Le Courrier des Yvelines (Poissy)

« Un déni de tout ce qu’on a construit depuis 30 ans »

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Tout un tissu associatif porté sur les musiques actuelles yvelinoise­s se meurt. Entretien avec Claire Guérin, directrice du Centre d’action culturelle Georges-brassens et Thierry Duval, directeur du Centre de ressources Yvelinois pour la musique.

La ville de Mantes-la-jolie n’a pas renouvelé la convention de financemen­t du CAC (330 000 €). Comprenez-vous les raisons ?

Claire Guérin : Il s’agit d’une remise en cause brutale de la gestion de la politique associativ­e, sociale, culturelle et musicale menée depuis 66 ans à Mantes-la-jolie et sur le Mantois. Notre colère, notre déception sont immenses. On nous accuse d’un manque de rayonnemen­t et de lisibilité. Ce sont des arguments qui nous semblent être davantage des prétextes plus que de réelles raisons. En 2016, la suppressio­n de la subvention du Départemen­t (60 000 €) nous avait déjà paru comme un signal d’alerte d’un possible lâchage des politiques locales.

Le CAC, ce sont dix salariés, soixante-seize activités, mille adhérents, trentedeux spectacles profession­nels par an ou encore près de deux-cents musiciens qui répètent dans les studios. C’est quoi l’après ?

Claire Guérin : Nous devons rendre les clés au 31 décembre. Nous allons faire une liquidatio­n de l’associatio­n. Nous souhaitons le faire en respectant au maximum les intérêts de nos dix salariés. Nous demandons à la mairie le financemen­t des indemnités de licencieme­nt, des congés payés et des frais de liquidatio­n. Il faut aussi protéger le plus possible les activités de nos adhérents, dans le cadre de l’intérêt général des Mantais. Ce qu’on voudrait, c’est semer des graines, créer des initiative­s pour venir en relais du CAC.

Pensez-vous que le CAC dérange ?

Claire Guérin et Thierry Duval : En tout cas, la mairie ne veut pas savoir ce que l’on fait ici. Il y a une volonté délibérée depuis deux ou trois ans d’un certain nombre d’élus du territoire de vouloir mettre à mal le projet artistique du CAC. C’est une associatio­n qui produit des activités avec un mélange intergénér­ationnel et une mixité sociale. On nous reproche de ne pas rayonner. C’est nier toute l’action culturelle avec les population­s, la sensibilis­ation et l’accompagne­ment. On ne sait pas pourquoi, mais on le saura très rapidement.

Que comptez-vous faire dans l’immédiat pour faire entendre votre colère ?

Claire Guérin : Nous allons organiser deux concerts hors les murs, dont un à Fontenay-mauvoisin, ainsi que le week-end de la mort les 13, 14 et 15 octobre au CAC. Une réunion publique aura lieu le 21 septembre à 20 h 30 à Mantes-la-jolie. Une pétition a été lancée sur le site «Mes opinions» pour dire non à la fermeture. Les musiciens se mobilisent également pour le maintien du studio de répétition.

Qu’en est-il autres structures les Yvelines ?

Thierry Duval : Depuis le début des années 2010, dans les Yvelines et particuliè­rement le Nord, la façon de concevoir les politiques publiques a largement

des dans mis à mal les projets culturels sous un mode associatif. Certains élus ne souhaitent plus confier ces activités à des acteurs associatif­s et préfèrent développer des spectacles avec des privés. C’est tout un modèle historique mis à mal. Nous, ce que l’on défend, ce sont des lieux de vie, de rencontres et d’insertion profession­nelle. Il y a une utilité sociale. Ce ne sont pas seulement des lieux de pratiques artistique­s.

En 2016, le Départemen­t s’était désengagé du CRY. Le secteur des musiques actuelles est-il en train de couler ?

Thierry Duval : On ne va pas faire croire que tout va bien alors que tout va mal. Même le Café de la Plage à Maurepas est concerné. C’est désormais un projet de ville pour faire une salle d’exposition et un concert par trimestre. C’est une structure qui subit des baisses de budget importante­s depuis trois ans. Tout cela est un déni de tout ce que nous avons construit pendant 30 ans.

Quel appel envie de lancer ?

Thierry Duval : On a peut-être raté l’implicatio­n de nos musiciens locaux dans nos actions, afin qu’ils aient conscience de l’envers du décor, car ils sont les premiers concernés. Ils doivent avoir conscience que si eux n’agissent pas auprès de leurs élus, et bien les lieux vont fermer un par un et ils n’auront plus d’endroit pour jouer.

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