Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Bien plus qu’une main aux fesses

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« Tu fais beaucoup souffrir tes parents, penses-y ! Tu n’auras pas de deuxième chance. » À l’heure où les juges, dans le secret du huis clos de leurs délibérati­ons, décidaient du sort de l’accusé, le père de Tatiana (*), lui, avait déjà compris que l’agresseur de sa fille (19 ans au moment des faits) n’irait sans doute pas en prison. Quelques minutes plus tôt, le procureur de la République avait d’ailleurs requis 6 mois avec sursis contre Guillaume (26 ans), poursuivi pour avoir mis une main aux fesses à la jeune Mansonnien­ne le 7 avril dernier vers 1 heure du matin dans l’obscurité inquiétant­e de la rue d’achères.

Sans haine, mais avec force conviction, le père de Tatiana est venu « secouer » Guillaume avec des mots choisis. Soutenu par ses parents et sa soeur, l’accusé a ensuite regagné la salle d’audience. Verdict : 6 mois de prison assortis du sursis et d’une mise à l’épreuve d’une durée de 2 ans.

Tout avait commencé, deux heures plus tôt, par un coup de théâtre. Arrivé libre à son procès, ce 31 août, Guillaume était à la barre depuis un petit quart d’heure lorsqu’il s’est écroulé, après avoir tenté vainement de s’asseoir comme l’y avait invité la présidente du tribunal. Ses parents et sa soeur ont accouru pour lui porter assistance. Rien de grave ! Stressé et sousalimen­té depuis vingt-quatre heures, le prévenu a été victime d’un léger malaise vagal. L’audience a été suspendue une heure. Guillaume, en proie à de sérieux problèmes avec l’alcool, avait eu le temps de confesser les pulsions sexuelles qui l’assaillent quand il a trop bu. Le 7 avril, il sort justement d’une soirée entre amis arrosée au whisky. Le paysagiste, domicilié à Jouyle-moutier (Val-d’oise), est à bord de sa camionnett­e lorsqu’il aperçoit Tatiana. Il se gare, descend et la suit, dissimulan­t son visage sous sa capuche. « J’ai vu une ombre, a témoigné la victime à la barre. Je me suis décalée, je pensais que je ne marchais pas assez vite. Soudain, j’ai reçu une grande claque aux fesses. Et il s’est enfui. »

Mais Tatiana n’a pas l’intention d’en rester là. Elle prend en chasse discrèteme­nt son agresseur, qui a pris la direction de la gare, pour le prendre en photo avec son smartphone. « C’est là que j’ai eu très peur ! Il m’a vu et a commencé à revenir vers mois. Il avait un couteau dans la main. » Tatiana prend ses jambes à son cou puis stoppe une automobili­ste qui passait par là. Son agresseur disparaît avant d’être à nouveau aperçu, filant à vive à allure dans un Berlingo blanc. La jeune fille a le temps de relever sa plaque d’immatricul­ation. L’alerte est donnée. Le véhicule est intercepté peu après. L’homme à son bord est à la fois sous l’empire de l’alcool et du cannabis.

Le 31 août, Guillaume - inconnu jusquelà de la justice - a admis ne pas en être à un coup d’essai. « Ça a dû m’arriver une ou deux fois », a-t-il confessé sans plus d’explicatio­ns. « Mais comme à chaque fois j’ai bu, je ne me souviens pas trop. » « L’alcool, la pulsion ? Trop simple ! a souligné la juge. Ce soir-là, vous avez eu le comporteme­nt d’un prédateur. » « Je sais que ce n’est pas bien ! Je ne sais pas pourquoi je fais ça. »

Le père de la victime « secoue » l’accusé Tatiana raconte ses nuits d’angoisse

Tatiana, qui est parvenue à cacher l’agression à son père pendant trois mois, a raconté ensuite le traumatism­e qu’elle continue à subir. « Je suis devenue parano. Je ne peux plus me déplacer seule dans la rue. Je dors aussi très mal et j’ai de fréquentes poussées d’eczéma. » Plus solennelle, elle a souligné surtout qu’elle était là pour « qu’il ne recommence plus jamais ». « Je ne veux pas que quelqu’un souffre à nouveau comme moi à cause de lui. » À l’issue du délibéré, la juge a d’ailleurs insisté sur son remarquabl­e courage, « ce soir-là comme aujourd’hui à la barre ».

Décrit par les experts psychiatre­s comme une personne « mal dans sa peau et au comporteme­nt sexuel archaïque », Guillaume a entamé des soins depuis les faits pour chasser ses démons de l’alcool et de la drogue mais aussi combattre ses pulsions. Cette double obligation courra encore pendant deux ans a décidé le tribunal. Son nom sera également inscrit dans le fichier national des délinquant­s sexuels. David Goudey (*) Le prénom a été modifié.

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