Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)
Les blouses blanches piquées au vif
Des effectifs trop réduits en zones pourtant surdotées, des journées de 12 heures, des revenus trop faibles et une profession attaquée par le ministère. Mais que réclament les infirmières ? Déjà de la considération.
Il est rare que les infirmiers et les infirmières défilent dans la rue. C’est pourtant ce qui devait se passer ce mardi 8 novembre. Le syndicat FNI (Fédération Nationale des Infirmiers) s’est joint au mouvement national des infirmières qui concerne tout le monde : les libérales, les salariées des secteurs public et privé, les Ibodes (les infirmières des blocs opératoires), les puéricultrices… Tous sont au bord de la crise de nerf !
Dans les Yvelines, le président du syndicat des infirmiers libéraux, Christian Maillard - Ils sont tout de même 715 dans le département - explique : « Trop, c’est trop. La ministre de la Santé veut faire exploser la profession. Nous croulons sous la charge de travail avec l’augmentation de la chirurgie ambulatoire, nous ne pouvons pas embaucher des infirmières dans nos cabinets parce que nous sommes, nous dit-on en zones surdotées. Mais le zonage a été réalisé il y a cinq ou six ans. On a pris des fichiers avec des infirmières à la retraite. Ces zonages ne correspondent pas à la réalité, aux besoins. »
Pis. La profession ne se sent pas soutenue par le ministère de la Santé qui vient d’autoriser les pharmaciens à effectuer la vaccination antigrippe. « Ils ne sont pas là pour cela, s’insurge Christian Maillard. En ce moment, cette vaccination nous prend entre 25 et 30 actes par jour. »
Alors pourquoi sous-traiter la piqûre à d’autres ? Dans les cabinets d’infirmières, on explique que le ministère de la Santé voudrait compenser la baisse des recettes de certains pharmaciens, conséquence directe du déremboursement de nombreux médicaments, un manque à gagner pour les apothicaires.
Dans le même temps, les infirmiers et infirmières ont appris que l’europe voulait créer un statut d’auxiliaire de santé à qui incomberaient les pansements et petites cicatrisations. « C’est une atteinte à notre profession, fulmine Christian Maillard. Nous avons des niveaux bac+3. Quel sera le niveau de ces auxiliaires de santé ? C’est aussi une atteinte aux soins. »
Les infirmiers libéraux, qui doivent obligatoirement travailler dans un cabinet, réclament une meilleure organisation des soins. « Nous avons énormément de déplacements non justifiés. Un soin sur deux, prescrit par un médecin hospitalier, impose que nous nous déplacions. Mais de nombreux patients pourraient se rendre dans nos cabinets. Nous aurions moins de perte de temps dans les transports. Et je ne vous parle pas des amendes pour mauvais stationnement. » De nombreuses infirmières qui ne peuvent être en retard pour certains soins se garent sur les trottoirs. Bilan : 135 € de contravention à comparer aux 2,50 € d’indemnité de déplacement ça fait cher l’intervention ! Dans les Yvelines, 42,5% des infirmières libérales ont plus de 50 ans et travaillent en zones surdotées. De nombreux burn-out ont été constatés et les idées de suicide quand ce n’est pas le passage à l’acte se multiplient.
Un taux d’installation faible
Autre chiffre qui en dit long sur le malaise chez les infirmières du département : le taux d’installation. De décembre 2014 à décembre 2015, les Yvelines ont vu 48 infirmières libérales s’installer sur leur sol. Elles étaient 130 à Paris, 84 en Seine-et-marne et 59 dans les Hauts-de-seine. Sans parler des 68 femmes en blouse blanche arrivées durant cette année-là dans le Val-d’oise.
« Ces problèmes ressentis sont partagés dans toute la profession. Quel que soit le statut. A l’hôpital, les congés maladie ne sont pas remplacés. Ils doivent faire plus avec moins de moyens. Certains de mes collègues travaillent avec la boule au ventre. »