Une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes !
« La Ville ouverte » de Samuel Gallet, mise en scène de Jean-Pierre Baro, associe trois théâtres pour une création au sein de leur territoire respectif. Les Scène du Jura ; la Comédie de Saint-Étienne, Centre dramatique national ; le Préau, Centre dramatique régional de Vire. Les représentations, à Vire, auront lieu les 22 et 23 mars.
La pièce « La Ville ouverte » de Samuel Gallet prend le risque de confronter le théâtre à la société contemporaine. C’est aussi une mise à jour du principal ressort du travail de l’imagination : le rêve. Un thème majeur dans l’oeuvre du dramaturge. « Quels rêves faisons- nous ? Qu’ils soient diurnes ou nocturnes ? Endormis ou éveillés ? Avonsnous encore des rêves en com
mun ? » interroge-t-il. Pour lui, les rêves ne parlent pas que de notre intimité la plus stricte. « Ils évoquent quelque chose du monde. »
Épée de Damoclès
« La Ville ouverte parle de 3 femmes qui estiment que leur vie professionnelle et sentimentale est dans une impasse » , indique le metteur en scène Jean- Pierre
Baro. « Je ne comprends pas mon époque » , dit l’une. « Je ne suis pas au bon endroit dans ma vie » , dit l’autre. « Je rêve d’une autre vie et je m’endors » , dit la troisième.
Un fait marquant : elles ne se connaissent pas. Plus singulier encore : elles vont, justement, se rencontrer dans un rêve qu’elles
détiennent en commun. « Elles ont aussi le sentiment de vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête » , ajoute
le metteur en scène. « Elles vont alors s’organiser pour commettre l’assassinat d’un tyran : le tyran de Syracuse. »
Du possible
C’est là où le mythe rejoint la réalité. Le mythe antique, naguère appréhendé par les Cocteau, Giraudoux ou Sartre, mais revisité d’une manière novatrice par Samuel Gallet. « L’imaginaire exprime un désir d’émancipation. Il s’agit de façonner du possible au travers du rêve. C’est précisément ce dont il est question dans ce texte » , souligne le metteur en scène.
Différents registres de langue
Samuel Gallet brouille les frontières entre le mythe et l’actualité, d’où les difficultés de mise en scène. « Mais, j’adore avoir des obstacles à surmon
ter ! » lâche Jean-Pierre Baro. Il faut tenir compte également du type d’écriture de Samuel Gallet. Le rythme, les sonorités, les figures de style nécessitent un décryptage minutieux. « On jongle entre différents registres de langue et tout un système d’échos entre le réel et l’imaginaire. Ça rend un peu fou. Mais c’est superbe ! » s’exclame le trio de comédiennes : Aurélie Edeline, comédienne permanente du théâtre du Préau ; Sabine Moindrot et Camille Roy.
Devenir créatif
« Comment continuer à exprimer ce qui peut venir nous arracher au sentiment catastrophique qui semble aujourd’hui dominer ? Comme si le pire était absolument certain ? » se demande Samuel Gallet. Au début dit-il : « Les choses commencent toujours par un détail. Naissent d’un détail. De rien. Que personne ne remarque au début. Un mur qui s’effrite. Une fissure sur une vitre. » Mais, d’un optimisme fitzgeraldien, il soutient que d’un processus de destruction va jaillir un devenir créatif. « On devrait pouvoir comprendre que les choses sont sans espoir, et cependant être décidé à les changer » , affirme l’écrivain Francis Scott Fitzgerald.