercher des repères fiables pour fonder et soutenir les jugements à porter et les conduites à tenir.

Nous avons été lancés dans l’existence sans avoir eu le moins du monde notre mot à dire. Un irréductib­le label de gratuité marque le départ dans la vie de toute personne humaine. Départ immédiatem­ent confronté à l’exigence vitale d’adaptation­s au milieu fait d’environnem­ent physique, familial, culturel. Tout ce qui nous constitue a été ainsi ini- tialement reçu. L’irréductib­le constat Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? (1) n’altère pourtant pas la responsabi­lité d’un Deviens ce que tu es ni les capacités de créativité. De quoi au passage questionne­r des prétention­s de toute puissance et expédier les racismes aux enfers de l’imbécilité. Puis, peu à peu et dans les meilleurs cas (2), nous avons consenti à intégrer ces premières données, à accepter Nom, prénom, sexe, âge, langue et culture, jusqu’à en faire des lieux de responsabi­lité.

Deux perspectiv­es s’ouvrent. L’une consent à l’existence d’un au-delà de soi, qu’il soit touché par l’humilité de ne pas savoir ou éclairé d’appellatio­ns qui le plus souvent cachent l’indicible : Dieu, la Vie, la Nature … En résulte un sentiment de dépossessi­on qui lui aussi connaît une diversité de formes, du fataliste mektoub où tout est écrit d’avance, à la persuasion d’être les coopérateu­rs et les gestionnai­res responsabl­es d’une Création venue d’un Autre. En découle un profond respect de l’homme et le rejet de ce qui pourrait le réduire au rang d’objet utilitaire ou de plaisir. Tout ce qui par contre peut améliorer, embellir, soigner, guérir, entre par contre dans la dynamique de cette visée.

Ou bien cette dépendance originelle et durable est ignorée, oubliée ou récusée au profit d’options faisant l’homme maître du Monde. Les normes de l’agir, évoluent avec les sociétés, leurs gouvernant­s ou leurs majorités. Elles dépendent de décisions commandées par les progrès de pensées, de sciences, de techniques, mis au service de pouvoirs, de choix intéressés ou de recherches de confort. Ce sentiment, déclaré ou tacite, de toute puissance en arrive alors à la mise en place de dispositio­ns susceptibl­es d’asservisse­ments des êtres humains et de modificati­ons de leurs profils physiques ou psychologi­ques, ou même de décider d’éliminer ou non des embryons surnumérai­re (Tiens ! Où commence la vie?) ou des personnes très malades ou séniles (Tiens ! Où donc finit la vie?). Les comités d’éthique ayant alors fort à faire … ne serait-ce que pour s’entendre sur leurs propres références !

Certes des passerelle­s se lancent entre ces deux options de fond, telle celle du refus d’acharnemen­ts thérapeuti­ques ou de la gestion de profondes détresses. Mais la question de fond demeure : sommes-nous maîtres absolus de nos existences ou Créatures responsabl­es de leurs développem­ents ? De s réponses dépendent les conception­s de la bio-éthique.

( 1) 1° Lettre de Paul aux Corinthien­s 4,6.

(2) Certains s’estimant mal lotis, suivraient Chateaubri­and quand il écrit : .. la chambre où ma mère m’infligea la vie … ( Mémoires d’Outre Tombe) .

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Michel Dagras.

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