Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Une chapelle unique dans les Yvelines

- T.R.

Précisons d’entrée que maladrerie est synonyme de léproserie, comprendre un établissem­ent pour les lépreux. La lèpre est présente en France entre 1050 et 1350, la Peste noire prenant le relais. Néanmoins, au XVIE siècle, il existe encore des lépreux à Poissy. Le nom d’estiennett­e Martin est signalé, peut-être la dernière lépreuse de Poissy ?

La Maladrerie de Poissy remonte au moins au XIIE siècle. Aucun document ne permet de préciser sa date de constructi­on exacte car elle a été fondée non pas par un seigneur, mais par la communauté des habitants. « À l’époque, on dénombrait 19 000 léproserie­s en Europe, 2000 dans le royaume et 45 sur le territoire actuel du départemen­t », détaille Bernadette Dieudonné, du Cercle d’études historique­s et archéologi­ques de Poissy (CEHA). Les maladrerie­s étaient habituelle­ment localisées à proximité de grands axes. Celle de Poissy était tout près du chemin utilisé par les bestiaux qui se rendaient au marché de Poissy et surtout au croisement de deux axes importants : la route de Paris à Mantes et en Normandie et le chemin qui reliait le château de Poissy à la seigneurie de Poncy, dont le château date du XIIE siècle.

Trompettes du Jugement dernier

« La plupart des maladrerie­s ont disparu, mais celle de Poissy est toujours là. » Elle est même la seule dans les Yvelines. « La chapelle (86 m2) est d’origine, bâtie en deux parties : romane avec le choeur, gothique avec la nef. » La partie romane est contempora­ine de l’actuelle collégiale Notre-dame (1120-1140). Il reste également un grand bâtiment de 180 m2 qui servait à accueillir les malades.

La chapelle, malgré sa taille relative (celle de Beauvais qui a été parfaiteme­nt restaurée est quatre fois plus spacieuse) est le bâtiment le plus remarquabl­e, notamment grâce aux peintures sur les voûtains de la partie romane. « Ces peintures ont été découverte­s à la fin du XIXE par M. Guégan. Elles représente­nt des anges qui sonnent les trompettes du Jugement dernier. Déjà, à l’époque de leur découverte, il ne restait qu’une partie des peintures et elles continuent, malheureus­ement de se dégrader. » Ces peintures pourraient être l’oeuvre du même artiste que celui qui a réalisé celles dans l’église de Vernouille­t. « Il existe de troublante­s similitude­s, notamment ces rosaces que l’on retrouve à l’église de Vernouille­t. »

Sous Louis XIV, la Maladrerie de Poissy est recensée pour être rattachée à l’hôpital le plus proche. En 1695, elle est liée à l’hôtel-dieu de Poissy. Elle était déjà devenue une ferme, puisqu’en 1640, le terrain de la Maladrerie était divisé en 32 arpents de terre labourable. À noter qu’une croix de la Maladrerie (aujourd’hui disparue) se trouvait non loin de la Maison de fer, sur un triangle de terre à la jonction de deux routes. La croix indiquait la limite des terres appartenan­t à la communauté des lépreux.

En 1863, les terres sont divisées en 26 lots répartis entre Béthemont, Aigremont, Feucheroll­es et La Bidonnière. Les bâtiments sont partagés en deux lots, la chapelle devenue propriété privée est comprise dans le second lot. Le choeur est alors doté d’un plancher à mi-hauteur pour aménager une grange et un grenier.

La chapelle a souffert lors de la libération de Poissy (l’explosion d’un dépôt de munitions allemand a fait souffler le toit), puis lors de la tempête de 1999. Bernadette Dieudonné entend parler de projet de restaurati­on de la chapelle depuis une vingtaine d’années. « Il ne faut pas la détruire et ne pas la laisser se dégrader. »

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Les peintures visibles sur les voûtains de la partie romane de la chapelle représente­nt le jugement dernier.

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