Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)
La rondelle à la vache et au veau
Catherine Schwab, conservatrice chargée des collections de la Préhistoire, présente une rondelle figurant une femelle auroch et un jeune bison, datant de - 18 000 à - 11 000 ans. L’objet est visible au Musée d’archéologie nationale de Saint-germain-en-laye.
C’est la construction de la route impériale qui entraîne, en 1857, la découverte de vestiges préhistoriques dans l’immense grotte du Mas d’azil (Ariège) et, dès 1860, les premières fouilles archéologiques. Les préhistoriens ont mis au jour deux importants ensembles magdaléniens, l’un attribuable au Magdalénien moyen (vers – 15 000 ans), l’autre au Magdalénien supérieur (vers – 13 000 ans), qui ont livré une abondante industrie, lithique et osseuse, ainsi que de nombreuses oeuvres d’art.
Un décor gravé figuré
La rondelle découpée a été découverte par Marthe et Saintjust Péquart en 1937 ou 1938. Parfaitement circulaire, avec un diamètre de cinq centimètres, elle montre une perforation centrale bien placée et des bords extérieurs soigneusement polis. Elle est conservée entière – fait exceptionnel – et décorée de figures animales, alors que la plupart des rondelles sont ornées de motifs géométriques.
Sur une face, on peut voir un avant-train de boviné adulte, judicieusement inscrit dans le cercle de la rondelle. Les détails sont efficaces et élégants : les cornes et les oreilles, l’oeil et la narine, ainsi que le pelage au niveau du garrot et du poitrail. L’autre face porte un jeune boviné complet, dont la disposition est également très réussie. L’on y retrouve les mêmes détails et la même façon de traiter le pelage. Le jeune animal est deux fois moins grand que le sujet adulte, ce qui correspond aux véritables proportions.
Des objets de parure
Cette rondelle découpée a été dénommée par les préhistoriens rondelle de la vache et son veau. Ils y avaient vu la représentation de deux aurochs, une femelle et un jeune, probablement son petit. Mais, selon les archéozoologues, la femelle et le jeune n’appartiennent pas à la même espèce : il s’agit d’une femelle aurochs et d’un jeune bison. L’idée qu’a voulu traduire l’artiste préhistorique serait donc plus complexe encore que celle de la maternité…
Sur ces rondelles, comme sur de nombreux objets d’art ou dans bien des grottes ornées, nous nous trouvons face à la juxtaposition de figures animales dont nous ignorons la signification. Bien connues dans le Magdalénien moyen des Pyrénées, ces rondelles sont découpées dans des omoplates puis perforées et gravées.
Les rondelles découpées sont considérées comme des éléments de parure, des pendeloques qui étaient portées autour du cou ou des appliques qui étaient cousues sur les vêtements de peau. On peut les rapprocher des contours découpés, façonnés également dans des os extrêmement fins, figurant surtout des têtes de chevaux.
Pour avoir une idée complète de la parure magdalénienne, il faut ajouter à ces pendeloques (ou appliques) une grande variété de dents percées, de coquilles perforées, d’éléments sculptés, ainsi que de petits objets réutilisés en bijoux (extrémités de lissoirs, pointes de sagaies, etc.).