Gargenville : faut-il en finir avec la cimenterie ?
Les opposants au projet d’ouverture d’une nouvelle carrière de calcaire, à Brueil-en-Vexin, désignent l’usine de Gargenville comme l’un des principaux pollueurs de la région. Calcia s’en défend et affirme respecter les normes environnementales en vigueur.
L’association qui lutte contre le projet d’ouverture d’une nouvelle carrière de calcaire, à Brueil-en-Vexin, a dans le collimateur l’usine de ciment de Gargenville qu’elle désigne comme l’un des pollueurs de la région mantaise. L’AVL3C demande la reconversion du site. Un sujet qui sera abordé lors de la réunion publique organisée ce jeudi à Juziers.
L’association vexinoise de lutte contre les carrières cimentières (AVL3C-Vexin zone 109) organise une réunion publique ce jeudi 19 janvier à 20 h 30 à la salle des fêtes de Juziers. La soirée promet d’être chaude car les opposants au projet d’extension de l’extraction du calcaire par Calcia à Brueil-en-Vexin ont désormais dans leur collimateur l’usine de ciment de Gargenville, également propriété de Calcia (récemment racheté par le groupe allemand HeidelbergCement).
Selon l’AVL3C, la cimenterie de Gargenville est un problème de santé majeur. Elle demande ni plus ni moins l’abandon du projet d’ouverture de nouvelles carrières et la reconversion du site gargenvillois, en activité depuis 1926.
Pour étayer son propos, l’association s’appuie sur le fait que 87 communes des Yvelines, en majorité situées dans la vallée de la Seine, dont l’agglomération mantaise, ont été classées en zone sensible dans le plan de protection de l’atmosphère de l’Ile de France (PPA). « Cette zone a été définie par rapport aux dépassements de la valeur limite annuelle des oxydes d’azote et des PM10 (particules fines) », précise l’association.
L’AVL3C met également en avant le fait que la fabrication de ciment est une activité polluante par nature. La calcination (transformation du carbonate de calcium en chaux) est suivie de la cuisson du clinker - principal constituant du ciment - à haute température avec la silice, l’alumine et l’oxyde ferreux. « Cette fabrication produit d’énormes quantités de CO2. Au total, la fabrication d’une tonne de ciment produit jusqu’à 900 kg de CO2. Une cimenterie comme celle de Gargenville rejette donc de 350 à 450 tonnes de CO2 chaque année dans l’atmosphère. Or le CO2 a des conséquences pour la planète. C’est un gaz à effet de serre qui participe au réchauffement climatique », souligne l’association.
L’usine rejette aussi des particules fines qui s’insèrent dans nos voies respiratoires, du dioxyde de soufre (SO2), des NOx (oxydes d’azote) considérés comme particulièrement nocifs. S’y ajoutent du cadmium, du titane, des métaux (arsenic, plomb, chrome, etc.). Un tableau qui fait froid dans le dos.
L’usine répond aux normes
Cependant, la cimenterie répond aux normes fixées par les directives gouvernementales. « Il s’agit d’une installation classée. Nous y pratiquons des contrôles inopinés tous
les ans », rappelle Henri Kaltembacher, le chef d’unité départemental des Yvelines de la DRIEE (direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie).
Excepté un dépassement léger de rejet de cadmium et de titane, enregistré en février 2016, les inspecteurs de la DRIEE n’ont rien constaté d’anormal lors de leur visite complète de l’usine. Depuis cet incident, tout est rentré dans l’ordre.
« Les industriels doivent mettre en oeuvre les meilleures techniques disponibles. Cela se traduit par des valeurs maximales d’émissions autorisées. Le niveau des rejets tolérés ne cesse de baisser », explique Henri Kaltembacher. Par exemple, un arrêté préfectoral de novembre 2015 oblige le cimentier à réduire encore ses émissions de poussières de 30 à 20 mg par Nm3 (unité de mesure en mètre cube) à compter du 9 avril prochain.
2M€ investis par Calcia
« On ne peut pas laisser dire que l’usine de Gargenville à elle toute seule est un problème de santé majeur alors qu’elle se trouve dans un bassin industriel », rétorque-ton chez Calcia. « L’entreprise a réalisé 2 M€ d’investissement liés à l’environnement. Nous répondons à une réglementation de plus en plus contraignante où les seuils sont revus en permanence à la baisse. Concrètement, nous polluons beaucoup moins aujourd’hui qu’il y a 20 ans », fait remarquer le service communication de l’entreprise. Par exemple Calcia utilise moins de clinker (le produit le plus polluant) pour fabriquer ses ciments, et ajoute notamment du laitier - matière minérale artificielle - de hautfourneau. Selon Calcia le taux de CO2 relâché dans l’atmosphère serait tombé de 900 à 600 ou 700 kg par tonne de ciment produite. Enfin si Calcia obtient, l’extension des carrières à Brueilen-Vexin, il prévoit d’investir 25 millions d’euros dans une unité de production plus moderne à l’horizon de 2019.
Mais ces arguments sont loin de convaincre, les opposants, qui n’en démordent pas : « Peuton déclarer que l’air d’un territoire est anormalement pollué, qu’il faut y restreindre l’implantation d’installations ajoutant à la pollution et de l’autre côté maintenir pour des décennies un des principaux pollueurs identifiés ? »
Quelques semaines après les pics de pollution que les Yvelinois ont subis comme dans le reste des Franciliens peu de temps après l’épisode des chutes de neige de pollution sur la commune voisine de Limay, le débat risque d’être passionnant et passionné jeudi soir à Juziers
Le Mantois en zone sensible