Le Courrier des Yvelines (Poissy)
Les arbres seraient-ils plus intelligents que l’homme ?
Le livre La Vie secrète des arbres, de l’allemand Peter Wohlleben, est un best-seller. La thèse de l’auteur ? Les arbres sont dotés d’intelligence. Une idée qui au fil des années fait du chemin et est attestée par de plus en plus de personnes.
Les arbres auraient-ils une forme d’intelligence ? C’est ce qu’on aurait tendance à penser à la lecture du livre du forestier allemand, Peter Wohlleben. Se basant sur son expérience et des recherches scientifiques, il révèle les comportements surprenants des arbres dès qu’ils se développent dans une forêt naturelle.
L’auteur s’intéresse d’abord aux réseaux racinaires, entrelacement des ramifications souterraines qui créent des points de contacts et d’échanges entre les arbres. « Ils fonctionnent sur le même principe qu’internet par fibre optique, si bien que certains parlent de Wood Wide Web ». Pour lui, les arbres communiquent en se transmettant des infos chimiques et électriques.
De ces relations fusionnelles naissent des entraides, « une répartition des substances nutritives et d’eau entre les individus est optimale si bien que chaque arbre parvient au meilleur développement possible. Leur bien-être dépend de la communauté. Si les plus faibles disparaissent, tous y perdent. La forêt devient plus ouverte au soleil et aux vents violents…»
Le forestier démontre que les arbres ont une grande capacité à se défendre. Dans la savane, quand les acacias veulent se débarasser des girafes qui les mangent. Ils augmentent en quelques minutes la teneur en substances toxiques de leurs feuilles. Et informent leurs congénères de l’imminence du danger ! Il en est de même quand les chenilles attaquent un arbre. Les pins émettent des odeurs pour attirer les prédateurs des chenilles.
L’autre surprise du livre est le rapport entre les arbres mères et enfants. « Ils sont élevés à la dure avec une restriction de lumière mais c’est pour leur bien : « Croître lentement en début de vie conditionne la possibilité d’atteindre un grand âge ».
Pour l’auteur le centre névralgique est à chercher dans les racines qui « sont équipées de dispositifs similaires au cerveau avec un système de transmission des signaux, des structures et des molécules… que l’on retrouve chez les animaux ! »
Bruno Munilla du CERF (Centre d’études de la forêt de Rambouillet) conduit régulièrement des visites à la découverte des arbres remarquables de la forêt de Rambouillet, connue pour ses grands chênes. Pour lui, il ne faut pas tomber dans « l’anthropocentrisme », mais… Il reste surpris par la capacité d’adaptation des arbres : « Leur flexibilité très forte. Une forme d’actionréaction ». Le guide de l’association est surpris par l’adaptation des arbres en fonction des changements climatiques et du lieu : « J’ai vu un pin maritime se développer sur un pan de mur. Ce pin qui a un potentiel de plusieurs dizaines de mètres a modifié son métabolisme et s’est nanifié pour continuer à vivre ». Un même arbre seul comme le chêne n’aura pas la même attitude qu’en groupe. Le chêne seul dit bornier va avoir un fût pas très haut, un grand développement des branches et de feuilles pour résister au soleil et aux vents. « Le même individu en groupe comme on en voit au Coupe-gorge à Rambouillet va avoir une ligne plus régulière et plus haute avec un houppier assez ramassé. Les forestiers les font justement pousser les uns à côté des autres pour qu’ils s’élèvent haut pour rechercher la lumière. »
« L’union fait la force chez l’arbre »
À travers les racines, le spécialiste du CERF observe un système collectif : « Il y a une interaction entre les arbres pour faire profiter de l’eau retenue dans les racines de l’un. L’union fait la force. Cette association joue aussi avec les champignons. L’arbre apporte les sels minéraux, le champignon le composé organique ». Bruno Munilla observe que les arbres coupés continuent à vivre à travers les souches. « Il y a de beaux exemples en forêt de Dourdan où l’on voit deux à trois arbres qui repoussent à cet endroit. Mais est-ce de l’intelligence ? Dans ce cas-là on pourrait dire que les bactéries qui s’adaptent aux antibiotiques font aussi preuve d’intelligence.»