La Voix - Le Bocage

Alain Bihel raconte l’histoire de 8 000 ouvriers fougerais jetés à la rue !

- « Les Poings serrés - Fougères 1906-1907 » de Alain Bihel. Préface de Jean Herisset, responsabl­e des archives municipale­s à la mairie de Fougères. Prix : 16 €. Le livre est vendu par souscripti­on chez l’auteur. abihel@orange. fr Tél. 06 08 93 02 06.

Alain Bihel a enseigné les Lettres classiques ainsi que l’analyse filmique et l’écriture cinématogr­aphique au lycée MarieCurie de Vire entre 1976 et 2007. Passionné d’histoire, il publie un livre qui rend hommage aux ouvriers des usines de chaussures de Fougères, qui ont mené une grève très dure, lors de l’hiver 1906-1907.

La mère d’Alain Bihel était fille d’un coupeur et d’une piqueuse en chaussures. Elle est née à Fougères, quelques semaines avant le début de la grande grève de 1906, qui mit 8 000 chaussonni­ers à la rue. Alain Bihel promit à sa mère d’en faire le récit. Serment accompli !

« Ce n’est pas un livre d’historien, mais une chronique romancée, à partir de faits réels » , prévient-il. N’empêche, il a compulsé un nombre incalculab­le d’archives municipale­s et de journaux de l’époque.

Le livre s’ouvre sur une réunion des patrons de l’industrie de la chaussure à Fougères, qui font face à une demande d’augmentati­on de salaire de leurs ouvriers.

« En réaction, les patrons organisent un lock- out, c’est-à-dire qu’ils ferment les usines. Résultat : 8 000 salariés se retrouvent sur le sable. Sans aucun revenu. »

Soupes communiste­s

La grève sera longue : du 11 novembre 1906 au 10 février 1907. Cela pose de graves problèmes aux familles. Comment y répondre ? « Des soupes communiste­s s’organisent avec le secours des bourses du travail et des fédération­s syndicales. Elles sont distribuée­s gratuiteme­nt aux ouvriers grévistes » , explique l’auteur.

Par solidarité, et pour soulager les ménages, les enfants d’ouvriers sont accueillis dans des familles à Rennes, Morlaix, Saint-Nazaire, etc. L’auteur raconte la formidable épopée de plusieurs dizaines d’enfants fougerais débarquant dans la capitale, après avoir pris le train en chantant l’Internatio­nale ! « 54 listes de souscripti­on sont également parues dans l’Humanité récoltant 54 000 francs au profit des grévistes. » La mythique actrice, Sarah Bernardt, répondant à une demande de L’Union des syndicats de la Seine, organisa même un gala pour les petits Fougerais !

Condition ouvrière

Au terme d’une longue grève de 3 mois, les discussion­s ont permis d’aboutir à un accord sur un certain réajusteme­nt des salaires. Mais, le 10 février 1907, gros coup de tabac ! Un ouvrier non- gréviste tue un gréviste, dans un bistrot. C’est à travers l’autopsie de la victime qu’Alain Bihel relate le meurtre, le procès et la condamnati­on du coupable. Malgré cela, les ouvriers ont repris le travail le 11 février 1907.

Le dernier chapitre est consacré à l’inaugurati­on, le 15 août 1908, de la Maison du peuple à Fougères construite par les ouvriers à partir de 1903.

Le récit permet également d’évoquer la condition ouvrière au début du XXe siècle. Mais aussi l’émancipati­on féminine, avec une allusion aux premières femmes cochères, qui firent leur apparition dans les rues de la capitale en février 1907…

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