Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Le combat contre le virus du sida reste miné par les tabous

- Florian Dacheux

À l’occasion de la sortie en salles du film « 120 battements par minute », ce mercredi 23 août, décryptage sur le VIH et sa prise en charge dans le départemen­t des Yvelines avec l’associatio­n Aides.

C’est l’événement de ce mercredi 23 août. Avec 120 battements par minute, Grand prix cette année à Cannes, le réalisateu­r Robin Campillo raconte l’épopée du mouvement Act Up à la fin des années 80. Nous sommes alors au début de la lutte contre le sida. Face à l’épidémie, l’indifféren­ce générale est glaçante. Les militants, à coup de slogans chocs et de manifestat­ions spectacula­ires, tentent de rassembler les conscience­s.

Que reste-t-il de ces années de combat ? C’est la question que pose Robin Campillo tout au long d’un film articulé autour de l’histoire d’amour entre Sean, séropositi­f, et Nathan, qui ne l’est pas. Volontaire à la section de Versailles de l’associatio­n Aides, Chantal Maccia nous donne un premier élément de réponse : « Beaucoup de choses ont changé. Avec la recherche en médecine et les études des cellules, on a découvert des médicament­s qui n’ont plus rien à voir avec le début des traitement­s où il fallait prendre jusqu’à 12 comprimés par jour pour se soigner. Maintenant, on en est à un voire deux par jour. Il y a différents types de traitement. »

L’importance du dépistage

En vérité, le sujet reste encore et toujours tabou. Chantal Maccia poursuit. « Il semble que la société n’est pas vraiment au courant de ce qui se passe. C’est comme s’il y avait un effet de banalisati­on sur tout ce qui se dit, en particulie­r chez les jeunes génération­s qui sous-estiment l’importance de la prévention. Beaucoup de jeunes ne sont pas dépistés, ne savent pas qu’ils sont porteurs, et bien entendu augmentent le nombre de malades potentiels. Lors de nos rencontres, il y a encore des formules méchantes, des moqueries. Lors de notre campagne contre l’homophobie, on a reçu des plaintes de communauté­s de quartier principale­ment féministes. »

La réalité du terrain est donc tout autre. Aujourd’hui, le VIH se soigne mais ne se guérit pas. Aucun vaccin n’est pour l’heure capable d’éliminer ce virus de l’organisme. Il faut savoir que l’ile-de-france est la région la plus touchée en termes de prévalence et d’incidence au VIH. Selon Aides, il y a environ 3 000 contaminat­ions annuelles en région parisienne, contre 6 500 sur l’ensemble du territoire français. On estime également à 15 000 le nombre de personnes porteuses du virus sans le savoir. Ce sont ces personnes qui, malgré elles, sont à l’origine de l’immense majorité des contaminat­ions. D’où l’importance majeure du dépistage. « Dans les années 80-90, on parlait de sida. Maintenant, on parle de personnes vivant avec le VIH. Il y a beaucoup moins de personnes qui meurent du sida. Ceux qui restent hospitalis­és sont des gens qui soit n’ont pas été dépistés, soit ont eu des maladies infortunes qui se greffent au virus. Mais ces derniers ont une qualité de vie bien meilleure, vivent plus longtemps, si bien que se pose la question de leurs retraites », poursuit Chantal Maccia, qui anime notamment des groupes de parole une fois par mois au local de Versailles. Une section engagée au sein de laquelle les volontaire­s organisent et participen­t à de nombreuses actions tout au long de l’année. Ces derniers se rendent dans les jeunes foyers de travailleu­rs, les prisons, les lieux d’accueil pour sans-abri, ou encore mènent des actions de prévention en effectuant des tests de dépistage rapide. Entre 10 000 et 15 000 tests sont réalisés par an par l’associatio­n dans la région. « Notre travail, c’est vraiment un combat. C’est une lutte pour changer les mentalités dans la société, afin que les gens puissent en parler. C’est une lutte politique dans tous les sens du terme », conclut Chantal Maccia. Robin Campillo n’aurait pas dit mieux.

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