Le Courrier des Yvelines (Saint-Germain-en-Laye)
Une comédie policière en forme de cabaret
Sylvain Maurice, directeur du théâtre de Sartrouville depuis 2013, signe la mise en scène de La 7e fonction du langage, d’après le roman de Laurent Binet. Un mélange de polar et de comédie mis en scène comme un cabaret à découvrir dès ce mercredi. « Une façon irrévérencieuse d’aborder des sujets intellectuels »
Au moment de sa sortie en août 2015, La 7e fonction du langage de Laurent Binet avait suscité une polémique. L’auteur de HHHH (prix Goncourt du premier roman) et de Rien ne se passe comme prévu (sur la campagne présidentielle de François Hollande) signait ce roman en forme de Cluedo au sein de l’intelligentsia littéraire et s’attaquait dans la foulée à des personnalités toujours vivantes dont Bernard-henri Lévy ou Philippe Sollers.
« J’ai découvert ce roman au moment de sa sortie, témoigne Sylvain Maurice, directeur du théâtre de Sartrouville depuis 2013 et metteur en scène. Je l’avais trouvé très drôle et féroce. L’auteur se paye la tête de faux intellectuels, ceux qui occupent la scène médiatique. Cela avait suscité une polémique littéraire mais il n’y a eu aucune suite judiciaire. Heureusement, nous sommes quand même dans le pays des Droits de l’homme ! »
Depuis un an, Sylvain Maurice travaille sur l’adaptation scénique du roman. La première est programmée ce mercredi 8 novembre à 20 h 30 au théâtre de Sartrouville. De nombreuses dates sont également prévues jusqu’au 25 novembre (lire cidessous).
« C’est à la fois un polar et une comédie et nous avons monté le tout comme un cabaret, un spectacle drôle avec trois comédiens, deux musiciens, des chansons, des numéros d’éloquence. Nous avons choisi d’être dans quelque chose de ludique, une façon irrévérencieuse d’aborder des sujets intellectuels. »
L’intrigue tourne autour de la mort de Roland Barthes (19151980), le philosophe et auteur de Fragments d’un discours amoureux. L’auteur imagine un complot qui a conduit à l’assassinat de l’auteur le 25 février 1980, renversé par une camionnette de blanchisserie alors qu’il sortait d’un déjeuner avec François Mitterrand.
La sémiologie pour les nuls
L’enquête rocambolesque est menée par un policier des renseignements généraux, Jacques Bayard, assisté par Simon Herzog, un jeune thésard qui initie les jeunes étudiants à la sémiologie. « Bayard n’y connaît rien en sémiologie, c’est notre Candide et par son intermédiaire, le public va apprendre des choses, à la façon « la sémiologie pour les nuls », explique Sylvain Maurice. Simon est un jeune prof, chargé de TD, plus érudit, certes mais, il n’y connaît rien à la vie, c’est un jeune puceau qui va s’émanciper. Simon est plutôt de gauche alors que Bayard est de droite. Malgré tout, ils vont devenir les meilleurs amis du monde. »
Au cours de leur enquête qui va les conduire de Paris, à Bologne, en passant par l’université Cornell aux États-unis, Venise, Naples, etc., les deux protagonistes vont rencontrer les intellectuels du microcosme linguistique et littéraire parisien et international, souvent mis dans des situations cocasses ou ridicules.
« Dans le livre, il cite un grand nombre de personnalités (Michel Foucault, Jean-edern Hallier, Bernard-henri Lévy, Julia Kristeva, Philippe Sollers, Louis Althusser, Jacques Derrida, Hélène Cixous, Umberto Eco, John Searle, Roman Jakobson…). Nous ne les reprenons pas toutes dans la pièce. »
Il est question d’une société secrète, le Logos Club qui organise des joutes verbales et d’un document disparu consacré à une mystérieuse « septième fonction du langage », qui donnerait un pouvoir de conviction démesuré à celui qui la connaîtrait.
« La pièce a un aspect politique, sans prise de tête. Cela parle notamment de la communication et des petites phrases. À la fin de la pièce, il est question de débat présidentiel à la télévision. »
Pot-pourri musical
Trois comédiens (Constance Larrieu, Pascal Martin-granel et Manuel Vallade) interprètent les deux protagonistes ainsi qu’une galerie de personnages. « Ce sont des fidèles de ma troupe ou des personnes que j’ai vu jouer ». La musique joue également un rôle important dans la pièce. « Il y a un peu de tout, de l’électro, du tango, des musiques de films, O Sole Mio… C’est un pot-pourri comme dans un cabaret. »
La pièce est présentée à Sartrouville jusqu’au 25 novembre, puis tournera en région dès le mois de décembre. « Nous allons notamment jouer à Dijon, Béthune, Chalon-sursaône… ».
À noter que Sylvain Maurice prépare une autre pièce à découvrir au théâtre de Sartrouville du 7 au 16 février : Bibi. « C’est un très joli spectacle qui met en scène des comédiens en situation de handicap mental et physique. »