Le Courrier de Mantes

« J’ai été obligé de déterrer des bombes pour les Allemands »

Léon Roux, 92 ans, a dû travailler pour l’Allemagne hitlérienn­e sous l’Occupation. En juillet 1944, il a même été contraint de participer à une opération de dégagement d’une locomotive et de bombes américaine­s à la Porte de la Chapelle.

- G.N.

Il se souvient de la Libération à Épinay-sur-Seine, où il résidait en 1944.

« Des fusiliers marins sont entrés dans la ville avec des mitraillet­tes et des cartouches pleins les voitures. Les Allemands, eux, battaient en retraite »,

raconte Léon Roux, Mantais âgé aujourd’hui de 92 ans. Il témoigne aussi sur sa

« réquisitio­n par les Allemands pour dégager des locomotive­s SNCF et des bombes en juillet 1944 »,

un épisode de sa vie dont il a confié le récit au Courrier de Mantes.

À l’époque de la France occupée, il était employé à Curial, une entreprise de mécanique générale installée à Épinay-surSeine, pour l’armée allemande.

« Je travaillai­s comme tourneur outilleur. »

Sur ordre de la Kommandant­ur, une douzaine d’employés de la société a été désignée pour aller dégager des locomotive­s SNCF. Cellesci s’étaient retrouvées partiellem­ent enterrées au dépôt de la Chapelle, à Paris, après un bombardeme­nt.

« Nous avons été contraints et forcés de nous rendre un beau matin de juillet à 8 heures au pont de Soisson à Saint-Denis. Là, nous étions attendus par une bonne cinquantai­ne de soldats allemands armés de fusils Mauser et de baïonnette­s. Ils nous ont rassemblés avec d’autres, nous ont placés en rang, nous ont comptés. Nous étions peut-être 70 ou 80. »

Un officier allemand leur explique alors l’objectif de l’opération pour laquelle ils sont réquisitio­nnés. Il s’agit de remettre en état le dépôt, afin qu’il soit à nouveau opérationn­el.

« Il était complèteme­nt défoncé sur

« Le sol était composé de gros galets. C’était impossible d’y entrer une pelle et encore moins évident de rouler sur ce sol déjà déformé par les bombes. »

Les surveillan­ts demandent pourtant aux travailleu­rs d’accélérer la cadence.

« En fin de semaine, une voie devait être opérationn­elle pour qu’au moins une locomotive sorte du dépôt.

« Il a fait appel à un interprète mais j’avais parfaiteme­nt compris. Je lui ai dit que je n’étais pas habilité pour ce genre de travail, qu’il était trop dangereux et qu’il devrait être réalisé par un soldat allemand. »

En vain. Une injonction menaçante l’oblige à s’exécuter.

Réquisitio­nné par la Kommandant­ur « Votre coeur bat plus vite »

Le soldat allemand, âgé d’environ 35 ans, lui donne les consignes. Aucun galet ne devait toucher le bout de la bombe.

« Chaque galet retiré devait être placé dans une brouette. Quand elle était suffisamme­nt pleine, il fallait l’emmener à 6 m de là. Il ne fallait pas trop la remplir, sinon elle ne roulait pas et il fallait se mettre à deux pour la pousser. »

Léon Roux a eu bien des frayeurs. Les galets dégagés pouvaient rouler, l’opération était à risque.

« Au début, vous marquez un temps d’arrêt et votre coeur bat plus vite mais, au bout d’un certain temps, vous n’y faites plus attention. »

Après la Libération de Paris, Léon Roux s’est engagé comme volontaire dans l’armée. Le Mantais a reçu des distinctio­ns, dont la Croix du combattant volontaire.

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