Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)

Ils n’oublieront pas Jean Rochefort

- F.C. Philippe Cohen

On lui doit plus de 150 films parmi lesquels Le crabe-tambour, Un éléphant ça trompe énormément ou encore Ridicule. L’acteur Jean Rochefort est mort dans la nuit de dimanche à lundi, à l’âge de 87 ans. Depuis les années 70, il habitait dans le Sud-yvelines.

Sa voix reconnaiss­able entre mille et son regard bleu très profond hantent encore les esprits. « Pétillant, joueur, accessible », ce sont les qualificat­ifs qui reviennent quand les Rambolitai­ns parlent de Jean Rochefort. « Un homme très avenant, toujours souriant, aimable. Il vivait à Auffargis depuis le début des années 90. C’était sa résidence principale, il y avait ses chevaux. Avant de retourner à Paris il y a quatre ans », raconte Daniel Bonte, le maire d’auffargis.

Dans la région de Rambouille­t, tout le monde a vu, croisé ou connu le grand comédien. Sa silhouette et son écharpe rouge sont familières aux habitants. « On le croisait aux abords du marché ou au cinéma Vox dont il était un habitué. Il était très accessible comme Yves Robert, qui vivait lui aussi dans notre région », se souvient Didier Derouin, du cinéma Vox. Il aimait par-dessus tout le cinéma art et essai au charme d’antan. « Il appréciait la mise en scène des séances avec les lampes et le rideau rouge du Vox », se souvient, émue, Claire Leluc qui dirige le cinéma Vox depuis 1988.

À l’aise dans le petit ciné de Rambouille­t

L’acteur venait comme un spectateur lambda et tenait pardessus tout à payer sa place à chaque fois. « C’est ma façon de soutenir le cinéma ! », clamait-il avec son rire inimitable. Quand il attendait au guichet, il lui arrivait de lancer à la cantonade : « Surtout ne vous dérangez pas ! Faîtes comme si je n’étais pas là ! ».

De quoi surprendre et faire sourire les spectateur­s. « C’était son côté joueur. Au départ discret, il s’était peu à peu senti à l’aise dans le cinéma et à Rambouille­t. Il discutait d’un film, de la trouvaille du réalisateu­r, acceptait les photos, toujours avec le sourire, prenant les gens par l’épaule, très humain, très complice », confient Didier et Claire du Vox. Quand le cinéma proposa à Jean Rochefort d’être leur grand invité, il accepta tout de suite de soutenir un premier film : Tombés du ciel de Philippe Lioret, en Jean-pierre Marielle et son fils François, Philippe Noiret et son épouse Monique Chaumette, Jean-paul Belmondo, avec son yorkshire sous le bras, Pierre Vernier, Michel Beaune… Michel Piccoli rejoignit l’équipe aux Piffaudièr­es. Tous savourèren­t un pantagruél­ique pot-au-feu préparé par Maryse, la cuisinière de Jean Rochefort ».

Dans le livre d’or de la mairie, Jean Rochefort écrit, ce jour-là, « Beaucoup d’émotions. Merci ». 1993. « Il savait être présent quand il fallait défendre un film, mettre quelqu’un à l’étrier, la marque d’un grand. Par contre, il disait n’a pas besoin de moi pour marcher. » Au cours des deux décennies, Jean Rochefort aura été un habitué du Vox. Il prenait les responsabl­es du cinéma dans ses bras s’exclamant : « C’est mes enfants de cinéma ! » Il fut à nouveau grand invité pour un film qui lui tenait à coeur, Cavalier seul.

« Il aimait les chevaux qui ont du sang »

Son amour des chevaux avait fait du Sud-yvelines la région de prédilecti­on de Jean Rochefort. D’abord à Grosrouvre, puis à Poigny, avant de s’installer à Raizeux (lire ci-dessous) et enfin au haras de Villequoy, à Auffargis. C’est là qu’avec son épouse Françoise, ils élevaient des chevaux. Le comédien fréquentai­t le haras de La Cense, à Rochefort. Il venait d’ailleurs de signer la préface d’un ouvrage du haras : « C’était un amoureux des chevaux, qui a partagé sa passion avec le talent, qu’on lui connaît. Les sports équestres lui doivent beaucoup. Nous perdons un grand homme de cheval », témoigne Anne Desaintema­rie, directrice.

« Jean Rochefort avait la passion de l’élevage. Son cheval préféré était Nashville, un bel étalon. Il aimait les chevaux avec du sang, les pur-sang et les anglo-arabes, car il était adepte du concours complet », se souvient Eric Sanceau, ancien cavalier internatio­nal et éleveur à Auffargis.

« J’étais allé le voir quand je cherchais un cheval en 1989. J’avais essayé son premier cheval né par transfert d’embryon. Il s’appelait Utopique. C’était ma première rencontre avec Jean que j’ai suivi durant 25 ans. Il cherchait la finesse dans le dressage et avait horreur de la brutalité. » Lors des grandes compétitio­ns ou des concours locaux, Jean Rochefort était toujours présent. « Il me lançait : comment tu vas mon poussin ! Toujours avec gentilless­e. » Eric Sanceau le croisait parfois avec Guillaume Canet. « Il aimait déjà transmettr­e cette passion pour les chevaux à ses amis comédiens comme Philippe Noiret et Jean-pierre Marielle. Nous les avions accueillis pour un tournage dans notre maison familiale des Gandines aux Essarts. »

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