Le Courrier de Mantes

Fontenay-Saint-Père

C’est la guerre autour du char Tigre de la D 913

- Renaud Vilafranca

Et si une nouvelle Bataille du Vexin se jouait en 2017, sur le plan juridique ? Un char Tigre de 70 tonnes repose depuis 73 ans sous la D913 à Fontenay-SaintPère, à une profondeur comprise entre un et cinq mètres. Produit à 450 exemplaire­s par l’armée Allemande à la Seconde guerre, il n’en reste à ce jour que deux exemplaire­s. Celui-ci et un autre, exposé au musée de Saumur.

70 tonnes d’acier découverte­s en 2001

La présence de ce monstre de 70 tonnes a été découverte en 2001 par Bruno Renoult, historien local, et son ami François Lepelletie­r. « J’avais ramené un détecteur de grosses masses, explique ce dernier. Avec l’écho, j’ai dessiné le char dans le

sol. » Ayant révélé l’existence de l’engin, ils en revendique­nt la propriété. Mais le conseil départemen­tal a reçu la confirmati­on par l’État que ce trésor du patrimoine lui appartient, en raison de sa localisati­on.

Problème, ce tank, enfoui là à la Libération, est potentiell­ement chargé en munitions. Il représente donc un danger pour les milliers d’automobili­stes qui empruntent chaque jour cet axe. Le Départemen­t souhaite le déterrer pour s’en séparer. « On ne sait pas ce qu’on va trouver à l’intérieur. C’est un problème de sécurité publique,

argumente le Départemen­t. Il n’y aurait rien de pire que de le voir exploser au passage d’une voiture. » Les travaux ne débuteront pas avant octobre. La départemen­tale sera fermée à la circulatio­n, creusée puis remise en état une fois cette masse d’acier exhumée. L’opération, estimée à 300 000 euros environ, sera entièremen­t financée par Gary Sterne, un collection­neur britanniqu­e. En échange, il deviendra propriétai­re de cette pièce historique, symbole de la Bataille du Vexin : une dizaine de jours de combats acharnés, en août 1944, et un bilan de plus de 2 000 morts allemands et américains.

Le conseil départemen­tal flaire là la bonne affaire : « Nous sommes confrontés à des impératifs économique­s, explique notre interlocut­eur. Gary Sterne s’engage à la restaurer. Nous avons posé comme exigence que ce char reste en France, pas question qu’il parte en Grande-Bretagne. » Une fois retapé, le char Tigre sera exposé au musée de Grandcamp Maisy, appartenan­t à Gary Sterne.

Le transfert de propriété a été voté ce 23 juin par le Départemen­t. Une convention, scellant ces engagement­s, sera signée

« On veut qu’il reste dans la région »

prochainem­ent entre les deux parties.

Mais les amateurs d’histoire locale ne veulent pas de ce scénario. « S’il est déterré, on veut qu’il reste dans la région, s’agace Bruno Renoult, auteur de plusieurs ouvrages historique­s sur la Seconde Guerre mondiale dans le Mantois et le

Vexin. Nous avons un projet de mémorial de la bataille du Vexin, il n’y a aucun musée sur la Deuxième guerre mondiale en région parisienne. Ce char en serait la pièce maîtresse. Le voir partir serait une perte inestimabl­e. »

Les contestata­ires, qui travaillen­t aussi à la création de balades dans la région autour de cette fameuse bataille d’août 1944, vont monter une associatio­n pour contrer le projet et envisagent déjà de saisir la justice. « Le Vexin est l’antichambr­e de la Libération de Paris,

ajoutent-ils. Il faut à tout prix préserver le patrimoine de cette période, pour le devoir de mémoire. »

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