Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)
L’embarras à droite
L’affaire Fillon est LE sujet de conversation de tout le monde. L’ancien homme fort à droite que l’on disait presque vainqueur de l’élection présidentielle pourra-t-il résister longtemps à la tempête ? Dans les Yvelines le soutien des élus (LR) vacille.
Il y a ceux qui continuaient la semaine dernière à le soutenir. Même si au fil des jours, leur soutien était moins fort.
Un maire de Versailles Grand Parc expliquait :« Pourquoi sortir une affaire comme celle-là à un tel moment ? Pourquoi ne pas parler de Hollande, de ce qui se passe les soirs de week-end à La Lanterne de Versailles ? Toute cette affaire me casse la tête. Maintenant, ce sont les médias poubelle qui décident qui sont les bons candidats… Ils se plaisent à tout casser alors que nous avions eu une belle primaire. Tout cela pour caser Macron qui est leur pur produit marketing ».
Pascal Thévenot, députémaire de Vélizy (LR) et soutien de François Fillon lors de la primaire de la droite et du centre s’interrogeait encore:
« Selon moi, c’est un lynchage médiatique qui est organisé contre François Fillon. Il n’est pas plus suspect qu’un autre. Il y a une liste de 120 parlementaires qui travaillent avec des membres de leur famille. Pourquoi les autres ne sont pas inquiétés ? »
Olivier de La Faire (LR), conseiller départemental et conseiller municipal à Versailles : « Il s’agit tout simplement d’une abominable machination politique. On veut détruire un homme parce qu’il peut gagner et réformer la France face à certains qui ne veulent rien changer. Le tout, alors que le pays va très mal. Oui, c’est un complot contre François Fillon, un acharnement malsain. On jette la pierre à un seul. C’est le statut de tous les élus qu’il faut revoir, de ceux qui ne ménagent pas leur temps, travaillent du lundi au dimanche, nuit et jour. »
Alain Gournac est un unanime : « Dans les Yvelines, le soutien à François Fillon est total, explique le sénateur des Yvelines. J’ai pourtant voté Sarkozy lors de la primaire. Ce que j’entends, ce que je vois c’est cet acharnement contre. On ne comprend pas. Nous le soutenons et tous mes contacts disent : «Soyons solides». Il faut garder son sangfroid. »
«Les gens sont choqués y compris nos militants»
Et puis, il y a les autres. Ceux qui n’y croient plus ou qui sont pragmatiques.
A Rambouillet, terre filloniste…tout le monde faisait bloc derrière François Fillon… et Gérard Larcher. Le 29 janvier, de nombreux habitants, dont le maire Marc Robert, avaient fait le déplacement à La Villette au meeting de François Fillon. Une pétition de soutien au candidat sorti vainqueur de la primaire à droite était signée par de nombreux Rambolitains sur Facebook. Mais après quelques jours, des voix dissonantes se faisaient entendre. Certains demandaient qu’on écoute les gens pour « éviter un second tour Le Pen-macron » et à F.fillon de se retirer.
Sur Twitter, Christine Boutin était la première à avancer l’alternative Gérard Larcher. « Dans 15 jours, ce sera trop tard ! François Fillon sera candidat, la droite sera éliminée, le FN à l’elysée!…stupéfiant le manque de courage des leaders de droite ! Plus le temps passe plus les chances de la droite de gagner diminuent », avant de réclamer que « les Républicains désignent le seul sage qui s’impose ». Autrement dit Gérard Larcher.
Jean-frédéric Poisson a bien signé le texte de soutien à François Fillon mercredi 1er février mais jeudi, il demandait à ce que les choses s’accélèrent : « J’entends ce qui se dit sur le terrain…je ne sens pas aujourd’hui suffisamment de solidité autour de ce que nous dit François Fillon », déclarait l’ancien candidat à la primaire de la droite. Quelle alternative alors ? Gérard Larcher ? Il ajoute : « Il a l’expérience dans toutes les fonctions de l’etat. Il est amené à jouer un rôle de premier plan », souligne-til. Il propose même « l’union sacrée » autour du président du Sénat pour éviter une guerre fratricide. En réponse, Gérard Larcher a déclaré sur Twitter : « Je tiens à démentir avec la plus grande fermeté les allégations extravagantes des médias : je confirme ce matin mon total soutien à François Fillon.»
Fillon doit lui-même démissionner
D’autres savent que c’est déjà fini : « Fillon est confronté à trois aspects d’une même affaire, explique une source anonyme. L’aspect juridique bien sûr mais aussi l’aspect moral. les gens sont choqués y compris nos militants par les montants d’argent évoqués. Reste enfin, le fait que François Fillon n’est plus audible dans ses meetings. Il ne va plus dans le détail de son programme. » Et d’ajouter : « Il sait qu’il ne pourra pas se maintenir. Dans la logique de la primaire, si le premier est out alors c’est le second qui doit prendre la place. En dehors d’une logique primaire, il faut réunir le bureau politique et alors là, ils vont tous se neutraliser. »
Une autre source explique : « Comment trouver un autre homme aussi vite. Larcher ? Bertrand ? François Baroin ? Ils n’ont ni programme ni équipe. »
D’autres enfin ont compris dès la semaine dernière, que les cartes sont jouées. Un détail enfin qui a son importance : un second candidat ne peut se présenter sans que François Fillon ne renonce lui-même à être candidat. En effet, il n’est écrit nulle part dans les statuts de la Haute Autorité qu’un autre candidat puisse remplacer celui qui a remporté la primaire.
Bédier : « suffisamment perturbant »
Pierre Bédier, président (LR) du conseil départemental des Yvelines : « La succession d’informations dont l’origine est inéluctablement malfaisante, politicienne et orientée rend très difficile la lisibilité de ses positions et sa possibilité à être candidat à l’élection. Avec les éléments que j’ai à ce jour, il n’y a rien d’illégal il me semble, mais c’est suffisamment perturbant dans l’esprit des citoyens pour annihiler le fond de son message. C’était d’ailleurs fait pour ça : c’est une torpille qui coule le bateau mais qui ne tue personne. Il est empêché de faire campagne dans les conditions actuelles et à mon avis il le sera durablement. Et il faut donc imaginer une solution de sortie. »
Emmanuel Lamy, maire de Saint-germain-en-laye « Ce qui m’importe c’est le triomphe de nos idées, nous en avons besoin pour la France. Aujourd’hui qui est le mieux placé pour le réaliser ? La primaire a permis de donner à François Fillon une forte légitimité. Il a donné une dynamique. On se disait le mieux c’est que François Fillon aille jusqu’au bout. Mais la situation a évolué. Il a fait une partie de sa campagne sur le fait qu’il était hors système, rigoureux, aujourd’hui son image est abîmée qu’on le veuille ou non. Sur le plan moral, il y a des dégâts incontestables. Nous n’avons plus le temps de refaire une primaire. La réponse se trouve chez François Fillon. Un plan B? A’ ? Différents noms circulent. Il m’est difficile d’en dire plus. Alain Juppé a dit qu’il n’ira pas. Nous sommes mal. »