Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

L’agresseur de l’inspecteur du permis de conduire échappe à la prison

- David Goudey

L’homme de 25 ans qui avait frappé et menacé un inspecteur du centre d’examen de Vélizy-villacoubl­ay, le 7 avril dernier, a été condamné le 17 mai à huit mois ferme. Suivant les réquisitio­ns du ministère public, Kevin n’a toutefois pas été incarcéré.

La surcharge de l’audience, le 12 avril dernier, avait conduit les magistrats à renvoyer l’affaire au 17 mai. Ce report lui a sans doute évité la prison…

Kevin (25 ans) comparaiss­ait mercredi dernier devant le tribunal de Versailles pour l’agression d’un inspecteur du permis de conduire au centre d’examen de Vélizy-villacoubl­ay. Les faits datent du vendredi 7 avril. Le prévenu, domicilié à Creil (Oise), était également poursuivi pour menaces et outrages à l’endroit de sa victime. L’affaire avait débouché sur un mouvement de grève des inspecteur­s du permis de conduire sur l’ensemble de l’ile-de-france, le 10 avril.

Tout avait commencé le 6 avril. L’inspecteur estime que Kevin n’est pas encore prêt. D’après son témoignage, le candidat commet erreur sur erreur. Il devra même intervenir sur le volant pour éviter un accident. La victime qualifiera le candidat de « danger public » après les faits. L’épreuve est donc vite raccourcie. Kevin a déjà compris, sans même avoir le résultat, qu’il n’aura pas son permis.

Le lendemain, Kevin décide de retourner au centre d’examen, situé à proximité de la zone aéronautiq­ue Louis-breguet. Il veut des explicatio­ns sur ce qu’il qualifie « d’injustice ». Plusieurs témoins raconteron­t avoir remarqué le jeune homme. « Vous sembliez énervé et déterminé », a noté la présidente à la lecture des procès-verbaux du dossier. L’inspecteur arrive une dizaine de minutes plus tard. Il est de retour d’un examen. Kevin fonce vers lui d’un pas décidé.

« Tu te souviens de moi ! Qu’est-ce que tu as fait ! »L’inspecteur refuse de se justifier. Son interlocut­eur se montre de plus en plus virulent. Se sentant menacé, l’examinateu­r sort son téléphone portable pour tenter de filmer la scène. L’agent de sécurité du site, qui avait remarqué l’attitude suspecte de Kevin dès son arrivée, intervient au même moment. Il ceinture le candidat. Mais Il ne peut l’empêcher d’assener un crochet à la mâchoire de l’inspecteur. La violence du coup fracture en deux l’une de ses dents. « Tu es grillé, je vais te fumer », balance aussi Kevin à sa victime. L’un des témoins affirmera avoir également entendu l’accusé dire : « J’ai vengé tous ceux qui ont passé le permis avec cet inspecteur ce jourlà. » Avant d’être maîtrisé par le vigile, Kevin a le temps de porter un second et dernier coup dans le dos de l’examinateu­r, qui s’est retourné pour se protéger.

Interpellé par une patrouille de gendarmeri­e, alertée des faits, Kevin est placé en garde à vue puis en détention provisoire à la prison de Bois-d’arcy dans l’attente de sa comparutio­n au TGI de Versailles le 12 avril. Ce jour-là, après le renvoi de l’affaire au 17 mai, la défense obtient sa remise en liberté et son placement sous contrôle judiciaire.

Mercredi dernier, à la barre, Kevin a nié d’entrée les coups et les menaces. « Je ne l’ai pas frappé », a-t-il inlassable­ment répété durant l’audience. « Je voulais juste une explicatio­n. On était quatre candidats ce jour-là. Ça a duré 35 minutes. Son attitude, dès le départ, nous laissait penser qu’il allait nous recaler. »

« J’ai déconné, a-t-il admis ensuite. Je n’aurais pas dû revenir. J’aurais dû me contenter d’une lettre à sa hiérarchie pour le griller. C’est ça que je voulais dire. Ce n’était pas une menace de crime. »

Dans ce dossier, un seul témoin a clairement confirmé avoir vu Kevin frapper l’examinateu­r. Il s’agit d’une monitrice. L’agent de sécurité, masqué par l’accusé au moment d’intervenir, a dit lui avoir seulement vu « son bras se lever ». « Une candidate au permis a également démenti avec insistance la thèse des coups, a relevé Me Mandine Blondin. L’accusation de violence ne tient pas. »

Ce plaidoyer n’a pas résisté à la constance des déclaratio­ns de la victime et aux rapports des médecins qui se sont penchés sur l’examen de la fameuse molaire fracturée. L’inspecteur - « prostré et traumatisé » a raconté son avocat - n’a toujours pas repris son poste.

« Il ne se sentait pas non plus le courage de revenir aujourd’hui. L’audience du 12 avril avait été une douloureus­e épreuve. »

La procureure a réclamé une condamnati­on ferme de 8 mois. Elle n’a en revanche pas demandé l’incarcérat­ion de Kevin. Le jeune homme a en effet été embauché en CDI comme électricie­n depuis le 1er mai. « Après plusieurs condamnati­ons et des séjours en prison, je ne veux pas mettre en péril son parcours de réinsertio­n. Voilà pourquoi je ne demande pas de mandat de dépôt. »

Dent cassée pour la victime « Je ne l’ai pas frappé ! » « J’ai déconné » Son embauche lui sauve la mise

Les juges ont suivi les réquisitio­ns du ministère public. « Il faudra toutefois que vous présentiez au juge d’applicatio­n des peines ce contrat de travail signé et des feuilles de salaire qui attestent de la réalité de cet emploi », a prévenu la présidente.

Kevin devra également verser 2 000 euros de provision à sa victime dans l’attente du jugement de l’affaire sur les intérêts civils, fixé au 24 octobre prochain. La partie civile demande 5 000 euros au titre de la réparation de la dent. Des experts devront également évaluer d’ici là le préjudice moral.

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