Le Courrier des Yvelines (Poissy)

Si le loup y était…

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La rumeur court depuis plusieurs semaines. Le loup serait revenu dans les forêts yvelinoise­s. Les avis sont mitigés. Mais si le loup y était, il est probable qu’il ne nous mangerait pas…

Le loup est-il dangereux pour l’homme ? Attaque-t-il l’homme ? Ces questions n’ont pratiqueme­nt pas de réponses. Depuis des siècles, le loup est la bête noire des familles. Sa réputation n’est plus à faire. Il mange les enfants dans leur lit, s’attaquent à la grand-mère du Petit Chaperon rouge. Bref, le loup à mauvaise presse et la littératur­e le met à son menu pour alimenter les contes du soir. Dans les zones d’élevage, l’animal est accusé de s’attaquer aux troupeaux, de semer la zizanie dans les pâturages. À tort ou à raison ? Chacun est juge.

Depuis plusieurs années, certaines voix s’élèvent pour défendre le canis lupus. Elles affirment qu’il éviterait plutôt l’homme. Craintif, prudent, le loup chercherai­t plutôt la compagnie de la solitude ou de sa meute. Il n’attaquerai­t que lorsqu’il serait enragé, en danger ou que sa progénitur­e serait menacée. Il pourrait aussi s’approcher de l’homme pour tester celui qui s’aventure dans son territoire. Un territoire qu’il ne cesse d’arpenter et d’explorer.

L’animal aurait cependant plusieurs avantages, notamment celui de réguler certaines population­s en surnombre ou encore de naturellem­ent éliminer les espèces malades ou blessées.

Il a besoin de plus d’espace

Gérard Bédarida, président des chasseurs de grand gibier au niveau national fait partie des 2 000 correspond­ants du réseau loup de L’ONCFS. L’yvelinois arpente le territoire de notre départemen­t et celui des Alpes. Dans le Sud-est. Il a croisé plusieurs fois le loup. « Il vous regarde, vous jauge puis s’éloigne », se souvient Gérard Bédarida.

« Le premier loup est réapparu en France en 1992. Depuis, il ne cesse de progresser dans le territoire. Il est arrivé d’italie puis chaque année fait des bonds. Une expansion mesurée de 10 à 20 % tous les ans. Cela s’observe au nombre de proies attaquées qui augmentent de 10 à 20 % chaque année. Quand un loup va devoir quitter la meute au bout de deux ans, il s’en va en quête de nouveaux territoire­s. Il va chercher un espace giboyeux et une forêt calme où la densité humaine est faible. Il part seul. Mais pour s’installer, encore faut-il qu’il trouve une âme soeur ».

Pourrait-il s’implanter dans les forêts d’ile-de-france ? Gérard Bédarida en doute fort : « De ce que j’ai vu du loup en Hautesalpe­s, c’est qu’il a tendance à s’installer dans un territoire de 40 000 à 50 000 ha. Il a besoin d’un espace qui fait une fois et demi la superficie de Rambouille­t. La meute est constituée en général des louveteaux de l’année et ceux de la saison précédente. Les espoirs de colonisati­on sont limités ». De plus, le loup aime la discrétion : « Il n’ira pas dans des forêts d’ile-de-france où parfois on compte un visiteur par jour et par ha. Il va préférer des forêts plus sauvages comme le Massif Central, la Lozère ou le Morvan. »

Pour attester de sa présence, le correspond­ant du réseau loup connaît les signes : « Ce sont les traces de pas, le relevé des déjections et des poils dont on analyse L’ADN ». Lors d’une attaque, le spécialist­e du loup va analyser le cadavre de la proie. « Les morsures se font essentiell­ement au cou. Le loup va tuer en étouffant la proie. On mesure la profondeur de ses canines en introduisa­nt un crayon. Sur la proie, le loup va manger les abats rouges (coeur et poumon) et laisse les viscères. Il va ouvrir la cage thoracique par le sternum. »

Mais toutes les conclusion­s ne doivent se faire de que manière rigoureuse et scientifiq­ue. « Celles de L’ONCFS sont très pertinente­s », souligne-t-il. La certificat­ion de la présence de loup se fait en différente­s étapes : « On analyse les déjections, la répétition des cadavres. On installe des

L’office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) a créé un réseau spécifique dédié au loup, en 1994. Depuis 2001, il a été fusionné avec celui consacré au lynx.

Ce réseau est présenté comme « un outil de suivi patrimonia­l pour rendre compte des tendances d’évolution des aires de répartitio­n et de la démographi­e dans un objectif de mesurer l’état de conservati­on de ces deux espèces protégées ». Plus de 2000 correspond­ants y participen­t dans toute la France. Ils sont chargés, via une procédure pièges photos sur la zone en question. C’est ainsi qu’un loup a été photograph­ié dans la Marne. Dans un premier temps, L’ONFCS peut dire qu’il s’agit d’une zone de présence temporaire. Et si l’année suivante de nouvelles traces sont détectées et analysées, la zone peut être qualifiée de commune, de collecter des indices par le biais de fiches techniques. Ils reposent sur une observatio­n visuelle, la découverte de matière fécale, de carcasses de proies sauvages, de poils, de traces de pas, de sang, d’urine ou encore l’audition de hurlements.

Après analyse, une conclusion qui peut être révisée est donnée : présence avérée ou régulière versus présence occasionne­lle ou non avérée. C’est dans ce dernier cas, lorsque tous les éléments sont réunis, que l’on peut attester de la présence de l’animal. présence permanente ». Pour Gérard Bédarida, il ne faut pas céder à « la tentation du sensationn­el » sur cette question.

In fine, une seule certitude : le dernier loup vivant que l’ont ait eu la certitude de voir dans les Yvelines était à la réserve zoologique de Thoiry.

« La tentation du sensationn­el »

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