Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Ils avaient lynché le détenu dans la cour de promenade

- Michel Seimando

Deux détenus identifiés sur les sept se sont rué sur un autre prisonnier de la maison d’arrêt de Bois-d’arcy lui infligeant une rouste. Ils ont pris cher.

Ils ont bien failli occire l’auxiliaire ! Le 11 décembre, une scène impression­nante se déroule à la maison d’arrêt de Boisd’arcy. Il est 15 heures quand des détenus se retrouvent dans la cour de promenade. Soudain, un premier prisonnier décoche un coup-de-poing au visage d’un autre homme, pourtant gaillard. Ce dernier tombe à terre puis c’est un déchaîneme­nt de violence qui s’ensuit. Sept hommes vont littéralem­ent se jeter sur lui à coups de pied. Pendant une minute, les coups pleuvent : la tête, le corps, les jambes. L’homme va perdre connaissan­ce. Personne au sein de la prison ne va voir le lynchage en direct. Il faudra visionner les films des caméras de vidéosurve­illance pour comprendre ce qui s’est passé. Seul un homme sera reconnu sur le film en plus de l’agresseur qui a reconnu avoir assené un coup-de-poing. La victime est immédiatem­ent transporté­e à l’hôpital. Le bilan de santé est énorme : fractures de la mâchoire, de la pommette, un hématome au crâne… C’est trente jours d’interrupti­on de travail que le médecin va lui faire observer.

Alors que s’est-il passé et comment expliquer cette avalanche de coups ? Jugés mercredi 8 février devant la 6e chambre correction­nelle de Versailles, les deux agresseurs n’ont pas eu les mêmes déclaratio­ns. L’un d’eux a nié avoir agressé le détenu. L’autre a reconnu l’avoir frappé mais c’était pour se défendre. Il a cru en effet que l’autre voulait le frapper pendant la promenade. D’autres rumeurs vont envahir cette prison dont le taux d’occupation des cellules culmine à 199 %. « Il a été établi qu’une fouille de votre cellule avait permis de trouver un téléphone portable, explique la présidente à celui qui avait décoché la frappe. Il semblerait que le détenu agressé était qualifié de balance par plusieurs détenus. » « Je n’ai jamais dénoncé personne. Je ne me rappelle plus de rien », répond la victime du lynchage.

Une autre version circulait entre les barreaux de la prison : la victime auxiliaire à la cantine aurait favorisé tel ou tel prisonnier. « Il faisait des trafics avec des téléphones, de l’alcool, explique l’autre détenu. Dans une prison, l’auxi (pour l’axillaire), c’est le roi ! »

Ce n’est pas la jungle !

Une pétition signée par une dizaine de prisonnier­s aurait reproché à la victime de ce guetapens de se conduire en tyran au sein de la prison. Une hypothèse que les rapports de l’administra­tion pénitentia­ire ne semblaient pas confirmer. « Il faut préciser le contexte dans cette affaire, a plaidé l’excellent avocat d’un des agresseurs, Me Yves Leberquier. Le bruit court que celui-ci aurait un comporteme­nt tyrannique. De nombreux détenus évoquent le caractère violent de cet homme qui pèse 130 kg et mesure 1,90. Ils n’en veulent plus à l’étage. J’ai fait une demande auprès de la direction pour diligenter une enquête, on se cache derrière la justice. »

« Bois-d’arcy, ce n’est pas la jungle ! Il s’est fait casser la figure, a défendu l’avocat de la partie civile. Mon client distribue les repas depuis 27 mois. Pas un seul accident. Il n’y a aucun accident avant les faits. »

Dans le box, l’un des agresseurs qui a frappé son « ami » s’excuse et explique : « On a eu des mots. Je lui ai expliqué que les détenus se plaignaien­t. Quand il a levé le bras, je l’ai frappé. »

« L’omertà règne dans la prison. Pourquoi avoir fait cela ? interroge la procureure de la République. J’ai visionné le film et pu voir la violence du lynchage. Rarement on peut voir autant de violence : sept détenus qui en tabassent un autre à terre. »

Les magistrats vont taper fort eux aussi. 18 mois de prison pour celui qui niait avoir participé à l’agression en groupe. 30 mois de prison ferme pour le boxeur qui a mis à terre le colosse. Et dire que ce tout petit monde va se retrouver à Bois-d’arcy !

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Le 11 décembre, un détenu a été victime d’un règlement de comptes au cours d’une promenade.

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