Lésée, la commune se retourne contre l’Etat
Tribunal.
Le ministère de l’Intérieur a fait appel mardi 9 mai à Nantes du jugement rendu en sa défaveur en mars dernier par le tribunal administratif de Caen, dans le litige qui l’oppose à la commune nouvelle de Tinchebray-Bocage.
Les juges caennais avaient en effet ordonné à la préfète de l’Orne de réexaminer le montant de la Dotation de solidarité rurale (DSR) de Tinchebray-Bocage, une aide attribuée à certaines communes rurales pour « tenir compte des charges qu’ils supportent pour contribuer au maintien de la vie sociale et de l’insuffisance de leurs ressources fiscales » .
La préfecture de l’Orne avait également été sommée de revoir sa copie concernant la Dotation nationale de péréquation (DNP) de la collectivité, un autre fonds destiné à aider les communes les plus en difficulté.
Les subventions plafonnées
Tinchebray-Bocage - créée le 1er janvier 2015 suite au rapprochement de Tinchebray, Beauchêne, Frênes, Larchamp, Saint-Cornier-desLandes, Saint-Jean-des-Bois et Yvrandes - avait en effet eu la désagréable surprise de voir ses subventions plafonnées. Pourtant, des « garanties de ressources » avaient été promises aux communes nouvelles pendant les trois années qui suivent leur création pour qu’elles touchent au moins autant d’argent que par le passé.
Entre-temps, un décret ministériel avait toutefois instauré un « encadrement » de ces aides publiques : si leurs montants ne pouvaient pas descendre au-dessous d’un certain seuil, ils ne pouvaient pas non plus dépasser un certain plafond. Certaines communes nouvelles, comme Tinchebray-Bocage, s’étaient donc retrouvées « pénalisées » : elles touchaient moins que ce qu’auraient perçu individuellement ses anciennes communes…
Un enjeu « important »
Mardi, à l’audience, le rapporteur public a préconisé pour sa part de désavouer le ministère de l’Intérieur sur la seule année 2015. Pour ce seul motif, il a suggéré en conséquence de condamner l’Etat à verser 1 500 € à la commune nouvelle pour ses frais de justice. En revanche, pour les années suivantes, le magistrat - dont les avis sont souvent suivis par les juges - a confirmé que la préfecture de l’Orne était en droit d’appliquer un plafond.
De son côté, l’avocat de TinchebrayBocage a confirmé que l’enjeu était « important » pour les finances de la commune nouvelle, les sommes en jeu étant « assez conséquentes » . Il a aussi insisté sur la mise à la charge de l’Etat de frais de justice : la préfecture « traîne les pieds » dans ce dossier, selon lui. Elle n’a toujours pas appliqué le jugement rendu en sa défaveur par le tribunal administratif de Caen, alors que l’appel devant les juges nantais n’était pourtant pas suspensif.
La cour administrative d’appel de Nantes, qui a mis sa décision en délibéré, rendra son arrêt dans les semaines à venir.