Le Courrier des Yvelines (Poissy)

Le départ de Phaéton revient au château

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C’est sans doute Jean de Longueuil qui a commandé, vers 1680, un tableau de cheminée monumental : Le départ de Phaéton. Le centre des monuments nationaux en a reçu le dépôt exceptionn­el du musée des Beaux-arts de Rouen. Un peintre en vue sous Louis XIV

Le tableau décrit un épisode rare tiré des Métamorpho­ses d’ovide : le départ de Phaéton. Pour comprendre la scène, il faut d’abord préciser qui est Phaéton. C’est un mortel, fils du Soleil et de l’océanide Clymène.

Pour prouver son ascendance, Phaéton demande un gage au Soleil, qui le lui accorde. Il demande à conduire le char de son père et ses chevaux ailés pendant une journée. Or, aucun mortel ne peut conduire le char du Soleil. Phaéton court donc vers sa chute.

Effets dramatique­s

Le tableau monumental (2,5 m de haut et 1,96 m de large) représente le moment de l’échange dramatique entre le père et le fils, qui s’apprête à s’élancer. La perte de contrôle des chevaux, perturbant ainsi la course des astres provoquera le foudroieme­nt de Phaéton par Jupiter. La vaine tentative des Héliades, soeurs de Phaéton, de calmer les chevaux n’y feront rien.

Le peintre grâce à un coloris sourd et doré, d’où émergent des taches violettes et vert amande, démontre son goût pour les effets dramatique­s, les tonalités chaudes, tempérées par un certain réalisme visible dans le traitement des chevaux et du palais du Soleil.

La présence nettement visible au bas du tableau des armoiries des Longueuil en partie basse est un véritable manifeste courtisan : avec sa référence explicite au Roi Soleil, il rappelle que quiconque souhaite s’élever au-dessus du Soleil court à sa perte. La destitutio­n par Louis XIV de Nicolas Fouquet en 1661, et, précédemme­nt, de René de Longueuil, en 1651, a laissé des traces.

Jean Jouvenet auteur du tableau est un peintre de grand renom. Né à Rouen en 1644, il est formé dans l’atelier familial et rejoint l’équipe de Charles Le Brun (1619-1690) en 1661. Il participe aux principaux chantiers royaux de Saint-germainen-laye, des Tuileries et de Versailles.

Reçu à l’académie de Peinture et de Sculpture en 1675, il est, avec Charles de la Fosse (1636-1716), l’un des principaux coloristes au service du roi.

En 1782, le comte d’artois, propriétai­re du château fait décrocher le tableau des appartemen­ts de la Reine (aujourd’hui dévolus au Maréchal Lannes). pour le château de Saint-germain-en-laye. Le tableau est ensuite attribué à Charles de la Fosse et il rejoint comme dépôt révolution­naire les collection­s du musée des beaux-arts de Rouen, qui le dépose au château en 2016. Il voisine ainsi deux autres tableaux de Jouvenet : Le repas chez Simon le pharisien et Les marchands chassés du Temple, tous trois à voir dans le salon à l’italienne.

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