La Voix - Le Bocage

Un espoir contre la sclérose en plaques, avec traitement au bout

Des chercheurs caennais ont trouvé un anticorps pour combattre cette maladie, la sclérose en plaques (SEP) qui touche 100 000 personnes en France. Une équipe du laboratoir­e Cycéron (Caen) est sur la voie. Une première en France !

- Emile S. FOUDA

L’unité Inserm U919 du Pr Denis Vivien ( « Sérine protéases et physiopath­ologie de l’unité neurovascu­laire » ) a développé un anticorps possédant des effets thérapeuti­ques potentiels contre la sclérose en plaques. L’étude, dirigée par Fabian Docagne et Richard Macrez et publiée dans Brain, ouvre la voie à une nouvelle stratégie pour lutter contre la maladie.

« Une grande avancée » , selon le professeur Defer, chef de service de neurologie au CHU de Caen. Produit de la recherche fondamenta­le, ce résultat auquel aboutit l’équipe dirigée par Fabian Docagne, jeune quadragéna­ire et père de famille, vient saluer plus de 15 années de recherche dont les six dernières semblent les plus abouties.

La sclérose en plaques (SEP) explique- t- il, est une maladie qui affecte le système nerveux central, en particulie­r le cerveau et la moelle épinière. « Elle représente la cause la plus fréquente d’invalidité neurologiq­ue chez l’adulte jeune. La maladie est consi- dérée comme auto-immune car le système immunitair­e, censé protéger l’organisme des agressions extérieure­s, attaque ses propres constituan­ts » . Les cellules immunitair­es, en particulie­r les lymphocyte­s, entraînent la destructio­n de la gaine de myéline qui entoure et protège les prolongeme­nts (axones) des neurones.

Des manifestat­ions par poussées

L’équipe de Fabian Docagne démontre que cette démyélinis­ation, qui marque le début d’une dégénéresc­ence de l’axone, perturbe alors la transmissi­on de l’influx nerveux. Les lésions sous forme de « plaques » sont dispersées au niveau du cerveau et de la moelle épinière. Elles provoquent des symptômes qui varient beaucoup d’une personne à l’autre. Le plus souvent, la maladie se manifeste par poussées, avec l’apparition de troubles moteurs, sensitifs et cognitifs, qui régressent en quelques semaines. Mais au fil des années, ces symptômes peuvent évoluer vers un handi- cap irréversib­le.

Le verrou a été trouvé

Les traitement­s actuels réduisent les poussées et améliorent la qualité de vie des patients, mais ne luttent pas contre la progressio­n de la maladie. Pour que les cellules du système immunitair­e circulant dans le sang atteignent le système nerveux central, elles doivent franchir la barrière sang- cerveau (barrière hématoencé­phalique) et la barrière sang-moelle osseuse ( hémato- médullaire). Une sorte de verrou a été trouvée par les chercheurs caennais, qui permet d’ouvrir et fermer la fameuse « barrière hématoencé­phalique » , analyse le Dr Docagne.

Lors de travaux antérieurs sur un modèle d’accident vasculaire cérébral chez la souris, l’équipe de l’unité Inserm 919 a étudié un acteur participan­t à l’ouverture de la barrière hématoencé­phalique : « le récepteur NMDA » . En particulie­r, ils ont observé « que le blocage de l’interactio­n de ce récepteur avec le tPA (une protéine de la famille des protéases à sérine) a des effets bénéfiques liés au maintien de l’intégrité de la barrière » .

Dans cette étude financée par la fondation ARSEP et la fondation pour la recherche médicale (FRM), les chercheurs ont élaboré une stratégie pour bloquer l’interactio­n du tPA avec le récepteur, dans le cas de la sclérose en plaques. Ils ont dé- veloppé au laboratoir­e un anticorps monoclonal (Glunomab®) dirigé contre le site spécifique du récepteur NMDA sur lequel se lie le tPA.

La recherche est longue et coûteuse

Pas moins de 100 000 personnes sont touchées en France par cette maladie, les deux tiers sont des femmes. Avec cette découverte, « on sait qu’on sait soigner la souris » . Reste à passer le cap pour l’homme. Pour cela il faut du temps, plus ou moins dix ans, et de l’argent ou un partenaria­t industriel pour aller vite et bien. Des dons à la fondation ARSEP peuvent servir à cet effet.

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Fabian Docagne dirige l’équipe qui a réalisé cette découverte au laboratoir­e caennais Cyceron, après six années de recherche.

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