L’affaire des fichiers de Mantes-la-Ville au tribunal le 10 janvier
Au terme de plusieurs mois de l’enquête menée par la section des affaires économiques et financières de la PJ de Versailles, le dossier des fichiers électoraux de Mantes-la-Ville arrive devant le tribunal de grande instance.
L’affaire passera en audience à la 8e chambre correctionnelle le mardi 10 janvier à 14 heures. Quatre prévenus devront s’expliquer sur la constitution de fichiers regroupant des électeurs de Mantes-la-Ville dont les noms ont une consonance maghrébine ou africaine. Il s’agit d’Abdessamad El Warroudi, Sofia Khelloqi, Bakhoré Cissé et Youness Jaddaoui. Tous les quatre ont rejoint assez tardivement la liste de la maire sortante socialiste, Monique Brochot, battue par le Front national au terme d’une triangulaire fratricide avec l’ancienne maire PS Annette Peulvast.
Entendue à plusieurs reprises, Monique Brochot - qui avait affirmé dès le départ « ignorer l’existence de tels fichiers »
et « les condamner » si elle en avait eu connaissance - a été mise hors de cause, tout comme Abdelaziz El Jaouhari, le président de l’association des Musulmans de Mantes sud, lui aussi convoqué par les enquêteurs. D’autres personnes ont été entendues comme Lahbib Eddaouidi, le patron de La Gazette en Yvelines et fondateur de LFM, soutien d’Annette Peulvast.
Les fichiers détournés de leur vocation d’origine ?
L’affaire a débuté à la suite d’une lettre anonyme de dénonciation adressée au procureur de la République accusant la liste de Mme Brochot d’avoir utilisé des fichiers d’électeurs musulmans dans le cadre de la campagne des municipale.
S’il y a bien eu des fichiers, il semble établi qu’à aucun moment la mention d’une appartenance religieuse n’y ait figuré.
Youness Jaddaoui, l’un des prévenus, s’explique sur l’existence de ces documents utilisés à l’origine par l’association
Réflexion et action citoyenne de
Mantes-en-Yvelines : « C’était en 2013, bien avant les élections. À l’époque, nous n’avions aucun contact avec les responsables politiques. Nous étions partis du constat que les gens dans les quartiers se plaignaient de ne pas être pris en considération, mais qu’ils ne savaient pas comment faire pour s’organiser et être mieux entendus. L’objectif de notre association était s’insuffler une dynamique dans les quartiers de façon à ce que les habitants prennent part à la vie publique et deviennent acteurs et forces de proposition. Pour organiser des réunions publiques, nous avons récupéré la liste électorale à la mairie de Mantes-la-Ville, comme tout citoyen a le droit de le faire. Puis nous avons fait un tri par quartier, pour cibler nos réunions dans les quartiers des Merisiers, des Plaisances et du centre-ville. À aucun moment, nous n’avons noté une quelconque appartenance
religieuse. Jamais, nous n’avons constitué un fichier musulman. Ce n’était pas du tout notre propos. En revanche, il est clair que la composition sociologique des quartiers fait qu’il y a une majorité de nom d’origine maghrébine et africaine. Cela s’arrête là. »
Selon Youness Jaddaoui, le fichier simplement trié par quartier a fuité. Il aurait ensuite été manipulé et aurait même servi à certaines personnes pour organiser des réunions, cette fois dans le cadre de la campagne électorale.
« Ce que je n’arrive pas à comprendre, c’est l’intérêt et l’objectif de la personne qui a écrit cette lettre anonyme au procureur et comment, à partir d’un simple fichier Excel où il n’y avait aucune mention de musulman, on a pu en arriver là ? » Cette question sera-t-elle posée au tribunal ?