Ils ont sauvé deux enfants juifs de la barbarie nazie
Émile et Germaine Charpentier ont été reconnus comme Justes parmi les Nations par Israël en août dernier. Leur commune leur rendra à son tour un hommage posthume, ce 19 juin, en présence notamment d’Henri et Madeleine, les enfants qu’ils ont cachés.
Ce dimanche 19 juin sera un jour à marquer d’une pierre blanche pour Gargenville. Après une reconnaissance officielle du statut de Justes parmi les Nations par l’État d’Israël prononcée le 18 août 2015, c’est au tour de la commune de rendre hommage à l’engagement de Germaine et Émile Charpentier. Le couple a hébergé deux enfants juifs pendant plus de deux ans durant la Seconde Guerre mondiale. Leur courage a permis de sauver la vie d’Henri Konsens, âgé de 5 ans à son arrivée, et de sa cousine Madeleine Abramovitch, 3 ans.
En 1942, le nombre d’exactions contre les Juifs ne cesse de prendre de l’ampleur, notamment en France. Pour protéger son fils, Dwojra Konsens, originaire de Pologne, le confie au couple Charpentier par l’intermédiaire d’un réseau de résistance communiste. Henri échappe à la barbarie nazie avant d’être récupéré par sa mère à l’hiver 1943. Elle aura de son côté survécu à la sinistre rafle du Vél’ d’Hiv’ de juillet 1942 et au camp de Drancy grâce à un membre de sa famille, photographe réputé auprès des officiers du Reich. Son mari, lui, n’aura pas cette chance…
Ce n’est qu’en 2012 que Didier Charpentier apprend l’histoire de ses grands-parents, lorsqu’il rencontre Henri Konsens grâce à un ami commun. Le couple n’en avait jamais parlé. Henri, médecin ORL à la retraite, est en train de constituer un dossier pour faire reconnaître les Charpentier comme Justes. Commence alors pour Didier la découverte d’un nouveau chapitre de son histoire de famille, dont il est
celui de ses
« fier », héroïques ». « ancêtres
Émile Charpentier, né en 1898 à Gargenville, a épousé Germaine Fouque en 1919 à Drocourt. Née en 1899 à Oinville-sur-Montcient, la jeune femme a d’abord été fiancée au frère d’Émile, Louis. Ce dernier a été tué sur le champ de bataille le 23 juillet 1918, dans l’Aisne.
« Après la mort de Louis, mes grands-parents ont dû ressentir de la rancoeur envers les Allemands,
À mon avis, c’est ce qui les a motivés à cacher des
en 1946. pense Didier, né
Juifs. Pour eux, c’était comme une vengeance. »
Lorsqu’Henri est recueilli par les Charpentier à Gargenville, dans une maison de ville sise aujourd’hui au 24 rue de la division Leclerc, il est rapidement envoyé chez le curé de la commune, Maurice Lepilleur. L’homme d’église apprend à l’enfant les prières catholiques et lui délivre même un faux certificat de baptême. Si Henri va à l’école comme les autres enfants, il n’est cependant pas autorisé à jouer avec ses camarades dans la rue. Mesure de protection oblige. Didier explique qu’«
il y avait des Allemands hébergés en ville. Il y avait aussi une milice française qui recensait et livrait les Juifs. »
De la personnalité de son grand-père, plombier couvreur et décédé en 1981, Didier retient un Quant à sa grand-mère, cultivatrice, qui avait perdu l’esprit sur la fin de sa vie (1976), il n’en garde que très peu de souvenirs.
Jamais, cependant, il ne se serait douté qu’ils aient pu cacher des Juifs.
« brave bonhomme ».
« Au travers de mes grands-parents, ce sont tous ceux qui ont résisté au nazisme à Gargenville qui sont reconnus comme Justes. »
Émile et Germaine Charpentier sont en effet les premiers Justes identifiés à Gargenville. D’après plusieurs témoignages et documents d’époque, on sait pourtant que plusieurs enfants juifs ont été cachés dans la commune.
« Fier que mes ancêtres soient des héros » 3 925 Justes en France
Lors de la cérémonie de ce dimanche 19 juin, Didier et sa soeur Jocelyne recevront le diplôme et la médaille des Justes pour leurs grands-parents à titre posthume, décernés par l’État d’Israël. À ce jour, on compte 3 925 Justes de France, dont 644 en Ile-de-France. Le nom du couple Charpentier sera inscrit au mémorial de Yad Vashem et dans l’allée des Justes à Jérusalem, mais aussi dans l’allée des Justes de France à Paris, dans le quartier du Marais. De cette histoire, Didier retient surtout un symbole : des enfants juifs pris en charge par un réseau communiste, un homme d’église et un couple catholique…