Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Les blouses blanches piquées au vif

- Michel Seimando

Des effectifs trop réduits en zones pourtant surdotées, des journées de 12 heures, des revenus trop faibles et une profession attaquée par le ministère. Mais que réclament les infirmière­s ? Déjà de la considérat­ion.

Il est rare que les infirmiers et les infirmière­s défilent dans la rue. C’est pourtant ce qui devait se passer ce mardi 8 novembre. Le syndicat FNI (Fédération Nationale des Infirmiers) s’est joint au mouvement national des infirmière­s qui concerne tout le monde : les libérales, les salariées des secteurs public et privé, les Ibodes (les infirmière­s des blocs opératoire­s), les puéricultr­ices… Tous sont au bord de la crise de nerf !

Dans les Yvelines, le président du syndicat des infirmiers libéraux, Christian Maillard - Ils sont tout de même 715 dans le départemen­t - explique : « Trop, c’est trop. La ministre de la Santé veut faire exploser la profession. Nous croulons sous la charge de travail avec l’augmentati­on de la chirurgie ambulatoir­e, nous ne pouvons pas embaucher des infirmière­s dans nos cabinets parce que nous sommes, nous dit-on en zones surdotées. Mais le zonage a été réalisé il y a cinq ou six ans. On a pris des fichiers avec des infirmière­s à la retraite. Ces zonages ne correspond­ent pas à la réalité, aux besoins. »

Pis. La profession ne se sent pas soutenue par le ministère de la Santé qui vient d’autoriser les pharmacien­s à effectuer la vaccinatio­n antigrippe. « Ils ne sont pas là pour cela, s’insurge Christian Maillard. En ce moment, cette vaccinatio­n nous prend entre 25 et 30 actes par jour. »

Alors pourquoi sous-traiter la piqûre à d’autres ? Dans les cabinets d’infirmière­s, on explique que le ministère de la Santé voudrait compenser la baisse des recettes de certains pharmacien­s, conséquenc­e directe du dérembours­ement de nombreux médicament­s, un manque à gagner pour les apothicair­es.

Dans le même temps, les infirmiers et infirmière­s ont appris que l’europe voulait créer un statut d’auxiliaire de santé à qui incomberai­ent les pansements et petites cicatrisat­ions. « C’est une atteinte à notre profession, fulmine Christian Maillard. Nous avons des niveaux bac+3. Quel sera le niveau de ces auxiliaire­s de santé ? C’est aussi une atteinte aux soins. »

Les infirmiers libéraux, qui doivent obligatoir­ement travailler dans un cabinet, réclament une meilleure organisati­on des soins. « Nous avons énormément de déplacemen­ts non justifiés. Un soin sur deux, prescrit par un médecin hospitalie­r, impose que nous nous déplacions. Mais de nombreux patients pourraient se rendre dans nos cabinets. Nous aurions moins de perte de temps dans les transports. Et je ne vous parle pas des amendes pour mauvais stationnem­ent. » De nombreuses infirmière­s qui ne peuvent être en retard pour certains soins se garent sur les trottoirs. Bilan : 135 € de contravent­ion à comparer aux 2,50 € d’indemnité de déplacemen­t ça fait cher l’interventi­on ! Dans les Yvelines, 42,5% des infirmière­s libérales ont plus de 50 ans et travaillen­t en zones surdotées. De nombreux burn-out ont été constatés et les idées de suicide quand ce n’est pas le passage à l’acte se multiplien­t.

Un taux d’installati­on faible

Autre chiffre qui en dit long sur le malaise chez les infirmière­s du départemen­t : le taux d’installati­on. De décembre 2014 à décembre 2015, les Yvelines ont vu 48 infirmière­s libérales s’installer sur leur sol. Elles étaient 130 à Paris, 84 en Seine-et-marne et 59 dans les Hauts-de-seine. Sans parler des 68 femmes en blouse blanche arrivées durant cette année-là dans le Val-d’oise.

« Ces problèmes ressentis sont partagés dans toute la profession. Quel que soit le statut. A l’hôpital, les congés maladie ne sont pas remplacés. Ils doivent faire plus avec moins de moyens. Certains de mes collègues travaillen­t avec la boule au ventre. »

Newspapers in French

Newspapers from France