L’enfer des voisins d’un « Diogène »
Au centre du village, plusieurs habitants vivent à côté d’un homme atteint du syndrome de Diogène, un trouble du comportement. Ils respirent depuis plus de deux ans des odeurs pestilentielles et ne savent plus à qui s’adresser pour mettre fin à ces nuisan
Lorsqu’il a acheté sa maison au coeur du village, le musicien et compositeur Alain Daniel pensait avoir déniché un petit coin de paradis. Un lieu idéal pour travailler.
Au bout de quelques mois, sa vie a pourtant tourné au cauchemar. « Je me réveillais la nuit en nage avec des odeurs désagréables. Je ressentais constamment des états grippaux. Je perdais l’appétit », raconte-t-il.
Il n’est pas le seul à ne pas se sentir bien : sa compagne a des nausées et son chat commence à perdre ses poils. Et puis il y a toujours une mauvaise odeur indéfinissable et de plus en plus présente. Impossible d’ouvrir les fenêtres côté rue tant cela
devient pestilentiel. « C’est le vétérinaire qui s’est occupé du chat qui m’a alerté sur les origines de nos troubles. Pour lui, des émanations toxiques pouvaient venir d’une habitation voisine. »
L’enquête n’est pas longue pour découvrir l’origine de tous ces maux. L’odeur vient en fait d’un studio situé au rez-dechaussée de sa maison (dont la partie d’habitation se trouve au 1er étage).
Le petit appartement, qu’au départ il pensait vide, est, en fait, occupé par un homme âgé d’une cinquantaine d’années qui souffre du syndrome de Diogène, une maladie psychique conduisant les personnes qui en sont atteintes à ne rien jeter (lire en encadré).
Alain Daniel intervient alors auprès du maire de l’époque, Catherine Cousin. Après de nombreuses démarches, en février 2014, celle-ci obtient l’ouverture du studio. Et c’est la stupeur : les ordures s’entassent partout. On a même du mal à ouvrir la porte.
Dans cet appartement de 30 m2, pas moins 20 m3 d’immondices sont évacués. « Il a fallu près de 15 jours pour tout nettoyer et décontaminer. Les ouvriers portaient des masques. Je me souviens d’un jeune gars costaud qui a fait un malaise », explique Alain Daniel. Catherine Cousin demande un placement en hôpital psychiatrique de l’occupant des lieux, mais la famille, notamment son père, propriétaire du studio qui l’héberge à titre gracieux, signe une décharge. Quelques jours plus tard, revoilà notre « Diogène » dans la place. Et avec lui, peu à peu les odeurs insupportables reviennent. Avec les chaleurs de cet été, cela devient à nouveau invivable. Alain Daniel décide donc d’alerter à nouveau la mairie.
Il y a quelques semaines, un jeune homme qui a récemment emménagé dans le studio situé juste en face s’inquiète à son
tour des odeurs. « Je suis allé frapper à sa porte et il m’a laissé entrer. Il y avait des sacs poubelles absolument partout et dans les toilettes,
c’était l’enfer », témoigne-t-il. Tous les deux seront reçus par le nouveau maire, Thierry Jorel. La mairie prévient le père, en tant que propriétaire, qu’elle souhaite visiter l’appartement. Quand début septembre, Thierry Jorel se rend sur place, les sacs poubelles ont disparu et les toilettes ont été débouchées. Alain Daniel en a vu la trace dans son
20 m3 d’ordures dans le studio Sentiment d’abandon
sous-sol où passe la canalisation du studio, qui s’est mise à suinter d’excréments.
« Le maire nous a expliqué que, selon lui, l’appartement n’était pas insalubre et qu’il lui avait donné 15 jours pour le passer à la lessive », s’étonne
Alain Daniel. Là, on se sent abandonnés, impuissants. Nous vivons isolés. Il n’est pas question de recevoir nos amis. C’est une expérience traumatisante pour moi et ma compagne. » Contacté par Le Courrier de Mantes, le maire Thierry Jorel répond que « des choses sont en cours » et qu’il n’a « rien à dire sur cette affaire ».
Pourtant, la semaine dernière, l’odeur qui régnait dans le couloir près de l’appartement était tout simplement irrespirable. Alain Daniel et ses voisins, eux, ne savent plus à qui s’adresser pour que cet homme atteint d’une forme lourde de la pathologie liée au syndrome de Diogène soit pris en charge afin que leur calvaire cesse.