Le Courrier des Yvelines (Poissy)

Viols, tortures et barbarie : le prêtre intégriste jugé aux assises

- F. Desserre

L’abbé Christophe R. est jugé depuis mardi devant la cour d’assises pour viols, actes de torture et de barbarie. À l’époque des faits, il exerçait dans une école privée de Goussonvil­e au sein d’un mouvement réputé intégriste. La décision doit être rendue le 5 mai.

Quatre années auront été nécessaire­s pour que les victimes se libèrent et osent déposer plainte contre Christophe R. Aujourd’hui âgé de 43 ans, ce prêtre intégriste de la Fraternité Saint-pie X est jugé cette semaine par la cour d’assises de Versailles. Les actes qui lui sont reprochés sont particuliè­rement sordides. Ils datent de l’époque où il assumait la fonction de directeur de l’école privée Notre-dame-de-la-sablonnièr­e, à Goussonvil­le, un petit village proche de Mantes-la-jolie.

L’affaire a éclaté en septembre 2013 lorsque Eliane* saisit le parquet de Versailles. Elle dénonce une série de viols dont elle aurait été victime pendant plusieurs années. Le récit de cette enseignant­e, alors âgée de 32 ans, va immédiatem­ent mettre en alerte la justice. Eliane raconte que l’abbé aurait mis en place une thérapie personnell­e lui permettant « d’accepter les hommes pour ensuite se marier ». Il parvient à la persuader qu’elle a été victime d’agressions sexuelles dans son enfance. Et il n’y a qu’une méthode pour s’en sortir : la sienne.

En juin 2010, Eliane l’accompagne chez ses parents, à Saint-quentin-sur-le-homme (Manche). Dans une grange, elle est contrainte de se déshabille­r. Un premier viol aurait eu lieu avec un gant de toilette puis une brosse à dents. Dans la même semaine, c’est dans la cave de l’école qu’il aurait abusé d’elle.

Peu de temps après, la malheureus­e subira d’autres attaques, cette fois avec une paire de ciseaux, un manche à balai, un pinceau ou des aiguilles à tricoter. « Il avait dit que j’avais été fouettée par le passé et que je devais revivre ces événements. Il m’a alors frappée sur tout le corps avec sa chemise », racontera-t-elle aux enquêteurs. Rapidement, Eliane découvrira qu’elle n’est pas la seule à subir de tels sévices.

Diane*, 23 ans à l’époque, a aussi subi un véritable lavage de cerveau. Christophe R.

Christophe R. est né le 12 juillet 1973 à Avranches, dans la Manche. Il est l’aîné d’une fratrie de quatre enfants et a commencé ses études en réussissan­t un CAP de sculpture sur bois. Après son passage à Auray (dép. 56) et Rennes, il a obtenu un brevet de technicien. Il est ensuite allé à Bitche, en Moselle, dans une école de la Fraternité Saint-pie X. Il y a passé un bac littéraire.

En 1995, il entre au séminaire de cette communauté. Il est ordonné prêtre en août 2002. Il sera envoyé à l’école Saint-jean Bosco à Marlieux, dans l’ain. En août 2006, il est nommé collaborat­eur au prieuré Saint-jean de Mantes-la-jolie puis directeur de l’école de Goussonvil­le. aurait réussi à la persuader qu’elle avait subi des agressions de la part d’hommes de sa famille. À partir d’avril 2010, elle le rencontrer­a chaque semaine. Elle subira plusieurs attaques chez les parents de l’abbé et en parlera avec Eliane. Diane racontera des séances sous la douche de l’école, des cunnilingu­s, une fellation, une sodomie.

Elle s’en plaindra auprès d’un autre prêtre de la Fraternité Saint-pie X. En réponse, elle sera exorcisée. Cet autre prêtre expliquera au juge d’instructio­n ne pas avoir dénoncé les faits car, « s’agissant de majeures, il lui semblait que c’était à elles de le faire ». Une enquête ecclésiast­ique interne sera quand même ouverte. Elle aboutira à un décret extrajudic­iaire de la Fraternité. Il ne retiendra aucune violence ni rapport sexuel mais devra donner lieu « à des remèdes pénaux et ultimement à une pénitence […] dans un but d’amendement, de réparation et de protection ».

En détresse, Diane ira jusqu’à se briser le bras pour éviter une nouvelle agression. Plus tard, le responsabl­e de la communauté, monseigneu­r Fellay, lui enverra des documents à remplir. Elle doit répondre à plusieurs questions relatives aux attaques. Manipulée par l’abbé, elle les renverra sans mentionner l’idée d’un viol. Ce n’est qu’en juin 2013 qu’elle finira par parler au grand jour. Elle a appris qu’il doit être muté à Châteaurou­x dans une école de garçons. Elle redoute que d’autres personnes ne deviennent victimes. Là-bas, son comporteme­nt inquiétera. On le dit « très affectif avec les enfants ». Ce n’est qu’à ce moment que la Fraternité Saint-pie X se décidera. Christophe R. est renvoyé chez ses parents avec le nom d’un avocat en poche.

L’affaire ayant enfin éclaté au grand jour, l’enquête va mettre en lumière l’existence de trois autres victimes : Cynthia, Nadine et Marianne*. Elles aussi subiront des interrogat­oires de l’abbé intégriste sur leur passé sexuel. Elles aussi seront attaquées via cette pseudo-thérapie. Dans « le meilleur des cas », cela se résumera à des caresses ou des baisers.

Premier viol dans la grange Abusée avec des objets Exorcisée lorsqu’elle en parle « Très affectif avec les enfants » Un chef scout fait une crise de nerfs

Un jeune chef scout relatera avoir été approché par l’homme pendant un camp d’été. Il lui demandera alors de raconter les agressions qu’il a vécues pendant l’enfance. Le tout avec des mots très crus. Le jeune homme terminera la séance par une crise de nerfs.

Arrêté le 7 avril 2014, Christophe R. niera toute pénétratio­n avec son sexe affirmant s’être « arrêté à l’orée du leur ». Malgré de multiples procédures pour comparaîtr­e libre et faire modifier les accusation­s, il est resté placé en détention provisoire. Il demeure présumé innocent. A l’ouverture du procès, ce mardi 2 mai, la partie civile avait prévu de demander un huis clos. * Les prénoms des victimes ont été modifiés.

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